La chouette envolée, le regard se fanait à sa disparition. Quelques battements de plumes la mèneraient au destinataire, ne lui offrant que quelques heures de répit pour trouver sa route. La nuit tombait encore rapidement sur la ville, le règne du soleil, que nous avons regardé s’élever ce matin, ne durerait pas. Il s’efforcerait de survivre stupidement, caressant timidement les joues des enfants sans parvenir à les réchauffer avant de s’enfuir pour laisser place à son faible écho nocturne. A ce moment Nous ressortirions. Pour l’heure, le repos nous tendait les bras depuis des heures… non, des jours ? Le temps avait filé si indistinctement que Nous n’aurions su dire pourquoi deux nuits blanches étiraient déjà les traits de l’épuisement sur le minois de notre blonde.

Son reflet croisé dans le miroir s’évader dans la douceur d’un oreiller. Elle aurait voulu qu’il vienne lui, afin de se lever contre son cœur, et oublier les dernières naissance de lunes. Elle lui aurait souri avec douceur, fait glisser ses petits doigts sur sa peau, se laissant bercer par le murmure de son souffle, écoutant la mélodie de sa voix, prétextant avec réalisme que rien n’avait eu lieu. Pas d’infirmerie occupée, pas d’évanouissement dans le couloir, pas de baguette bavarde en plein milieu de la nuit, pas d’escapade à l’hôpital en essuyant la quasi défaite d’un combat… Il lui aurait tout fait oublié, en un simple regard, en un simple baiser, nous faisant taire, bâillonnant la moindre de nos paroles. Alors, c’était avec Nous qu’elle s’était assoupit, pour ne pas Nous cloitrer, pour ne pas que Nous reprenions le bois en main sans elle….

Les rêves vides, parcours de songes morts laissaient un arrière-gout d’incomplétude, comme si les aiguilles du temps avaient juste dansée sans Nous à une vitesse inconnue. L’éveil capricieux gardait aux cils les bâillements collant à l’esprit désagréablement. Les pieds se trainaient, l’âme soupirait, de la douche au café, de l’épis aplatis au jeans enfilé, l’être semblait rester englué au monde d’un Morphée possessif quand les premières étoiles s’illuminaient enfin. La journée nous avait fui, Nous offrant la simple possibilité de nous chausser pour quitter l’appartement coloré sans un mot au possible passage de l’Amoureux. Seule la porte avait claqué, signalant le départ dans une écharpe emmitouflée. Par réflexe, la main droite avait caressé le frêne, s’assurant de sa présence, quand la gauche avait tapoté doucement le haut de la poche intérieur afin de vérifier que le bonnet de laine modifié n’avait pas encore changé de forme. Tout était là.

Une simple marche jusqu’à l’angle ombreux de l’immeuble suffisait pour nous faire disparaitre dans un craquement bruyant. Bruit de choc de poubelle, ou éclat d’ampoule de lampadaire, qu’importait ce que les voisins en pensaient, il était trop tard pour eux pour vérifier. Sous le vomissement du tourbillon étouffant, les pieds foulaient les tuiles d’une bâtisse en pleine capitale. Dessous, les premiers soulards assommaient leur sobriété. Une solution qui aurait pu convenir également, mais pas ce soir, pas maintenant. Nous attendions, surveillons l’arrivée d’un enfant, pas la nôtre, bien présente à nos côtés, mais un de ceux pour qui elle s’offusquait.

L’appart d’hiver en main, les mirettes plissées, chaque silhouette s’étirant sous les lueurs artificielles étaient scrutées. Le cœur se serrait de faux espoir, les soupirs s’étiraient, nourrissant l’impatience, et s’il ne venait pas ? . La missive ne comportait aucune griffe volontairement, à lui de savoir, de trouver, de se rappeler… Ce bar, sa requête, cette rencontre sous cet aspect, quelque part, il devait se douter que ce ne pouvait être que la suite logique… Sinon, pourquoi serait-il là, au pied de l’établissement, un peu en retrait, patientant à son tour qu’on vienne l’interpeler ?

Le sourire satisfait au creux des lèvres, la baguette sortait de la cape, redonnait forme réelle à notre masque déguiser pour Nous en grimer, capuchon posé en son sommet. Les gants faisaient virevolter le bois-ami, chuchotant un # Orchideus pour en décapiter quelques fleurs multicolores du bouquet crée. Des germinis, sans aucune signification symbolique officielle, juste l’opposé de nos traits de porcelaine. Des couleurs par dizaine que Nous faisons léviter au-dessus du garçon avant d’en lâcher le sort pour les faire tomber devant ses pieds quand personne ne passait. Ne lui restait plus qu’à lever le nez.

Quelques pétales avaient suffi à indiquer notre présence, Nous stoppions la pluie colorée au premier de ses pas, attendant à nouveau. Attendre, encore… comme si le temps n’était pas destiné à cette activité depuis que ses blessures avaient été pansé grossièrement par le Lion de notre gamine… Comme si Nous devions nous y résigner même dans ses salutations pales et ternes. Le soupir discret se heurtait au masque avant de plier aux convenances. « Bonsoir… Fanch » Un pas en sa direction, les traits lissés relevé à son attention, interstices des opales coincées dans l’ombre du capuchon, de quoi lui donner une identité qu’il n’avait pas encore croisée. « Méfiant je suppose ? » Réminiscence de souvenir de notre passage dans la cabane hurlante où la défensive et les suspicions n’avaient pu se taire qu’à excès de confiance accordée. Il en serait surement de même ce soir… Comment avions-Nous pu l’oublier ?

Sourire en coin sous l’albâtre à l’anticipation manquante. [color=grey] « Donnez- moi un instant… [blu] #Collaporta[/blur] » Coup de baguette sur le velux de secours par lequel il était arrivé. Personne ne sortirait par là pour le moment. Le bras gauche relevé vers les astres de nuit, la manche de la cape tombait et dévoilait la chair pale que nous lui tendions. « Regardez donc. #Revelio. Rassuré ? » Le bois avait relevé la marque pas si vieille courant entre les veines, prouvant notre légitimité. L’échange pouvait commencer, fanant ainsi les interrogations sur notre identité. Le tissu reprenait place, la baguette également. Par quoi commencer ?

La tête s’inclinait doucement sur le côté, l’observant un instant. Lui l’adolescent qui n’hésitait pas à se mettre en danger pour l’Ordre, n’attendant même pas de reconnaissance, avançant aveuglément vers un but, devenant instrument politisé de son propre gré. Quelque part, cette dévotion était dure à comprendre, et même sans le serment courant entre lui et notre enfant, Nous nous sentions concernées par sa loyauté. Pas car il pouvait trahir l’Enfant ou nous-même, mais car son dévouement semblait trop « impliqué ». Il agissait en se moquant de ce qui pouvait lui arriver, ridule façon de faire. [color=grey] « Vous devriez faire plus attention à vous. Un partisan mort ne nous serait d’aucune utilité… » Vérité simple énoncée presque sur un ton de reproche. « Vous n’êtes pas seul au château, il serait intelligent de ne pas l’oublier » Pas de déguisement de réprimande, nul besoin, pas sous nos apparats. Rappel simple qu’il avait apparemment oublié, comme le détail de la mission qui l’avait poussé à se blesser lui-même. Chose qu’il ignorait également, alors autant abréger ce sujet précis. « Comment vous portez vous désormais ? » Seuls 2 jours s’étaient écoulés. Comment cela aurait-il pu être suffisant?

Le genou se pliait, les mèches brunes tombaient devant son visage, le sourcil se rehaussait de notre côté ne nous attendions pas à ce genre de réaction de sa part. Malaisance de l’instant, porter ce masque ne Nous avait jamais donné l’impression d’être supérieure à qui que ce soit. Avoir la marque sur le bras n’avait pas nourrit en Nous un sentiment de supériorité, Nous n’avions pas adopté l’image du mage noir qui se voulait puissant et effrayant. Ce sentiment ne nous intéressait pas vraiment. Machinalement Nous avions détourné le minois sur le côté en soupirant doucement. « Relève-toi » Fuite du vouvoiement involontaire, distanciation protocolaire abandonnée pour quelques secondes, du temps qu’il  Nous rappelle que sous ses traits, Nous n’étions qu’inconnu à qui il se pliait.

Alors l’acquiescement d’un mouvement de capuchon embrassait ses excuses et ses efforts de discrétion louables. Nous ne relevions pas que sa méfiance viscérale lui avait fait croire à un houspillèrent de notre part et non à un simple rappel qui lui disait qu’il n’était pas seul au château. L’idée même qu’il ne puisse être traité comme un simple soldat ne semblait pas lui effleurer l’esprit. Impression détestable d’être un simple commanditaire à ses yeux. Mais dans un sens, c’était peut-être plus simple ainsi. Avoir plusieurs rôles, plusieurs approches et plusieurs visions de la même situation pouvait s’avérer pratique dans un sens. D’ailleurs, à l’instant Nous connaissions l’état de ses blessures qu’il jugeait superficielles. Il était solide, mais pas remis, nous le savions. Néanmoins moins, nous nous contenterions de sa réponse « Bien »

Ne pas s’éterniser sur le sujet, ce n’aurait aucun sens sous ces traits lissés, juste lui assuré qu’on savait ce qui avait été fait et que son courage ou sa folie étaient apprécié. « Vous nous êtes plus utile entier qu’éclopé, ne l’oubliez pas. Ne négligez pas vos soins. Nous vous rappellerons quand vous serez entièrement sur pied. » Promesse qu’il ne serait pas oublié, que ses actions et sa dévotion étaient visibles. Sa fougue et son ingéniosité étaient forcément un atout non négligeable, rien d’étonnant à ce que d’autres masqués l’aient remarqué. Néanmoins, sa capacité à se moquer royalement de ce qui pouvait lui arriver n’était pas à mettre en toute les mains selon Nous. Il n’était pas qu’un numéro de plus, un partisan à sacrifier pour le bien de la Cause. Pas pour Nous. Nous demanderons à garder avec nous. Pour limiter les dégâts, pour être là si nécessaire...

Le nez se levait vers le ciel, les mains dans les poches, les mirettes contemplaient les astres de nuit quelques secondes sans en faire aucune allusion capable de nous trahir. « En attendant, continuez à vous faire discret. C’est très bien ainsi. » Le bois se tournait rapidement vers la seule sortie possible à pied, débloquant l’accès pour le libérer. « Prenez un peu de bon temps maintenant. Ne vous inquietez pas, Nous nous reverrons. »[/color] Trop de serieux depuis cette histoire de flèches, il se devait de décompresser un peu même s’ il n’avait plus de souvenir de tout ce qu’il avait mis en place. Sans rien rajouter de plus, lui abandonnant cette simple consigne, Nous laissions l’écho d’un transplanage au jeune homme abandonné sur le toit. Pour l’heure, c’était assez, Nous avions juste voulu lui faire connaitre notre existence, et lui rappeler que le repos était obligatoire s’il voulait continuer