Je suis carrément surexcité. Je vais à Azkaban ! Si c'est pas trop la classe... Pour sûr que peu de gens peuvent se vanter d'y avoir mis les pieds sans avoir revêtu la tenue de prisonnier. Et bien moi, Benedict Perfection Adams, j'en fais partie. Je vais revoir Élius, enfin. Il m'avait promis qu'on se reverrait après la Saint-Valentin, et le moment est enfin venu. C'est juste pas franchement au bon endroit. J'espère qu'ils le traitent bien, là-bas. Parce que je ne veux pas qu'il soit changé quand il reviendra. Je veux qu'il soit le même qu'avant, du moins avec moi. C'est que j'ai mes propres besoins auxquels penser. Ce sont d'ailleurs les seuls auxquels je pense.

Dans la barque qui tangue dans tous les sens, je me serre un peu contre ma Marraine. Pour qu'elle me tienne chaud. Et aussi juste pour avoir un contact physique avec elle. J'aime les contacts physiques, je crois que vous l'avez compris. Bientôt, on peut sortir, poser le pied à terre devant l'immense forteresse de la prison. Levant les yeux vers le sommet de celle-ci, mes lèvres s'arrondissent en un "Wahou" de circonstances. C'est vraiment trop classe comme endroit. Même si ça manque de luminosité, de couleurs et de paillettes. Bref, ça manque d'une vie éclatante, mais tout va bien maintenant, je suis là pour y remédier. Des paillettes dans les poches, j'en dépose quelques unes devant la prote d'entrée. Pour dire que je suis passé par là, et les gardes peuvent bien me regarder bizarrement, j'ai le droit, elles ont rien de bizarre ces paillettes, juste elles brillent d'un joli éclat, comme moi.

Bientôt, nous sommes conduits devant sa cellule. Le garde reste là, avec nous. Aucune intimité, c'est quoi son problème ? Ils nous ont déjà pris nos baguettes à l'entrée, et ils nous ont fouillé, on risque pas de repartir avec Élius sur le dos ! En plus j'ai galéré à garder mes paillettes, ils étaient prêts à toutes les étaler au sol, les malotrus ! Heureusement que j'ai fini par les récupérer grâce à un caprice digne d'un enfant de cinq ans qui refuse absolument tout argumentaire. Il a changé, Élius. Il est pâle. Et il n'a plus l'éclat d'avant. Je m'approche de lui, mains dans les poches, moue déçue.

- T'étais plus beau avant.

Alors je sors une poignée de paillettes pour lui souffler au visage.

- T'as menti. T'es jamais revenu après la Saint-Valentin.

C'est nul. Il tourne en boucle, et ma marraine est même pas fichue de lui répondre correctement. J'aime pas l'ambiance ici. Je pensais qu'avec Élius, on pouvait transformer Azkaban en super scène de spectacle, quelque chose de jamais vu. Mais tout ici n'est que déception. Même lui, derrière les barreaux. C'est plus le même que celui que j'ai connu dans les cachots. Il ne brille plus, il ne m'excite même pas alors que je me souviens que je ne voulais plus me détacher de lui. Il est tombé bien bas. C'est donc ça, la prison ? C'est ce que ça fait aux gens ? C'est pathétique.

Il ose me dire de me taire, alors que c'est lui qui devrait. Il devrait avoir honte de se mettre à presque supplier ma marraine comme ça pour qu'elle daigne assouvir ses désirs. Elle aussi, elle est bizarre, pas comme d'habitude. Elle n'est pas aussi sûre d'elle, pas aussi autoritaire. Elle me serre la main comme dans un étau, et je la laisse faire tandis que je les observe l'un après l'autre, comme des bêtes de foire. Je me demande si elle va accepter. Je veux bien les regarder, dans cette ambiance malsaine. Oui, ça, ce serait excitant.

Le garde semble devoir reprendre sa ronde, il n'est plus dans notre dos. Il n'y a plus que nous trois, l'un derrière les barreaux, accroché à l'une qui s'accroche à l'autre. Une chaîne d'emprise, de liens emmêlés, alors même que personne ne devrait être là. De toute façon, il m'a vexé en me disant de me taire. Alors je tourne le regard vers ma marraine, ange innocent et toujours aussi beau, le plus beau qui se trouve ici d'ailleurs.

- C'est nul ici, on s'en va ?

Le sourire qui accompagne ma demande se tourne vers Élius, bête en cage, et se transforme en une langue qui se tire en un "Na" enfantin. Faut pas me dire de me taire.

Voilà qu'il me touche à présent. J'ai envie d'avoir un mouvement de recul. Depuis combien de temps ne s'est-il pas lavé dans cette cellule glauque ? L'hygiène, c'est important. Et même si je l'aime bien, j'ai l'impression qu'il n'est plus le même, ici, de l'autre côté de la grille. Comme s'il n'y avait plus qu'un étrange animal à observer tandis qu'il plonge petit à petit davantage dans une folie incompréhensible. Il me fait de la peine, un peu. Ma marraine aussi, quand elle me rapproche d'elle.

Je me serre tout contre elle, pose ma tête sur son épaule, sans quitter Élius du regard, comme s'il pouvait changer à tout moment. Se métamorphoser en autre chose qu'un être de lumière et de brillance. Son éclat est terni, et même les paillettes dans mes poches ne sauraient le raviver. J'espère qu'il va bientôt sortir. La prison ne lui rend pas honneur. Ma marraine finit par l'embrasser, comme cédant enfin à ses demandes désespérées.

Je les observe, tous deux, lèvres scellées. Est-ce qu'un simple baiser pourra le faire revenir à la vie ? A la vraie vie, à celle qu'il menait avant d'atterrir ici. J'espère que je ne finirai jamais en prison, une telle dégringolade est tout simplement inimaginable. Je finis par poser mes propres lèvres sur la peau de ma marraine, dans son cou qui se dévoile à moi. Je laisse ma langue y tracer un petit chemin, tandis que mon regard ne quitte pas Élius. Peut-être que ça pourra l'exciter davantage. En fait, j'ai bien envie de voir tout ce qu'il peut se passer ici, avec eux. Enfin, entre eux.

Moi, je ne suis qu'un spectateur dévoué, prêt à prendre part au spectacle pour lui redonner un coup de peps.