Les toits du Chemin de Traverse étaient sans doute les plus rigolos. Ils glissaient, étaient escarmotés, décidément pas droit. Cela agite les réflexes des jambes accrobates, le Renard sautille, s’amuse, attend une distraction comme il les aimait tant. Quelque chose qui accrocherait son attention et son sourire. La nuit était tombée sur la célèbre Allée, laissant les sorciers quitter les pavés pour aller se dorloter dans leurs canapés. Un silence pesant tandis que le Mangemort faisait craquer quelques tuiles, le plaisir d’entendre l’écho d’un son presque inquiétant.
Bientôt, une jeune chevelure blonde scintille dans son regard, déclenchant l’excitation du palpitant. Boom boom boom, il allait avoir le délectable plaisir d’aller enquiquiner quelqu’un. C’est qu’il fallait préciser que le métier de Mangemort avait au moins ce bienfait, il facilitait les travers du Wildsmith de toujours embêter son monde, maintenant, il pouvait le faire Masqué – la nuit. Petit gloussement satisfait tandis qu’il transplane directement devant la Demoiselle.

Joyeux guet-apens alors qu’il écarte les bras avec enthousiasme : Bonsoir ! Il ne sait pas encore quelles seraient les réjouissances de la soirée, discussion agitée, ennuyante soumission ou encore escarmouche de baguettes – oui ! ça faisait longtemps. Le temps de lisser la somptueuse veste de costume, et il se penche dans une polie courbette, je suis Cinquante-Deux ; les présentations, c’est important. Ca donne la tonalité de la rencontre, une humeur sur la personnalité rencontrée.
Alors quoi, les muscles tendus il veille tout de même au grain, il ne s’agissait pas que la Proie s’enfuie et qu’il ne puisse rien se mettre sous la canine. Un bref regard aux alentours soulage une vague inquiétude – personne, personne, personne. Les retardataires devaient être en train de se saouler au Chaudron Baveur, il était en sécurité.
Pas elle. Vous travaillez chez Ollivander’s Mademoiselle ? Un petit rire vient secouer le buste, cette magnifique boutique dont il avait participé à l’incendie il y a quelques temps de cela – qu’est-ce que c’était joli. Peut-être même que cette demoiselle était la clé à de nouvelles péripéties pyromaniaques, si en s’amusant, il arrivait à la traîner de nouveau dans la boutique, pour trifouiller, voler, brûler.
Pour se distraire, tout simplement.

Elle parlait déjà beaucoup la petite. Entre politesse et ironie, cela dessine un sourire carnassier derrière le masque, ce soir, c’était sûr, il allait se régaler. Il s’en frotte déjà les mains de l’audace verbale de la vendeuse d’Ollivander’s. Il hausse les épaules, comme si ce n’était pas tant la boutique qui l’intéressait mais, plutôt vous. C’est que les tenants et aboutissants d’une conversation mangemoresque se décidaient dès les premières secondes. Or ici, la jeune Sorcière s’était décidément, tout de suite montrée, certes absolument gentille, mais aussi et surtout : agaçante. Puis, il fallait dire que cela faisait belle lurette que le Malicieux ne s’était pas réellement amusé.
Merci, qu’il finit par dire simplement, toujours aussi ému lorsque son égo de Renard était caressé dans le sens du poil. La mécanique dansante des jambes se remet alors rapidement en marche tandis qu’il se met à tournoyer gaiement – lentement – autour de sa Proie de la soirée. Il y avait aussi autre chose qui le chagrinait, quelque part dans son cœur tout mou de Mangemort.

C’est-à-dire qu’il y avait une époque où la présence même d’un Ténébreux éteignait les lumières hautaines des jeunes sorciers, faisait cesser toute musique désopilante. Où était ce temps où les Mangemorts étaient craints ? Non, ce soir, il était apparu trépignant, et tout ce qu’il avait reçu à la figure c’était du cynisme et des questions sur son masque. Aaaah l’arrogance adolescente ! Il y mettrait fin. Terminé de les prendre pour des clowns qui arpentaient les rues, costumés, pour amuser la galerie.
Lui était là pour rigoler – certainement pas les autres. Alors, il s’arrête devant la jeune femme, à une chaussure et demi de distance, sans aucune discrétion, il s’empare d’Odette III, histoire de donner le ton aux minutes suivantes. Je crois que vous avez mal saisi la situation Mademoiselle, un avertissement, parce que Cinquante-deux se délectait toujours autant dans de belles paroles. C’est rapide vif et succinct : #Bloclang ! Pour vous empêcher de continuer de dire des annêries. Oui, absolument, il faisait cela pour elle, pour qu’elle évite de trop déborder, de trop l’agacer, ce qui se terminerait par quelque chose de bien pire qu’un simple sortilège inoffensif.

Il sautille, reprenons ! Elle n’avait pas besoin de parler pour se rendre compte de son insolence. Je suis Cinquante-deux, jeune mangemort plein de panache, mais il y avait nul besoin d’aller si loin dans les présentations. Maintenant, arrangez votre posture. Autrement dit, faire la révérence ou se mettre à genoux, après tout, c’était là le respect que les sorciers devaient aux Masqués.

Une saveur délicieuse se dépose sur la langue autant avide de pouvoir que de perversion. S’était-il déjà amusé de la sorte ? Certainement pas. Le Renard était réputé pour sa joyeuseté, son entrain permanent et ses discours éloquents. Il était celui qui inquiétait différemment. Ne surtout pas user de la baguette à chaque contrariété, non, le Rusé adorait jouer. Pourtant, ce soir, c’était un gouffre terriblement appétissant qui luisait au bout de ses doigts – donner une magnifique leçon à cette jeune fille. Un exemple pour les autres, pour tous ceux qui auraient l’audace de croire qu’ils étaient ne serait-ce qu’égaux.
Peut-être avait-elle compris, la Demoiselle dont les genoux cédaient face à sa sommation. Elle baisse les yeux, vulnérable devant le Masque – ça l’émoustille. Toutefois, le Malicieux n’est pas si dupe, ni si noyé dans sa mégalomanie ; il sait discerner une parfaite comédie. Il sourit, largement, se doute que sous ses jolis cheveux blonds les méninges s’activent d’inquiétude, cherchent la fuite la solution qui la libéreraient. Alors, à l’aveugle, parce qu’il n’a pas encore fait l’effort de se pencher sur la legilimancie, il tente entre ses dents carnassières : vous avez envie déjà envie de partir ?

L’obscurité lui procurait cette défense absolue et cette protection, mais ça ne durerait pas longtemps avant qu’un sorcier indiscret ne vienne les déranger. La distraction ne pouvait donc être autrement que courte et intense. Odette III tournoie entre ses doigts, avide de voir le visage de la Vendeuse se contracter d’horreur, et malgré la fausse obéissance de la Proie, il n’hésite pas : #Levicorpus ! Ce sortilège que lui-même détestait parce qu’il était humiliant à souhait.
Immédiatement il rit de la posture de l’Adolescente, elle était entre ses griffes, et il ne cessait de se pourlécher. Sentir la faiblesse et l’innocence pour l’écrabouiller et les remplacer dans le cerveau de la Victime par un exquis traumatisme. C’est ce qu’il voulait être ce soir pour elle, il voulait devenir celui qu’elle craindrait. Je fais ça pour vous, vous savez. Il se reprend à marcher autour de la Sorcière, un brin de mauvaise foi dans la voix. A chaque pas, il réfléchit à la suite, comment il pouvait vraiment lui faire comprendre qu’elle lui devait absolument respect et obéissance. Avec cette idée qui rythmait ses pensées – surtout pas de sang, pas de sang au risque de déchaîner le monstre sanguinaire qui sommeillait entre les tripes impatients. Mais il était quelque peu gentillet, il ne voulait pas que le cœur de la Poudlarienne lâche sous l’angoissante attente.

Il s’approche, s’approche, et se penche, le museau à quelques centimètres du visage renversé de la Demoiselle : #Ango Nubes, comme un bel hommage à l’Amoureuse du Renard qui adorait cette formule – l’étranglement. L’entendre suffoquer élargissait encore le sourire féroce sous le masque, à en faire mal aux pommettes. Durant de longues longues longues secondes il agite le petit nuage de fumée étrangleuse devant le nez de la Blonde.
Finalement, Odette III s’éloigne et envoie le brouillard funeste vers le ciel. Qu’elle en profite pour respirer – un instant. Pour vous apprendre à vous méfier, à savoir où est votre place. Il prétend être prévenant, ça fait gonfler l’égo mangemoresque. Pour vous éviter les ennuis à l’avenir. Briser la jeune fille devenait une telle nécessité que ses ongles en tremblaient.

Aah la Petite lui donne du fil à retordre, et évidemment, il adore ça. Les chaussures vernies volètent vers l’arrière, lui décrochant un sourire mauvais sous le masque. Après tout, une victime docile était une victime bien trop ennuyeuse. Non, Cinquante-Deux aimait profiter et surtout, surtout : s’amuser. Alors il éclate de rire dans la rue déserte, et Odette III dégage le décor de ce terrible brouillard, un simple geste afin de se débarrasser de ce qui lui obscurcissait la vue : #Ventus !
C’est là que la scène lui fait pétiller le ventre, des étincelles d’adrénaline, le Renard se pourlèche. La condition lupine est brutalement réveillée par la Demoiselle prenant la fuite, le Loup qu’il était se gargarise alors de la chasse qu’il menait. La jeune vendeuse comme une Proie, jamais il ne la laisserait s’échapper, trop heureux d’être le marionnettiste funeste d’un soir. Quoi ? Je vous ennuie ? Qu’il crie à travers avant d’arrêter la course vaine de la Blonde d’un #Everte Statum. L’enchaînement est précis, et la chute de la Poudlarienne lui permet de sautiller gaiement jusqu’à elle, sans se presser, sans même froisser son joli costume.

Jubilatoire position de force alors qu’il surplombe de nouveau la jeune fille, il s’en frotterait les mains si l’une d’elle ne brûlait pas d’excitation de tenir Odette III pointée sur le corps trébuché de la Victime. Moi seul décide de quand se terminera notre entrevue … Il s’accroupit, son inquiétante douceur dans ces cruels instants est toujours autant à vomir, le calme avant la tempête comme on dirait, pour vous punir, encore, de votre insolente attitude : #Endoloris. Les épaules tanguent sous l’ivresse procurée par les cris de l’Adolescente. Un agréable rappel d’une des raisons pour lesquelles il adorait porter ce masque. Ce n’est qu’au bout d’une longue longue éternelle minute qu’Odette III s’abaisse et qu’il se relève, soupirant d’extase. Ainsi que la façon dont elle se terminera. Briser cette jeune fille était devenue une savoureuse priorité.

Sous les paupières closes, bienheureuses du Renard, vaguelète le ravissement d’entendre les supplications. Le Mangemort était-il un homme capable de pitié ? Certainement pas, il fallait apprendre au fil du temps et des événements à enfermer l’humanité quelque part, ne la faire scintiller qu’à quelques précieux instants – et ici, ce n’était pas un de ceux-là. Les doigts du Malicieux dansent jusqu’au visage de la Blonde, lui essuie doucement les larmes dans un chuuuut, chuuut, qu’il voulait aussi rassurant que déroutant. Oh, que cet entre-deux était délicieux ! Décidément, s’il avait su que cette soirée serait si affriolante, il aurait revêtu son plus beau costume plutôt que cet ordinaire-là. Le geste paternaliste ne cesse pas tout de suite, il poursuit pour emmêler ses phalanges autour d’une mèche lumineuse de la jeune fille. Il sait qu’elle pouvait lui cracher dessus, se jeter sur lui, mais Cinquante-Deux est imbus, et fait confiance aux lupins réflexes ainsi qu’à son aura inquiétante.
Il pourrait se perdre complètement dans ce ravissant tableau d’une adolescente à ses pieds, épuisée du sortilège qu’il venait de lancer. Il s’exclame alors, pas du tout vexé de cette comparaison aux autres Ténébreux : J’suis pas si différent, j’suis juste plus amusant ! Et personne ne pouvait prétendre le contraire.

Odette III toujours attentive au bout des doigts, prête à rugir, pour l'instant silencieuse, elle est pointée sur l’abdomen de la Poudlarienne. Le Renard n’est pas empathique, mais il est bavard : votre insolence m’a agacé, vous apprendrez le respect. C’est avec sincérité qu’il lui explique la raison pour laquelle elle se retrouvait là, vulnérable Proie allongée sur les pavés du Chemin de Traverse. Il plante alors son regard ombrageux dans celui de la jeune vendeuse : êtes-vous satisfaite de la leçon Mademoiselle ? C’était une bien rhétorique question, qui n’admettrait aucun non. A moins qu’elle soit prête pour d’autres implorations, ce qui ne serait pas pour déplaire l’apprenti Mage Noir.

Voir les apprentis s’épanouir et finalement, comprendre. Comprendre que la confiance adolescente ne servait absolument à rien, et qu’il y avait dans ce monde de sombres figures – imposantes – intouchables. Cinquante-Deux se complaisait tout à fait dans cette représentation de lui-même, la mégalomanie enroulée avec l’orgueil, les deux confortablement enfouis entre les deux oreilles rousses. Voir la jeune fille ravaler sa dignité pour s’écrabouiller absolument devant lui, c’était si beau qu’il en ferait un joli tableau accroché dans la galerie de son cerveau. Bien, très bien, s’il le pouvait, il lècherait avec triomphe sa soumission. Je n’ai aucun intérêt à vous tuer, ce serait d’un ennui ! Il préférait largement voir les souris apeurées tenter de s'extirper de ses griffes destructrices. Ainsi, pour ce soir, il la laisserait rejoindre confortablement son lit, avec la douce impression d’avoir perturbé le déroulement serein de sa vie. Peut-être même qu’elle se réveillerait, parfois, cauchemardant de lui. Ce qu’il adorerait.

Par contre, ne me touchez pas. Il était dangereux d’être si proche du Renard se trouvant dans un tel état de frénésie sauvage – féroce. De sa main libre, il saisit le poignet fragile de la Demoiselle, s’en détache. Tellement fragile qu’il pourrait le briser promptement. D’ailleurs, c’est ce qu’il fait.
Sans avertissement aucun, avec une facilité déconcertante – lupine – il retourne l’os qui craque violemment. Aaah quel harmonieux son aux tympans du Mangemort ! Nécessité aussi de se retirer prestement, il sentait, sentait dans le ventre l’euphorie prédatrice – il finirait par la manger. Pour que vous gardiez un petit souvenir qu’il conclut avant de se relever avec élégance, épousseter son costume, et transplaner.


Départ de 52, merci