Chaque personne a son contraire [Terminé]

Saison XXXI - Printemps

Il y avait toujours, souvent, cette impression que les journées se ressemblaient, en particulier lors des périodes scolaires. Si Soleya n’avait jamais vraiment détesté l’école, elle n’en restait pas moins envieuse de ceux qui se trouvaient là, dehors, diplôme en poche. L’avenir était incertain, un équilibre difficile à trouver, fragile, mais la sensation de vivre une nouvelle vie, avoir plus de liberté, moins d’interdits, était quelque chose qui l’attirait de plus en plus. La jeune femme n’avait jamais vraiment vécu seule. Toujours bien entourée, elle appréhendait cependant la vraie vie où elle serait livrée à elle-même. Trop jeune pour éviter les pièges, trop vieille pour qu’on lui tienne la main. L’entre-deux qui faisait qu’elle avait peur de se perdre. C’était une angoisse qui apparaissait de temps à autre lorsqu’elle prenait du temps pour elle. D’une nature plutôt optimiste, elle avait tendance à camoufler ses doutes. La plupart la concernaient elle-même, dévoilant sous son sourire un manque de confiance certain. En sixième année, elle n’avait aucune idée du chemin qu’elle prendrait ensuite. Si l’Astronomie restait sa passion, elle ignorait s’il était sage de faire de son hobby favori, son métier.

Elle secoue la tête pour supprimer ses pensées désagréables. Assise sur un banc en plein milieu du parc de Poudlard, la Serdaigle s’était perdue durant la lecture d’un livre inintéressant sur la Botanique qu’elle avait emprunté à la bibliothèque. Elle essayait de comprendre et de rattraper son léger retard dans cette matière qu’elle n’appréciait pas. Cependant, en ce début de week-end, elle n’avait pas vraiment envie de se perdre dans l’apprentissage des noms de plantes, de leurs dangerosités et les vertus curatives ou non qu’elles pouvaient avoir blablabla. Barbant. Elle referme le livre d’un coup sec pour le poser à côté d’elle pour profiter enfin des couleurs qui s’offraient à elle. Si la chaleur n’était pas encore là, le beau temps s’était invité en Écosse pour le plus grand plaisir de ceux qui ne travaillaient pas le week-end – elle, en somme. Les yeux fermés, la tête levée vers le ciel, Soleya profite de cet instant en solitaire pour reposer un cerveau qui avait été en activité toute la semaine, regrettant un peu de ne pas avoir choisi un coin plus éloigné du bruit, des cris hystériques et divers sons qu'elle ne cherchait pas à déterminer. Si la Brune était loin d’être de ceux qui refusaient la compagnie, elle n'en restait pas moins humaine et parfois, les moments seule étaient nécessaires.

C'est drôle le printemps. C'est une belle période où on sort un peu de son cocon, on sort de ses réflexions et on recommence à s'amuser avant de s’éclater en été. Certes, il fait encore un peu froid mais le soleil du printemps, je l'ai toujours trouvé parfait. C'est une sorte de petite lumière, qui patauge entre le glacé et le chaud. Je trouve on est bien, ça me fait sourire.

Je m'étire, glisse mes mains dans les poches et je me balade. Ici, je devrais être tranquille. Il y a quelques têtes certes, mais pas que je connaisse vraiment. J'ai envie d'aborder quelqu'un, lui parler, faire une nouvelle rencontre. L'embêter. Parce que marcher ça fait du bien cinq minutes, mais en fait, ça m'ennuie vite. Après, je me mets à trop penser, je pense à des trucs un peu bizarre, un peu angoissant. C'est pas un truc qui me plaît. Je préfère vivre pleinement, rire, me moquer, apprendre des trucs, du moment que c'est pas de la botanique bien évidemment. Pas la faute de Cara, enfin si un peu. C'est toujours de la faute de Lanxorre toute manière. Prof pourrie.

Mordillant ma lèvre inférieure, j'aperçois une fille, de dos, sur un banc. Je penche la tête. Elle a l'air jolie non ? Qu'est-ce qu'elle fait ? On dirait qu'elle étudie. Studieuse ? Pas vraiment en fait, vu comment elle referme son bouquin. Après je suis là depuis que quelques secondes, et elle depuis des heures peut-être. Ou alors c'est moi qui travaille pas assez en fait. Boarf, ça m'étonnerait pas. Je fais l'essentiel dans les matières que j'aime pas, et un peu plus dans des matières que j'aime bien. C'est amusant, parce que je suis une serpentarde sans but, mais avec une grande ambition dans la vie. Mais je sais pas laquelle. Je sais juste que je veux, un jour, être reconnue pour un truc incroyable. Je cherche encore malheureusement, parce que y a peu de choses qui me font plaisir. Pas trop de passion, c'est dommage, mais un jour je trouverai, promis.

J'avance lentement, je pose mes mains sur le dossier du banc, juste à ses côtés. Bah alors ? Il est si nul que ça ce livre ? Je regarde son visage, elle a les yeux fermés. J'espère j'ai parlé assez fort pour la réveiller. Sinon je fais quoi ? Je la secoue ? Peut-être elle est morte d'ennui ? Vous pensez que c'est possible ? Non, bien sûre que non. Dans tous les cas, je vais pas la lâcher. Elle m'intrigue un peu, pour l'instant. S'il faut, dès qu'elle va ouvrir la bouche, je vais la détester. Mais j'adore détester les gens vous savez.

Bah la voilà ma passion ! Détester les gens !

Elle était partie loin, très loin. Si la position dans laquelle elle se trouvait l’empêchait de plonger dans l’inconscient, il était certain que les yeux fatigués lui envoyaient des images abracadabrantes. Le brouhaha lointain, celui du vent qui soufflait faisant siffler les arbres de la forêt. C’était assez perturbant d’ailleurs, dérangeant, car ça lui faisait étrangement penser à des histoires effrayantes qu’elle et ses amis s’amusaient à se raconter les soirs d’Halloween. Se faire peur pour fêter les morts, jusqu’à ce que tout cela devienne réalité. Dans le monde des sorciers, ils étaient sûrs de l’existence des fantômes, serait-il vraiment étonnant de découvrir d'autres choses ? Des choses appelées surnaturelles par les moldus ? Toujours était-il que Soleya était loin de la réalité sans pour autant être plongée dans un rêve. C’était la transition, ce moment qui faisait sursauter lorsque l’on était brusquement dérangé.
Comme ici.

C’est un brusque soupire de surprise qui précède l’ouverture de ses yeux noirs. La vision d’une rouquine qui semblait avoir fait tout ce chemin juste pour lui demander l'intérêt elle portait à son livre. Un joli visage inconnu, à l’envers et une nuque engourdie qui commençait sérieusement à être douloureuse. Soleya relève doucement la tête non sans une grimace qui lui rappelle la mauvaise idée de somnoler la tête en arrière. Elle avait de la chance de ne pas s’être retrouvée la bouche grande ouverte à ronfler bruyamment. Cela aurait été un moment extrêmement gênant. La botanique et moi on n’est pas vraiment compatibles. C’était peu de le dire, mais autant rester sur des litotes pour le moment. L’irlandaise retrouve une position décente et réveillée – genoux repliés contre la poitrine quand même. Ainsi, si celle qui était venue la déranger éprouvait le désir de la rejoindre, elle avait la place nécessaire. Quant au livre ? Il était peut-être tombé ou il était peut-être toujours là, mais prêt à tomber.

En réalité, Soleya n’avait pas vraiment envie de converser sur un bouquin qu’elle n’appréciait pas, qui plus est avec une inconnue curieuse ou qui souhaitait simplement tuer son ennui quelque part, peu importe avec qui. La qualité de la Serdaigle – ou le gros défaut – était qu’elle n’était pas le genre à repousser, elle acceptait la conversation et ensuite avisait sur le déroulement de la suite. Les bras s’étirent pour effacer les dernières traces de douleurs. Tu as rêvé de moi toi aussi ? Trop tôt ? Peut-être. Mais la dernière inconnue qui était venue lui parler ainsi, sans raison, lui avait simplement avoué qu’elle avait rêvé d’elle. Si les conversations commençaient de façon si étrange, pourquoi elle devrait se l’interdit ?

Je ne la déteste pas. Sa voix m'est plutôt agréable même. Elle est délicate, ou alors c'est moi qui m'imagine ça. Je la trouve belle. C'est étrange que je trouve quelqu'un de beau en dehors de moi-même. Les gens ont tous quelque chose de beau en eux, mais qu'ils le soient tout entiers, c'est rare. Elle est rare je crois, cette fille. Alors elle m'intrigue vraiment. C'est comme si elle était un astre silencieux et qu'elle parlait avec son regard. Je pourrais presque en tomber amoureuse.

Je m'installe à ses côtés, balançant le livre je ne sais où. On le retrouvera plus tard, promis, si on y pense. Mais je suis certaine que je penserais à autre chose à ce moment-là. Je ne sais pas pourquoi, c'est comme si c'était une fatalité cette rencontre. Je n'y crois pas pourtant, mais elle, elle vient d'un monde qui n'est pas le mien. Elle vient du destin. J'aime les traits de son visage. Ils sont si calmes. On dirait le portrait craché de l'inverse de moi-même. C'est inconnu, ça m’envoûte, ça ne veut rien dire de bon. Je le sais bien. De Lanxorre ne m'attire pas non plus. C'est une vieille peau, sa matière m'ennuie. Un sourire plus que charmant sur les lèvres. Je la regarde et ses mots me frappent. C'est comme un coup de poing en plein ventre. Qu'est-ce qu'elle vient de dire ? C'est comme si le monde s'était arrêté de tourner. Pourquoi elle dit des trucs comme ça ? Elle est insensée. Pourquoi je devrais rêver de toi ? Je préfère te rencontrer dans la réalité. Les rêves, les faux espoirs, je n'en ai pas besoin. Je suis là pour réaliser l'impossible. Rêver de l'insaisissable, ça ne m’intéresse pas. Je veux les toucher les étoiles, faire partie d'elles. Briller autant qu'elles, même si, dans le fond, elles sont déjà mortes, comme la plupart des rêves des gens.

J'aime tes lèvres.

C'est tout. C'est tout ce que j'avais à lui dire. Plus je la regarde, plus je me dis que ses lèvres sont belles. Je ne veux pas l'embrasser, je veux juste l'observer, la contempler, comme un paysage. C'est étrange, c'est obsessionnel, c'est du moi. Probablement qu'elle va partir en courant, me traiter de folle comme la plupart des gens. Ou alors elle va succomber à mon charme, j'en sais rien. Je ne connais pas l'avenir, je ne veux même pas en entendre parler. Je veux juste vivre le moment présent. Je m'avance vers elle. Elles ont la couleur des espoirs du monde, je les trouve belles. Un léger rire me parcourt et je recule. Je pose mon coude sur le dossier du banc. Je suis certaine qu'on est liée d'une manière ou d'une autre. Il n'y a aucun moyen que ça en soit autrement. Je suis Angela et toi ? Qui es-tu frénétique fantasme ?

Le livre s’envole comme une petite chose insignifiante, tout comme la matière qu’il représentait. D’abord surpris, le regard de Soleya prend finalement un air rieur, léger, ravi de rencontrer une personne qui ne cherchait pas à se poser trop de questions. Quelqu’un de spontané qui avait simplement débarqué ici et qui cherchait, peut-être involontairement, à faire oublier à la Serdaigle les choses barbantes auxquelles on pouvait penser ici, la Botanique par exemple, qu’elle ne semblait pas porter dans son cœur non plus, tout comme la personne qui l’enseignait d’ailleurs. Mais Soleya sourit simplement, peut-être légèrement hypnotisée par celui qu’elle lui offrait, elle. Un sourire parfait qui dégageait un charme qui aurait lui faire oublier la gravité. Elle aurait pu léviter, comme ça, sans aucune raison juste ensorcelée par un simple sourire. Une magie différente de celle qu’elle connaissait.

Les joues de la Serdaigle commencent à rougir peut-être légèrement honteuse par les paroles qui étaient sorties sans qu’elle ne puisse vraiment y réfléchir. Mais après l’arrivée mouvementée de Winniemae, une autre inconnue qui débarque sans raison aurait pu être un pur hasard, ou le destin. Parce qu’il était évident que la fille présente actuellement à ses côtés lui faisait un effet plus fort, moins soucieux, loin des interrogations et de l’agitation de l’autre Serpentard. Non c’est juste que, elle rit légèrement, une fille que je ne connais pas est venue vers moi il y a quelques jours l’air complètement apeuré parce qu’elle avait rêvé de moi. L’Irlandaise secoue légèrement la tête, les paroles s’emmêlent, la réalité est bien mieux.

Instinctivement, les lèvres se pincent, s’agitent, brûlent presque en entendant les compliments et ses yeux se baissent automatiquement sur les siennes qui étaient aussi parfaites, tout comme le reste de son visage d’ailleurs. Une symétrie presque parfaite que font rosir mes joues légèrement, sans que je m’en rende compte pour autant. Ce n’était pas la première fois qu’elle ressentait ce genre de choses, peut-être moins forts les fois précédentes, mais elle était presque sûre d’une chose désormais : il n’y avait que les filles qui provoquaient cela. Aucun garçon n’avait encore eu un tel effet sur elle. Et puis, les filles avaient tout de même beaucoup plus d’atouts. Les tiennes sont parfaites. Elles sont parfaitement dessinées. Si l'irlandaise n'avait pas un minimum de retenue, elle aurait peut-être tendu la main pour les effleurer du bout des doigts, mais ce n’était pas vraiment une chose qui se faisait lors d’une toute première rencontre. Les yeux retournent dans les siens en même temps que les paroles la ramènent sur la terre ferme, moi c’est Soleya, devait-elle préciser autre chose ? Son nom de famille ? Sa maison ? Est-ce que cela importait réellement ? Son prénom faisait penser au soleil, le sien aux anges, ils se rejoignaient d’une manière ou d’une autre, était-ce un simple hasard ? Le hasard fait bien les choses, une pensée peut-être un peu trop bruyante puisqu’elle avait été prononcée à voix haute, malgré elle. Tu portes très bien ton prénom. Cligner des yeux pour ne pas laisser parler le regard. Soleya était déstabilisée par cette jeune femme, il n’y avait absolument aucun doute là-dessus.

Les tiennes sont parfaites. La perfection, la beauté ultime. J'aime quand les gens me le disent, j'aime être au centre de leur cœur et de leur raison. Cette fille me plait, est-ce qu'au fur et à mesure, je pourrais la maintenir dans mes filets ? J'étais comme une araignée qui tissait sa toile autour de son corps. J'avais envie de l'avoir pour moi seule, juste pour moi.

Le soleil de mes journées et l'ange de tes nuits, c'est ça ? Un léger rire, car c'est si cliché. C'était comme si j'avais sortie la pire phrase au monde, un bon gros beauf. Et pourtant, d'une certaine manière, cette phrase, n'était-elle pas ce qui nous définissaient ? Toi, aussi aussi tu le portes bien. Un sourire fin. C'est drôle, quand je la regarde j'ai l'impression d'oublier un peu plus le reste. Je suis la perfection comme Ben... Bien que, parfois, la perfection n'a pas forcément que du bon. Il y a des jours où je me demande, ceux qui m'attirent : Est-ce qu'il m'aime vraiment ? Si je n'étais pas à moitié ça, est-ce qu'il m'aimerait pour ce que je suis ?

Mais oui, bien évidemment que oui. Qui n'aime pas un Adams ? Mon père n'est pas comme moi et pourtant tout le monde l'adore, il est parfait et très beau. Donc je ne vois pas pourquoi ça changerait pour moi. Les chiens ne font pas des chats, n'est-ce pas ? Je suis parfaite et personne n'a le droit de dire le contraire, personne.
Je m'approche lentement, ne voulant pas lui faire peur. Mon index glisse sous son menton sans prévenir. J'aime affronter le regard des gens. Dans le sien, j'y vois une nuit au bord d'un lac, avec pour seules lumières la pleine lune et les lucioles. En fait, non... Elle est comme cet arbre aux feuilles rouges, au sommet de la montagne, luisant d'une douce lueur orangée. Et j'ai envie d'escalader et de gravir son cœur. Je vois tellement de choses dans ton regard, je pourrais en composer une musique avec mon violon.

Lentement, prise d'un doute, je recule. Qu'est-ce que je disais ? Qu'est-ce que je faisais ? Est-ce que mon aura était en train de fonctionner ? Pourquoi, je n'ai pas spécialement envie de l'utiliser avec elle ? C'est drôle, cette idée de me dire que parfois, les gens m'aiment seulement parce que d'une certaine manière ils en sont obligés. Un don, tu parles. Ouais, ça avait ses avantages mais c'était plus une malédiction qu'autre chose pour moi. Je ne savais jamais si ma perfection était innée ou si elle venait de là.

Tu peux me raconter une histoire ? J'adore écouter des histoires et ta voix est si mélodieuse. Laisse-moi plonger dans ton regard, dans ta vie. Laisse-moi planer au milieu de ces nuages avec toi. C'était appétissant et si dangereux. J'avais l'impression d'être Icare. Si je m'approchais trop du soleil, est-ce que mes ailes aillaient brûler ? Être désillusionnée, probablement, je ne sais pas réellement ce que l'amour signifie. Je ne saurais jamais ce qui est vrai et faux. La haine est bien plus facile à comprendre, parce que je sais qu'elle sera toujours véritable et brutale. Ce sentiment là m'amuse bien aussi , car les gens sont si confus après. Seule l'indifférence est mon pire ennemi. Parce qu'il me rends transparente. Et ça, ça me va mal... Moi j'aime être colorée. Comme la plus belle des peintures, la plus belle des robes rouges au milieu du bal en noir et blanc. J'aime être ce que les gens ne s'attendent jamais à voir : l'impensable.

Soleya avait ri également, il se mêlé au sien. Mais derrière cette phrase tout droit sortie d’un roman à l’eau de rose, il y avait une part de vérité, une chose que Soleya avait remarqué au moment-même où Angela était arrivée sur ce banc : elles étaient à la fois opposées l’une à l’autre et pourtant la Serdaigle avait l’étrange impression que derrière tout cela, elles étaient également complémentaires. Comment ? Elle le saurait peut-être plus tard, au fil de la discussion ou dans quelques jours, semaines, lorsque leurs chemins se croiseraient de nouveau.
Son corps se fige, Son cœur tambourine contre sa poitrine, elle n’ose même plus cligner des yeux. Une proximité soudaine et un rapprochement qui met son corps dans tous ses états. Elle espère intérieurement que la Belle ne remarquera pas sa respiration qui s’était soudainement accélérée et la sensation que ses sens s’étaient décuplés lorsqu’elle avait posé son doigt sous son menton. Soleya l’observe sans rien dire, se perd dans son regard qui semble tenter de lire dans le sien. Que cherchait-elle exactement ? Est-ce qu’elle aussi, elle ressentait toutes ces petits pétillements chatouilleux jusqu’au bout de ses doigts ? La Brune se retient de replacer une mèche de ses cheveux, ne sachant pas si ce serait le geste qui la ferait reculer. Et elle était musicienne en plus, la femme parfaite.

Elle cligne des yeux immédiatement après qu'Angela se soit reculée. Comme la sensation d’avoir été complètement hypnotisée par ce regard envoûtant, ce parfum enivrant. L'irlandaise ne la connaissait pas et pourtant, elle ne pouvait nier qu’il se passait quelque chose à l’intérieur. Sans réellement savoir ce dont il s’agissait exactement. Que veux-tu que je te raconte ? Sa vie, celle d’un autre ou celle d’un personnage fictif ? Voulant en savoir plus sur elle, la jeune femme se lance dans une présentation plus détaillée. Après tout, ne voulait-elle pas principalement écouter le son de sa voix ? J’ai grandi en Irlande dans une petite ville à côté de Limerick mon père vient d’Irlande, mais ma mère est née en Inde, un pays que je n’ai malheureusement encore jamais visité. Elle réfléchit quelques instants, ne voulant pas trop s'étaler au risque de vite devenir ennuyeuse. Comme tu as pu le voir j’ai un profond mépris envers la botanique, un léger rire, j’suis plutôt branchée Astronomie. Les étoiles, la nuit et tout le reste, c’était une matière où elle excellait presque. Elle hausse les épaules, ne sachant plus vraiment si elle devait poursuivre où s’arrêter là. Alors elle prend un instant pour l’observer encore un peu, et toi, qui es-tu, Angela ? C’était presque un souffle, un prénom prononcé d’une manière mélodieuse. Il sonnait tellement juste à ses oreilles. J’aimerais t’entendre jouer du violon.

Que veux-tu que je te raconte ?

Tout. Je veux tout savoir. Sur toi, sur ton passé, sur le monde que tu imagines et celui que tu voudrais peindre. Je veux que tu me racontes un conte de fées, que tu me fasses voler là où même les autres Anges n'ont jamais eu accès. J'ai envie d'être cet être spécial qui te fait chavirer à chaque battement de cils, à chaque soupire, et j'aimerai que tu sois aussi celle qui me fasse basculer de l'autre côté de l'horizon.

Take on me

J'aime l'Irlande, c'est mon pays préféré. Je caresse doucement sa joue. Moi non plus, je n'ai jamais visité l'Inde. Un jour, on ira découvrir le monde ensemble. J'en suis certaine. Il y a peu de chose dont je peux être certaine pour le futur, mais là, maintenant, je sais qu'elle en fera partie. Je veux lui faire voir les plus beaux lacs, les plus beaux couchers de soleil. Parce que son seul sourire en vaut le coup. Elle n'est peut-être pas une Adams, mais elle se rapproche tellement de notre perfection que j'ai l'impression qu'elle est en fait une partie de moi. Est-ce que je m'écroulerai si elle partait ? Non. Je vais trop vite. Mon cœur bat trop vite. Est-ce que je me contrôle ? Je ne veux pas qu'elle m'aime à cause de ça... Je veux. Je sais pas ce que je veux. Je sais juste que ça cogne dans ma poitrine et que ça devrait pas. C'est comme si j'étais avec Ben, mais en bien mieux. Il y avait ce côté apaisant. Est-ce que c'est ça le coup de foudre ?

Take me on

Je suis née en Angleterre, je suis passionnée par le violon et les chiffres. Et ma mère est Vélane. C'était quelque chose qui restait coincé dans ma gorge. Et je veux juste refaire le monde avec mes couleurs, parce que je le trouve morne et gris contrairement aux étoiles. Je ne suis pas très forte en Astronomie, mais elle pourrait m'apprendre. J'ai toujours aimé apprendre quand j'ai de bons professeurs. Vous savez pourquoi ? Parce que les bons professeurs sont des passionnés, et moi je vis pour la passion.

I'll be gone

Plus je la regarde, plus je me dis que j'ai de la chance d'être passée par ici. J'aurais pu louper la plus belle rencontre de ma vie. Je n'ai pas mon violon sur moi, mais je peux te changer une chanson. Et on peut danser ? Un léger rire. Promis, la prochaine fois je te jouerai un morceau. Je me lève, tourne et lui tend ma main. Veux-tu partager cette vie avec moi, le temps d'un instant Soleya ? J'aimerais toucher le soleil, temps que la nuit n'est pas encore arrivée. Temps que l'Ange n'a pas encore brûlé ses ailes. Laisse-moi te transporter dans mon monde, dans cet univers intouchable que j'aime bâtir pour voir la pluie et le soleil créer les arcs-en-ciel. Laisse-moi être la folie elle-même, juste une fois.

In a day or two

Traduction:

Les ressentis commençaient à s’emmêler entre admiration et légère méfiance. Le cœur comme emberlificoté et Soleya incapable de refouler ce qu’il se passait dans sa tête. Mais il y avait cette sensation mêlée au souvenir du philtre d’amour qui restait accroché à elle malgré tout. La fausse bienveillance de sa camarade pourrait être similaire aux paroles d’Angela aujourd’hui. Et s’il s’agissait encore d’un coup monté ? Elle cligne des yeux pour supprimer cette pensée, loin de l’envie de s'imaginer que tout Poudlard en avait contre elle. La paranoïa n’avait jamais fait partie de ses traits de caractères même. Mais malheureusement, parfois, une seule petite chose pouvait tout faire balancer. Et l’humiliation était un sentiment nouveau et la sensation avait été l’une des pires ressenties.

Pourtant, c’est avec un grand sourire et les pensées dissipées dans un nuage de fumée, que la jeune femme se laisse guider par la douce main d’Angela. Un contact qui provoque des picotements dans mes bras et dans le ventre, tandis que je ne parvenais pas à détourner mon regard d’elle. Pensant à quel point ce serait agréable de partir loin avec elle, en Inde, pourquoi pas ? Cette manière de parler était poétique, à tel point qu’il lui faut jeter un regard à droite et à gauche pour se rendre compte qu’elles étaient toujours dans le parc de Poudlard. L’Irlandaise se rapproche un peu plus jusqu’à ce que les lèvres frôlent l’oreille de l’Autre, un murmure, je veux t’entendre chanter. Puis elle relève la tête pour affronter de nouveau son regard, l’attendre.

Soleya ne voulait qu’une seule chose : que cet instant dure encore et encore pour ne pas la laisser partir. La sensation que si elle l’abandonnait maintenant, il n’y aurait aucune chance qu’elle la retrouve. Peut-être que c’était ça au final, peut-être qu’Angela n’était qu’un leurre, le fruit d’une imagination débordante, sa propre représentation de la femme parfaite. Mais même si la Serdaigle se perdait parfois dans ses pensées, elle était incapable de rendre réelle une chose pareille. À cet instant, des paroles lui reviennent en tête : Angela lui avait parlé d’une prochaine fois. Tout en conservant cette proximité, tu es d’accord pour qu’on se revoit à nouveau ? Elle avait l’impression de ne rien dire de sensé, que tout était un simple mélange de mots sans réel signification. C’était la première fois qu’une telle sensation s’emparait d’elle. C’était à la fois agréable et terrifiant. Était-il possible de devenir dépendante d’une personne ? Sans sortilèges, sans potions ? Promets-moi que tu n'as rien mis dans mon verre ou dans quelconque truc que j'aurais pu manger. Cette phrase tournait et retournait dans sa tête depuis plusieurs minutes. Il fallait qu'elle s'assure qu'il n'y avait pas de piège derrière tout cela. Afin de justifier cette question, c'est silencieusement que Soleya plonge la main dans sa poche à la recherche de ce papier qu'elle aurait pourtant dû jeter. Ce mot de celle qui l'avait manipulée qu'elle tend à Angela. Il était écrit :
Cupidon a frappé et il semble que tu n'as pas eu de chance. J'espère que redescendre sur terre n'est pas trop douloureux, ah l'amour que d'émotions ! C'était mon premier philtre d'amour, je ne le pensais pas aussi puissant. Peut-être d'ailleurs aurais-tu une idée de pourquoi il l'était ?
Je suis sûre que oui.
Pour certaines personnes cela n'aurait pas eu une grande importance, mais pour une adolescente qui se cherchait encore, c'était un sentiment de honte qui ne la lâchait pas.

C'était comme si soudainement, le ciel s'était recouvert et qu'une pluie torrentielle venait de s'abattre sur moi. Je ne comprenais pas trop, ça faisait légèrement mal. Pourquoi j'avais mal à mon cœur comme ça ? C'était pénible. Ouais, on se reverra... Mon timbre de voix était bien trop sec et je sais bien que mon aura de Vélane venait de disparaître. Je ne sais pas trop ce qui se passe en moi, mais... Je ne suis pas en colère ou contrariée. Juste, j'ai mal, parce que ses autres mots m'ont touchés. C'était comme si je venais de me prendre une claque en pleine tronche.

Promets-moi que tu n'as rien mis dans mon verre ou dans un quelconque truc que j'aurais pu manger.

Elle avait brisé ma magie en une fraction de seconde. Parce que je savais ce que ça voulait dire, je comprenais à demi-mot qu'elle avait peur que je la manipule en ayant fait un truc. Sauf que j'avais effectivement fait un truc. Et, et en fait si. J'étais contrariée. J'avais l'impression que ma magie picotait, jusqu'au bout de mes doigts. Elle était légèrement turbulente. Il fallait que je me contrôle. Elle ne devait pas me voir comme ça, elle ne devait pas me regarder. Personne n'avait le droit de me voir comme ça. Personne. Je m'éloigne, lui tourne le dos. Je regarde au loin, je ne veux pas qu'elle voit mon visage. Je mets rien dans les verres des gens. J'en ai pas besoin. J'en ai jamais eu besoin, j'en aurai jamais besoin. Mais j'aurai préféré, peut-être.

C'était un bel après-midi, une rencontre incroyable. Elle avait été mon soleil l'espace d'un instant et moi son ange. J'avais apprécié ça, plus que n'importe quoi dans ma vie. Et je devrais être heureuse qu'elle veuille recommencer. Mais, mais il y avait ce truc qui m'empêchait d'être complètement contente. Est-ce qu'elle avait apprécié ma compagnie ? Est-ce qu'elle l'avait vraiment apprécié ou... l'avait-elle appréciait par la nature de ma biologie ? J'en ai pas besoin parce que ma mère est une vélane. Alors c'est dans mes gênes d'attirer les gens. C'était douloureux de l'avouer. J'étais la perfection ? J'aimais juste me dire ça, mais quand je me regardais, je savais que ce n'était qu'une fichue illusion. Les gens ne m'aimaient pas pour ce que j'étais vraiment. Ils m'aimaient une fraction de seconde, juste parce qu'elle m'avait transmis de beaux gènes.

Alors oui, ça m'amusait et j'en profitais avec certaines personnes. Mais c'était comme danser au milieu des hypocrites. Hormis Ben, est-ce que quelqu'un m'appréciait vraiment ? J'en savais rien. Probablement qu'au final, je ne le saurai jamais, parce que ce sera toujours comme ça. Faire tourner des têtes oui, mais les sentiments éprouvés n'étaient que fictifs. Est-ce qu'une fois que je serais partie, elle aussi, elle allait subitement cesser de penser à moi ? Comme tous les autres. Je savais qu'à mon âge, je pouvais séduire sur le moment certaines personnes, mais pas sur long terme. Je veux pas te manipuler. Je veux pas que tes sentiments soient faux. J'en veux pas, j'en ai déjà assez des gens comme ça. Alors si jamais tu penses encore à moi. Plus tard. Sans m'avoir vu pendant un temps... Je sais pas. Peut-être que c'était un vrai moment, pas factice. Poing serré. Ouais on se reverra, Soleya. C'était comme si ça m'arrachait la bouche de dire ça. Il fallait que je parte. Et c'est ce que je fis, sans même un regard. Parce que sinon, elle verrait ce visage qui s'était peut-être enlaidi. Et je sentais une boule dans ma gorge gonfler, un cri prêt à exploser. Une rancœur inexpliquée envers moi-même, envers ma mère, envers elle, alors qu'elle n'avait rien fait. Fallait que je me tire, que je me calme. Que je respire à nouveau.

Pourquoi j'arrivais jamais à me contrôler hein ? On dit que les gènes d'une vélane sont divins... Moi je les vois juste comme une malédiction. Je voulais être aimée c'est vrai.
Mais je voulais de la sincérité, pas une illusion.
Je voulais être vraiment aimée.

Départ d'Angela

En l’espace d’un instant, tout avait changé. L’ambiance était devenue glaciale, comme si un nuage s’était subitement dressé au-dessus d’elles, les empêchant de profiter de la lumière et de la chaleur du soleil. Immédiatement, Soleya avait regretté ses paroles, se rendant compte qu’elles n’étaient pas très appropriées, trop prématurées. Un nouveau signe de son éternel maladresse, mais cela avait été comme une évidence pour elle : prévenir qu’elle ne comptait plus se laisser manipuler comme elle l’avait été auparavant. Seulement, elle était de nouveau tombée sur la mauvaise personne. Fille de Vélane avait-elle dit ? Avait-elle donc décidé de faire d’elle la énième personne de sa liste qui tomberait sous son charme ? Ce sentiment n’avait rien de bon pour ce cœur qui venait littéralement de s’émietter. Elle avait envie de faire face à Angela, de la regarder à nouveau, de savoir exactement à qui elle avait affaire.

Mais Soleya avait décidé de ne pas insister davantage. Elle n’ouvrit même pas la bouche pour répliquer, rétorquer, tout simplement parce qu’elle-même était perdue dans tout cela. Elle voulait qu’Angela reste, qu’elle continue de lui parler, mais n’était-ce pas là le principe même de sa magie à elle ? Rendre les gens dépendant le temps d’un court instant ? Alors elle avait probablement raison, il fallait que la Serdaigle la laisse partir, qu’elles ne se revoient plus pendant un certain temps afin de voir réellement ce qu’il s’était passé aujourd’hui : manipulation ou véritable coup de cœur ? Lorsqu’elle avait bu le philtre d’amour, il y avait quand même quelque chose qui lui faisait comprendre que ce n’était pas naturel, que tout n’était qu’illusion. Cela avait probablement été dû au fait que la potion n’avait pas été réussie à la perfection. Aujourd’hui, tout semblait réel, vrai, est-ce que son héritage de Vélane était capable de manipuler les gens jusqu’à la sensation d’étourdissement ?

Alors Soleya l’avait laissée partir, tout simplement, sans même lui répondre quoique ce soit, sans même avoir pu l’observer une dernière fois. Le cœur douloureux de la voir s’éloigner, vexée, peut-être déçue de constater qu'elle avait pratiquement découvert son secret – hasard pur et dur – sans aucun indice, juste parce que ces sentiments ressentis lui faisaient peur. Parce qu’il y avait rarement de juste milieu. Ils pouvaient nous faire défier la gravité puis nous relâcher brutalement et nous laisser nous écraser au sol. Seize ans était l’âge des premières déceptions. Mais s’il fallait attendre, elle attendrait. Mais une chose était certaine : elle ne voulait pas cesser de penser à elle.

Fin du RP