Un échange de missive, pas présomptueux, une simple demande d’une élève à une professeure. Une demande d’entraînements, de cours particuliers. Difficile de dire non, pour la simple et bonne raison qu’Elly aimait quand les jeunes élèves se prenaient en main : tenir compte de ses faiblesses et de ses difficultés, les cerner pour mieux travailler dessus, c’était un comportement que la brune aimait beaucoup, et elle avait eu l’impression d’avoir à faire à ce trait de caractère face aux lettres de Miss Naoui.

Il ne faisait pas vraiment froid, mais pas spécialement chaud non plus. Le soleil égayait de ses rayons l’immensité du parc de Poudlard. Mais le printemps n’était pas là, pas encore, et la fraîcheur avait tôt fait de se rappeler auprès de ceux qui ne sortaient pas assez couverts. D’autant plus que l’humidité du lac, juste à côté, avait tendance à geler les chaires jusqu’aux os. La brune était donc sortie avec son habituelle cape noire. Seule ses mains sortaient, montrant par la même occasion la baguette qui tournait, virait, roulait entre les doigts frêles de l’enseignante. Elle avait hâte de voir sur quoi portait les interrogations de la jeune fille.

Les yeux parcourent l’immensité verdoyante offerte aux rétines, peu d’étudiants dehors : quel dommage vu le beau temps ! Mais qu’importe, il n’en sera que plus facile de trouver la jeune fille. Une silhouette dans l’attente, ça se remarque forcément. Et d’ailleurs, rapidement, les yeux se posent sur une ombre qui semble attendre … alors l’enseignante se rapproche, interroge dans la voix « Miss Naoui ? ». Oui il était probable qu’elles se soient croisées en cours, mais il y a un nombre incroyable d’élève dans cette école de sorcellerie, et parfois, les visages, les noms, les prénoms, tout se mélangeait pour ne faire qu’un amas de lettres incompréhensibles. Alors le doute est permis.

La confirmation arrive : il s’agit bien de l’élève qu’est supposée rencontrer l’ancienne auror. Elle sourit, une réponse simple, non verbale. Il y a une sorte de stress, la brune le ressent. Le trouve normal et légitime. Après tout, peu d’élèves étaient capables d’admettre des lacunes, et peu d’entre eux encore n’étaient pas capables d’appeler à l’aide pour combler les faiblesses. La jeune Serdaigle – comme l’indique l’uniforme – a d’ailleurs toute la compassion d’Elly pour cet effort qu’elle a fait. Il faut reconnaitre les choses comme elles le sont.

Un mouvement de bras, la professeure invite l’élève à marcher quelques instants. Juste pour évoquer le but de la rencontre. « Alors Miss Naoui, expliquez-moi ». Quelques pas, le regard qui divague sur l’étendue d’eau que représente le lac. Le paysage de Poudlard est vraiment somptueux, les élèves ont-ils seulement conscience de la chance qui est la leur ? De grandir dans un environnement assez sécure, véritablement beau ? Dans un château rempli d’histoire. La brune soupire. Peut-être qu’après tout, l’être humain n’est fait pour comprendre les choses que quand elles lui échappent.

Un nouveau sourire vient fleurir les lèvres de l’enseignante, alors qu’elle confie à la jeune sorcière « Vous savez, votre démarche est surprenante, c’est la première fois qu’un élève me demande de l’aide. D’habitude c’est plutôt le contraire ». Il y a, au sein de l’école, beaucoup d’élèves qui pensent tout savoir mieux que tout le monde. Oh, la brune ne se bat plus contre eux, elle attend. Que la vie leur apprenne ce qu’ils ont à apprendre. « Je vous écoute ». Le sourire est sincère, la demande attendue. A voir si elle pourrait y répondre véritablement et être d’une véritable aide pour la jeune fille.

HRP : non t’inquiète pas c’est très bien

Une magie qui se refuse à son sorcier ? C’est possible, et de multiples raisons peuvent expliquer ça. Mais la brune ne veut pas faire de supposition, elle ne connait pas assez l’élève pour se permettre de quelconque réflexion. Pour l’instant, elle se contente d’écouter, avec bienveillance, les quelques informations que voudrait bien lui donner la jeune Alkanor. Une magie qui s’échappe, une magie personnifiée. L’enseignante aimait bien cette idée : que rien ne soit acquis, et qu’il ne s’agissait pas simplement de bouger sa baguette magique pour obtenir de quelconques sortilèges. Il y avait de la vie dedans.

Et puis une question meurt sur les lèvres de la jeune fille. Était-il possible que la magie de la sorcière faiblisse ? Qu’elle quitte ses veines pour allait voyager ailleurs ? Loin de ce qui était demandé ? Peut-être. En tout cas plus la jeune sorcière enchaînait les mots, plus la professeure semblait sentir un manque de confiance persistant qui pouvait se révéler dangereux dans l’exercice des sortilèges.

« Vous savez, il y a parfois des moments où la magie se refuse à nous pour diverses raisons ». La brune marqua une légère pause alors que les pas continuaient doucement. « Parfois, il s’agit de recouvrer une confiance en soi perdue, parfois c’est plus profond. Difficile de savoir ce qui fait que votre magie vous échappe, mais je suis certaine qu’avec un peu d’entraînement et beaucoup d’assiduité, cette dernière ne vous tournera pas le dos longtemps ».

Si elle se devait d’être honnête, l’enseignante n’était pas obligée d’inquiéter la jeune fille. Parfois, il suffisait de pas grand-chose pour débloquer ce qui posait souci. Parfois, il fallait chercher plus en profondeur, aller au plus près de ce qui posait souci. Cela pouvait réveiller d’anciennes douleurs, pouvait compromettre même un futur qu’on imaginait serein. L’heure n’était, pour l’instant, pas aux suppositions. Juste aux recherches de pistes susceptibles d’aider la jeune fille. « Sur quel sortilège sentez-vous que la magie vous abandonne ? ». Cela promettait d’être intéressant.

Difficile de cerner les difficultés de la jeune fille. Fort heureusement il n’y avait pas que les paroles qui pouvaient aider la brune, mais aussi les postures, gestuelles et mimiques que l’élève laissait passer. Un soupir par exemple, que l’enseignante prend comme une résignation. Elle sourit, encourage son élève par ce simple geste, avant d’hocher la tête et de répondre, doucement « Cela parait sans doute indiscret mais rencontrez-vous des difficultés dans votre vie en ce moment ? »

Parfois, l’esprit était tellement accaparé sur un problème qu’il lui était difficile de se concentrer sur la production d’une magie suffisamment forte, suffisamment puissante pour la réalisation d’un sortilège. Et que dire aussi des incompatibilités sorciers / baguettes. Peut-être s’agissait-il de ce genre de problème ? Au fond d’elle-même, la brune tient cette explication comme dernière au tableau. Pour la simple et bonne raison que si la baguette a choisi cette sorcière, il n’y a pas de raison que l’alchimie ne fonctionne pas.

« Vous voulez bien me montrer ? ». C’était sans doute le meilleur moyen de s’assurer qu’il ne s’agissait pas d’une défaillance de l’instrument, mais plutôt de l’humain. Et avec toute la complexité de l’esprit, elles mettraient sans doute un peu de temps à trouver d’où venait le problème : mais qu’importe, l’enseignante avait du temps et de la patience qu’elle était prête à mettre au service de l’élève. Après tout, c’était le but lorsqu’on devient professeur : aider la jeune génération à se faire à cette magie qui, parfois, se refuse à eux pour diverses raisons. Il fallait savoir actionner les bons leviers, lever les freins qui subsistaient encore. En douceur, parce que précipiter les choses ne résoudrait absolument rien.

Pas de difficulté particulière dans sa vie – ou en tout cas si difficultés il y a elle les juge pas assez importante pour occasionner quelques dommages à sa magie. Mentalement, la brune élimine cette possibilité dans l’équation. Et en ce qui concerne la démonstration … la professeure reste un peu sur sa faim. Non pas parce qu’elle ne trouve pas la composition de sa baguette intéressante, juste qu’elle n’est pas une grande amatrice de composition de baguette et qu’en tant qu’ignorante et néophyte, elle n’est pas apte à savoir à quoi correspond chaque composant. La jeune fille demande alors si elle doit faire un sort, l’ancienne auror lui sourit alors et lui répond d’un simple « En effet, je pense que je pourrais peut-être mieux cerner le problème ainsi ».

Un lot de supposition, en fait. Puisque la brune ne connaissait pas plus que cela la jeune sorcière, et qu’il faudrait sans doute plus d’un sortilège pour savoir ce qui posait souci. Mais cela permettait d’ouvrir la discussion, le dialogue. D’en connaitre davantage sans poser de questions indiscrètes ou incongrues. La brune savait mieux juger les gens dans leurs manières de lancer leurs sortilèges, de formuler les incantations, plutôt qu’en longs palabres desquels elle ne tirait rien, si ce n’est l’ennui profond.

Autour des deux silhouettes, le parc vit doucement. Le soleil inonde de ses rayons chaleureux la plaine verdoyante qui se remplit peu à peu d’élève : la sorcière constate l’arrivée de quelques sorciers qui se chamaille, de quelques oiseaux qui gazouillent, bref … de la vie qui suit son cours au sein de Poudlard.

Il y a une sorte de latence, d’attente. Comme si la jeune fille pesait le pour et le contre à la demande de l’enseignante. Cette dernière ne dit rien : il lui sera difficile d’aider l’élève si celle-ci ne lui montre pas la manière dont la magie s’échappe à elle. Alors elle attend, ne dit rien, se contentant de regarder tantôt l’élève à côté d’elle, tantôt les autres silhouettes alentours.

Finalement, la jeune fille semble saisir qu’user de sa magie sera plus simple pour montrer l’origine du problème à sa professeure. Elle choisit un sortilège simple, normalement synonyme de réussite pour une élève de dernière année. Mais il y a quelque chose. La pierre apparemment visée se soulève dans les airs, se rapproche de la jeune fille et … s’écroule avant d’être complètement arrivée à hauteur de l’élève. Les sourcils de l’enseignante s’arquent. Il y a, à son sens, de cruelles difficultés à croire en elle, elle en mettrait sa main au feu.

« Vous ne vous faites pas assez confiance ». Ça fend les airs, c’est tranchant au possible mais la brune pense également que c’est la vérité. « La magie est partout, en vous, autour de nous … Il faut simplement apprendre à la maîtriser, à la pousser. Vous devez concentrer toute votre énergie sur la volonté que vous avez pour cette pierre. Sur le fait que vous voulez qu’elle bouge. Vous devez visualiser les choses. Les anticiper. Et ne jamais douter ».

La brune reprend sa marche et arrête son petit discours. Comment pouvait-elle aider la jeune Alkanor ? L’entraînement pouvait aider, mais pour la confiance … elle n’y pouvait pas grand-chose. Peut-être que simplement, en lui montrant ce qu’elle était capable de faire alors la jeune fille reprendrait courage et confiance en elle ? Sourire pour l’élève. « Réessayez, mais concentrez-vous sur cette pierre, sur rien d’autres que cette pierre. Oubliez-moi, oubliez les autres autour, sentez votre magie, ce fluide qui vous parcourt et s’extirpe via votre baguette ».

La jeune élève ne semble pas se désespérée par son échec et c’est tant mieux. Il fallait du temps pour que la magie se fasse, il fallait l’accepter de manière pleine et entière. Elle écoute les paroles de l’enseignante et hoche la tête doucement suite à ses propos. C’est un point fort selon la professeure : une écoute attentive ne peut que servir sa cause. La brune s’est arrêtée, et concentre son regard sur la jeune fille. Ses yeux à elle sont perdus sur la pierre, jolie pierre polie par les aléas du temps.

L’incantation se fait entendre et rapidement, la pierre s’élève dans les airs et se dirigent vers la jeune fille, qui referme sa main. Elle regarde son enseignante et se laisse aller à un sourire avant de confier sa réussite, teintée toutefois d’un commentaire sur la proximité de la pierre. L’enseignante hoche la tête de droite à gauche. « Vous voyez, vous ne vous faites pas confiance ». Un sourire fleurit sur les lèvres de la jeune femme alors qu’elle continue son propos « Ce n’est pas parce que la pierre était plus proche que vous avez réussi, c’est parce que vous aviez envie de réussir, simplement ».

Il fallait que la jeune Serdaigle prenne conscience qu’elle avait des capacités à développer, qu’il fallait qu’elle découvre là où sa magie pouvait l’amener. « Parfois, il suffit d’un peu plus de concentration pour réussir. Mais je trouve que vous vous en sortez bien ». Que pouvait-elle dire de plus ? Elle l’ignorait et se remit à marcher, attendant les éventuelles questions de la jeune fille.

La jeune fille continue à marcher auprès de sa professeure, tout en posant les questions qui semblent torturer son esprit. La brune sourit, poser les questions aux bons interlocuteurs, c’était la certitude d’avoir de véritables réponses, des réponses qui aident, bien entendu, mais surtout qui permettent d’y voir plus clair dans ses propres compétences magiques. Parfois, il suffisait d’un peu d’aide, une simple main tendue, et cela se déroulait pour le mieux.

« Il faut beaucoup d’entraînement. C’est comme tout. Regardez, un enfant qui né ne sait pas marcher, c’est l’apprentissage, l’entraînement, les essais échoués comme réussis qui lui permettent de se tenir droit et d’arriver à mettre un pied devant l’autre. C’est pareil pour la magie. L’entraînement permet de venir à bout des plus grosses difficultés. Pour la concentration, il vous faut absolument vider votre esprit et vous concentrer essentiellement sur votre magie ».

La brune espère avoir répondu aux questions que se posait la jeune fille, mais elle se tenait malgré tout prête à faire face à de nouvelles interrogations. Parce que répondre aux jeunes étudiants faisaient partis de son passe-temps préféré, elle devait bien l’admettre. Cela évitait qu’ils aient accès à des informations erronées. Et puis, c’était l’avantage d’être enseignante à Poudlard. Sinon, à quoi cela servirait-il ?