Lorsqu’il était sorti de sa maison en début d’après-midi après un simple “Je sors, m’attendais pas ce soir”, à la destination de ses parents, Arthur n’avait eu aucune idée de la direction à prendre. Non pas qu’il était perdu, bien sûr que non, simplement, il y avait tant d’endroits où aller à Londres, que le choix était compliqué. Le lion avait passé les deux premiers jours de ses vacances enfermé dans sa chambre à rattraper le temps perdu et jouer aux jeux vidéo avec ses potes français. Deux jours à câliner son demi-Fléreur, Stray et à uniquement sortir de sa chambre pour manger et se laver. A la fin de ce deuxième jour, il avait enfin commencé à ressentir le manque d’activité, de sport. Normalement, il en faisait quotidiennement à Poudlard et il ne pouvait clairement pas s’en passer. Le bouclé avait donc enfilé short et legging de sport, sweat-shirt, casquette et sac à dos et avait parcouru les rues de Londres au pas de course avec de la musique dans les oreilles. Il avait cherché, sans réellement s’en préoccuper non plus, un endroit où continuer son sport et faire du football. Fort heureusement, son footing l’avait réchauffé. A son plus grand bonheur puisqu’il n’appréciait pas vraiment l’hiver, ni l’automne, préférant de loin la chaleur du soleil. Ce dernier avait d’ailleurs été bien présent dans la journée, mais n’avait pas beaucoup réchauffé le pays.

Finalement, ses pas l’avaient mené jusqu’au parc, certainement le plus connu et donc le plus fréquenté de Londres, le Hyde Park. Il savait qu’ici, c’était parfait. Ici, il avait été certain de continuer son sport sans se taper les piétons lents et les voitures, certain de trouver des compagnons pour jouer au football et certain de pouvoir se poser près du lac, avec les canards, les oies et les cygnes qui l’habitaient. Sans difficulté, il s'était donc trouvé un spot sous un arbre, assez loin des passants et avait caché son sac à dos à l’aide de sa baguette, à l’abri des regards moldus.  

Dans l’après-midi, comme il l’avait prévu, Arthur s’était trouvé un groupe de jeunes qui faisait un match de foot. Il les avait rejoints et s’était arrêté de jouer quelques heures après avec toujours le même et triste constat : S’il gardait encore un niveau correct et qu’il restait le meilleur de Poudlard (pas compliqué quand les sorciers ne juraient que par le Quidditch), il était clair qu’à côté des gens qui avaient la chance de pouvoir en faire tous les jours, il était devenu nul. Le bouclé s’était néanmoins séparé d’eux, de bonne humeur et avait regagné ses affaires pour faire une longue et agréable sieste. Troisième passion après les jeux vidéo et le sport, évidemment.  

Lorsqu’il s’était éveillé, le soleil avait commencé à se coucher et le lion avait rejoint un bar/café du coin qui servait aussi des plats salés. Il s’était commandé un hamburger et des frites – car oui, après s’être longuement dépensé il pouvait se permettre de manger gras – et était retourné sous son arbre pour manger.


Arthur, était à moitié couché, là, par terre, la tête sur son sac à dos, toujours de la musique dans les oreilles. A côté de lui, traînait encore l’emballage de son repas. Il faisait nuit et les chemins du parc étaient légèrement éclairés par les lampadaires. De là où il était, il faisait déjà un peu plus sombre. Heureusement pour lui, il était en train de fumer, et l’herbe l’empêchait de penser à l’obscurité qui l’entourait et qui en temps normal, le mettait mal à l’aise... Surtout les ombres des arbres et autres bâtiments. De son autre main, celle qui n'était pas occupée par le joint, il jouait distraitement avec sa baguette. Les moldus – encore fallait-il qu’un rare passant vienne le voir à l’heure actuelle – étaient trop bêtes pour comprendre qu’il tenait une vraie baguette magique entre ses doigts. Quant à lui, il ne l’était pas assez pour lancer un sort sans faire exprès. Il se sentait complètement détendu et dans les vapes, les yeux rivés vers les étoiles. Il cherchait en vain des constellations. Forcément, il ne travaillait pas assez en cours d’astronomie. Quand est-ce qu’il allait rentrer chez lui ? Lui-même ne le savait pas. Il était bien là, seul, dans la nuit. Il regrettait seulement de ne pas avoir Stray, en laisse.

Mars. Il était presque sûr et certain de lui, sûr à 95% qu’il venait te trouver la planète Mars dans le ciel. Elle était lointaine, mais il pouvait remarquer que son éclat était légèrement plus rouge que les autres étoiles. Il recracha sa fumée et ferma les yeux quelques secondes avant de les rouvrir et de trouver... Incroyable. La Grande Ours. La seule constellation qu’Arthur était capable de trouver facilement. Les autres, il n’y comprenait rien, le professeur Daiklan pouvait réellement voir des lions dans le ciel ? C’était absurde. En train de disserter sur le pourquoi du comment, un jour, un mec s’était décidé à aligner les étoiles pour leur donner des noms (il n’avait certainement pas fumé que de l’herbe), il n’entendit pas un Inconnu approcher.  

Le ciel disparut pour laisser place à un Renard. Un renard empaillé. Quelque chose de bien glauque qui fit sursauter – avec un peu de latence – le bouclé. Son rythme cardiaque avait considérablement augmenté et malgré l’avertissement du sorcier qui venait de lui déloger ses écouteurs, il avait resserré sa prise sur sa baguette, sans pour autant la pointer vers l’Inconnu. Déjà car il l’avait fait inconsciemment et ensuite, car il ne voyait pas l’utilité d’être agressif avec quelqu’un qui ne l’était pas envers lui... Pourtant, s’il avait été dans son état normal, il aurait certainement été plus méfiant face à un type avec un masque de renard sur la tête. En pleine nuit. Alors qu’il ne le connaissait pas. Il ne se posait pas non plus la question, de quoi l’homme pouvait bien avoir la flemme et pourquoi cela ne servirait à rien qu’Arthur essaye de se battre. Non, vraiment, l’herbe lui avait fait perdre tout instinct de survie. Il le laissa prendre son joint, sans se plaindre et se redressa lentement. Dans les vapes. Il se mit en position assise et l’observa s’installer à ses côtés et fumer SA consommation. Celle qu’il avait payé plus tôt, avec son argent de poche. Et cela lui importait peu en vérité.  

Les battements de son cœur s’étaient calmés et la pression sur sa baguette s’était aussi relâchée. P*tain, mec. Il se racla doucement la gorge, réveillant sa voix qui était endormie. Celle de la personne face à lui laissait penser qu’elle était jeune, alors c’est naturellement que le lion opta pour un tutoiement. Ton masque m'a fait tellement flipper. Beaucoup. Il n'avait pas été sur ses gardes. Mais qui l'aurait été à sa place ? Il était un sorcier et savait se défendre, il ne craignait plus la présence des inconnus et jamais il n’aurait pensé que quelqu’un allait venir l’accoster à cette heure si tardive de la soirée. Mais le pire dans tout ça, c’était ce masque. Qui portait ce genre de chose sur le visage ? A part à Halloween ? Sauf qu’on n'y était pas, il fallait encore attendre quelques jours. Pourquoi tu mets ça ? Demanda-t-il avec un rire idiot, prouvant qu’il avait déjà bien entamé sa cigarette. Arthur se rallongea, toujours aussi peu inquiet et tendit sa main vers le Renard pour récupérer ce qui lui était dû. Il voulait bien partager, avec plaisir même, mais il comptait bien tirer encore quelques fois dessus.

Maître Corbeau, oui, celui qui tenait en son bec un fromage était facilement comparable à Arthur qui ne pouvait apparemment pas récupérer sa proie, ici, plus communément appelé joint, puisque Le Renard comptait bien le garder pour lui. Le bouclé n’avait plus qu’à jurer, mais un peu tard, qu’il ne se laisserait plus surprendre par un inconnu. Cela l’aurait évité d’être déconcentré et donc il aurait fait plus attention à sa cigarette. Il ramena sa main vers lui, et ne put s’empêcher de grogner de mécontentement. Chose qui ne dura que très peu de temps, puisque finalement, il passa son bras sous sa tête et ferma les yeux, un air paisible au visage. Les bienfaits de l’herbe. Rien ne pouvait réellement l’agacer ce soir. Il écouta la réponse de de l'homme, légèrement sur sa faim. Parce qu’il en avait envie...? Sa raison était tout à fait recevable, mais... Il s’était attendu à autre chose. Quelque chose de plus palpitant.  

Allait-il répondre à ses attentes ? Le lion s’assit de nouveau pour mieux observer le Renard qui s’était soudainement levé – toujours avec son joint rappelons-le – et qui se croyait soudainement au théâtre. Sourire en coin, l’inconnu avait toute l’attention d’Arthur, ce dernier ne le lâchait pas du regard et était complètement happé par cette tirade. Pardon, par ce spectacle ! Sans aucune pression, l’homme réussit sa figure du premier coup. Le bouclé leva les bras, prêt à applaudir, jusqu’à ce qu’il termine son discours par un numéro. Son sourire disparut, ses bras se baissèrent. Cinquante-Deux. Non pas que ce nombre en particulier lui faisait penser à quelqu’un ou quelque chose de précis. C’était simplement l’idée de se définir, se présenter par un numéro qui le stoppa dans sa lancée. Cela fit tilt dans son cerveau pourtant bien enfumé.  

Le masque. Le matricule. M*rde. Face à lui, ne se trouvait pas juste un idiot qui sortait d’une soirée Halloween en avance. Non, c’était un Mangemort. Il rit nerveusement. Peu longtemps. Forcément que cela ne lui aurait servi à rien de lever sa baguette. Déjà qu’il était (très) loin d’être le meilleur élève de Poudlard, alors en plus face à un Mage Noir... Il n’aurait pas fait long feu. Il fallait être honnête, Arthur ne savait pas grand-chose sur eux. Il ne s’y intéressait pas forcément, ne penser pas en rencontrer un, un jour alors la seule chose qui savait vraiment, c’était qu’ils n’étaient pas franchement conseillé de les fréquenter. Ce qui venait d’entendre sonnait complètement différemment dans sa tête. “Celui qui répand le sang et le feu”. Lui qui avait une préférence pour tous les sorts en rapport au feu, il trouvait cette phrase beaucoup moins drôle maintenant. Alors, qu’est-ce qu’il devait faire dans cette situation ? Il était incapable de réfléchir convenablement avec ce qu’il avait fumé. Seulement, il devait réagir. Au moins dire quelque chose comme, “bravo pour cette pirouette”, on s’en fichait, mais cela faisait trop longtemps qu’il était silencieux.

Cinquante-Deux devait savoir que le lion venait de comprendre. Arthur ouvrit la bouche et la referma aussitôt. Décidément, il était pris de cours. Heureusement, le joint lui permettait de ne pas vraiment stresser. Il était plus nerveux à l’idée de ne pas savoir réagir devant lui qu’à l’idée de se faire potentiellement agresser. Si le Mage Noir avait voulu l’agresser, il l’aurait déjà fait. Non ? Et puis, pourquoi il ferait ça après tout ? L’herbe lui permettait de relativiser. Ou toujours de lui faire perdre son instinct de survie. Arthur Digler. Dit-il doucement, calmement même. C’était la réponse logique non ? Quand quelqu’un se présentait, on se présentait en retour. Il s’insulta intérieurement. Non, pas dans ce cas-là. Ou peut-être que si.

La lune était la seule à les éclairer et elle se trouvait derrière le Renard, dont l’ombre recouvrait le lion, accentuant ce moment de flottement. Cette situation étrange. Peut-être aussi la position dominante de l’inconnu. Ce que le lion n’avait pas réellement conscience. Alors, il resta assis. Qu’est-ce qu’il lui voulait ? C’était ça la question maintenant. Alors, il la lui posa. Et donc, qu’est-ce que tu me veux ? La question avait l’air froide comme ça, comme s’il était sur la défensive, mais non. Le ton était certes moins joueur qu’avant mais calme. Naïf ? A part mon joint. Rajouta-t-il presque en souriant. Devait-il avoir peur ? Le combo était trop parfait. La nuit, le masque glauque, le Mangemort, les ombres qui le dévoraient et qui étaient quasi similaires à son épouvantard... Il le serait certainement, apeuré, en temps normal. En temps normal.

Après toute la pression qu’il venait d’accumuler en seulement quelques secondes, retrouver son joint fut comme une délivrance pour le jeune homme. Il n’avait pas essayé de se décaler lorsque le Renard avait remis la cigarette entre ses lèvres légèrement entrouvertes, encore sous le choc. S’il ne continuait pas à fumer, il allait petit à petit redescendre et son attitude étrange, son calme offert par l’herbe se transformerait rapidement en stress. Nerveux de se retrouver devant un Mangemort, dont il ne connaissait rien. Mis à part qu’il fallait les éviter au mieux. Pourquoi ? Arthur n’en avait aucune idée. Il n’avait que des suppositions. Ils étaient puissants, utilisaient la magie noire. Ils tuaient à leur guise ? Le lion secoua légèrement la tête, chassant ses pensées et tel un toxico en manque, il tira longuement et rapidement sur son joint, recrachant cependant la fumée lentement. Très lentement, avec soulagement. Avec tout ce que Cinquante Deux avait fumé, la cigarette était sur sa fin. Alors, certes, cela montait plus rapidement au cerveau, mais il n’en avait pas d’autres sur lui, le reste était dans un tiroir de sa chambre.

Le Gryffondor ne répondait pas, regardait le Renard, l’écoutait l’insulter. Pourquoi il avait donné son nom ? Il faillit répondre à la façon d’un enfant, se plaignant que c’était la première fois qu’il faisait face à ce genre de situation et que, sur la panique, il n’avait pensé à rien d’autre. L’autre se présentait, alors lui aussi. Mais il n’avait pas de pseudonyme. Le lion avait pour habitude d’agir avant de réfléchir, alors forcément, l’effet de l’herbe ne l’aidait pas. Il aurait dû prendre son temps, encore plus, quitte à avoir l’air encore plus idiot à être silencieux pendant de si longues secondes. Oui, sa première idée “bravo pour cette pirouette” n’avait finalement pas été si bête que ça.

Il n’avait toujours pas ouvert la bouche, écoutant avec un intérêt presque imposé les mots du Mangemort. Son timbre de voix, joyeux, mélangé avec des menaces violentes le fit frissonner. Arthur lâcha du regard Cinquantes-Deux, fixant le vide. Rien de particulier. M*rde. Le Renard termina alors par lui tapoter le crâne, empêchant le bouclé de gamberger et subir ses propres pensées, sombres et tristes. Toujours sans le regarder, il le sentit s’installer à ses côtés. Tu aurais pu trouver ça sans même que je te le dise… Il chuchotait presque. Pas vrai ? Il releva doucement la tête et posa son regard sur l’homme. Il était bien moins confiant qu’au début. Cette question n’était pas rhétorique. Il la posait réellement. Peut-être pour se rassurer, pour ne pas culpabiliser de son erreur. Mais peut-être aussi pour mieux connaître l’étendue de leur influence. Cela lui paraissait étrange que seul l’identité de quelqu’un pouvait bloquer les Mangemorts. Les informations n’étaient jamais très compliquées à obtenir quand on savait où aller. D’autant plus que le Renard, avant même de connaître le prénom et le nom d’Arthur avait eu des informations sur lui. Il savait que c’était un sorcier et qu’il était jeune. Cela se voyait. Puisqu’il était en Angleterre, il était forcément à Poudlard. Le lion était le seul de l’école à se trimballer, tout le temps, avec un ballon de football dans les couloirs de l’école. Sans oublier sa casquette qu’il ne le lâchait jamais. Et en tant que Président de l’Association étudiante, certes il n’était pas l’élève le plus connu, mais il était loin d’être l’inconnu du fond de la classe.

Arthur était facilement identifiable, mais est-ce que c’était le cas des autres personnes que le Mangemort rencontrait ? En dehors des autres masqués. Je veux dire, si t’as envie d’obtenir des informations sur quelqu’un, tu les as facilement, non ? Et si ce n’était pas par déduction et recherche… Il ne serait pas surpris de voir le Renard en pleine séance de torture au vu de ce qu’il venait de lui dire.

Impressionné, il l’était forcément, même juste un peu. Par les mots qu’il entendait et puis par le Renard en lui-même. Le voir ainsi, appuyé contre l’arbre, calme, avait eu le don de détendre définitivement le lion. Il ne ressentait plus aucune once de méfiance. Il éteignit lentement le reste de la roulée contre l’herbe puis s’allongea, un bras derrière la tête, les yeux fermés. Il écoutait et regrettait presque d’avoir déjà donné son identité. Pas parce qu’il craignait maintenant pour sa vie ou celle de sa famille, mais parce qu’il aurait aimé voir le Renard à l’oeuvre. Le revoir quelques jours ou semaines plus tard pour qu’il puisse lui balancer tout ce qu’il connaissait sur Arthur. Oui car attention, il regrettait ça seulement pour la partie recherche que le Mangemort avait abordée. Mais pas pour la partie qui sous-entendait la torture. Il n’était absolument pas pressé d’y goûter. Le seul point positif à cela, serait d’enfin pouvoir mettre en action les sorts qu’il apprenait en cours, surtout dans les matières où il excellait. Elles étaient rares, mais il savait globalement bien se défendre. A moins qu’il soit trop confiant ?

Un léger sourire s’installa sur le visage du garçon. Il jeta un coup d’oeil vers le Mage Noir qui attendait les questions du lion qui ne venaient pourtant pas. Puis lorsque ce fut lui qui se fit interroger, son sourire disparu pour laisser place à une moue pensive. Ché pas. Répondit-il avec honnêteté, haussant les épaules avec nonchalance. Les yeux maintenant dirigeaient vers les étoiles, il réfléchissait. Je m’y suis jamais intéressé avant aujourd’hui en tout cas. Ça c’était certain, il n’aurait même pas cru en rencontrer un. En fait, je connais rien de… Vous. J’ai juste entendu qu’il valait mieux vous éviter. Le reste, il n’avait pas écouté. Arthur se remit en position assise, lui aussi contre l’arbre et se tourna vers son compagnon de la soirée, un sourire en coin. Mais je t’en prie, présente-toi, parle-moi de toi, de vous… Il ajouta en riant : Vends-moi du rêve. Le lion était parfaitement attentif, la parole était au Renard.

Arthur était ce genre de personne chanceuse, dont, lorsqu’on le voyait, on pensait instantanément qu’il avait tout pour être heureux. Et c’était vrai. Il l’était, heureux. Même beaucoup. Il avait une famille présente (beaucoup trop à ses yeux) qui l’aimait énormément, aucun problème de santé et d’argent, beaucoup d’amis, que ce soit à Poudlard ou en France, un petit ami parfait, l’accès à l’éducation… Mais il sentait bien que quelque chose le dérangeait et lui manquait. Il savait exactement ce que c’était et cela, depuis longtemps. Depuis son entrée au château qui lui semblait plus être une prison qu’autre chose. Si ce fameux Secret Magique n’avait jamais existé, ou en tout cas, pas à ses dix ans, il aurait pu avoir la possibilité d’accomplir son rêve d’enfant. Rêve toujours d’actualité mais qu’il savait dorénavant impossible à accomplir. Même essayer ne servirait à rien. Arthur était le seul idiot, parmi tous ses anciens coéquipiers à avoir raté la venue d’un recruteur, présent dans le seul but de détecter les meilleurs joueurs et de potentiellement les faire intégrer une école de formation. Et il était le seul sorcier stupide à avoir toujours voulu devenir footballeur professionnel. Les autres voulaient faire du Quidditch, entrer au Ministère, tenir les boutiques phares de Londres… Et lui, il voulait pratiquer un p*tain de sport moldu à un niveau professionnel.

Alors forcément, lorsque le Renard prononça ces mots, “la chute du Secret Magique”, les yeux du lion commencèrent à briller. La bouche semi-ouverte, il écoutait avec une grande naïveté les propos de Cinquante-Deux, il le suivait du regard et commençait déjà à rêver d’un monde où la magie serait libre. La liberté. C’était tout ce qu’il aimait.

Oui, la magie était sublime. Et ce, même si elle avait causé la perte de son rêve. Même si elle avait failli détruire le couple que formaient ses parents. Mais ce n’était pas elle le coupable. Le coupable, c’était cette volonté de la garder secrète alors qu’elle serait utile à tous. Même aux moldus. Il faillit répondre : “C’est tout ?”, mais se retint au dernier moment. Non pas que ce Tout le décevait, bien au contraire, c’était amplement suffisant. Moins de règles, plus de liberté, la chute du Secret Magique… “C’est tout”, parce que, c’était pour Ca qu’on leur disait de ne pas fréquenter les Mangemorts ? Il fronça légèrement les sourcils. A moins que le Renard était en train de lui cacher des choses ? Possible. Très probable même. Mais Arthur - l’herbe qu’il avait fumé plus tôt ne l’aidait pas à réfléchir par lui-même - avait envie de croire en ce que lui disait Cinquante-Deux, de croire à un avenir qui lui conviendrait bien mieux. Peut-être qu’il se voilait la face, se mentait à lui-même, mais tant pis. Si… Répondit le bouclé dans un souffle, les yeux maintenant perdus dans le vide. Puis levant le nez vers les branches, il regarda le Renard qui avait apparemment échangé sa place avec le corbeau. Si, je suis complètement d’accord en fait. Dit-il plus fort cette fois. Plus confiant. C’est… Il réfléchit quelques secondes. Ouais ce serait incroyable, mec. Il en rêvait déjà. Du plus loin que je me souvienne, le Secret Magique m’a toujours gonflé. Sans lui je me ferais pas ch*er dans cette prison de m*rde. Je comprends pas pourquoi ils s’acharnent à le garder. Puis il s'allongea de nouveau sur l’herbe fraîche, la tête face au Renard perché. Mais alors le masque, la fausse identité, les menaces... C’est pour quoi ? Les mots de Cinquante-Deux sonnaient si biens dans les oreilles d’Arthur, alors pourquoi cette aura sombre et ces rumeurs obscures ?

Sursautant lorsque le Mangemort manqua de tomber de l’arbre, Arthur se releva rapidement pour l’esquiver, mais il resta - étrangement - bien accroché au tronc, dans une position qui paraissait horriblement inconfortable, mais qui, apparemment, lui convenait. Impressionnant. Comme seule réponse, Arthur hocha la tête de haut en bas. Oui, il parlait bel et bien de Poudlard. Il s’ennuyait dans la plupart des cours qui étaient dispensés, ne prenait plaisir que dans deux matières, les Défenses contre les Forces du Mal et Sortilèges et préférait sécher des cours comme la botanique et les potions. Rester assis pendant des heures ne l’intéressait pas. Rester enfermé, même en dehors des temps de cours ne l’intéressait pas. Leur liberté était limitée et le château ne lui apportait pas assez de distraction. Heureusement, il y avait l’association étudiante. Après ? Répéta-t-il les sourcils légèrement froncés. Quand après ? Et où ? Comment ? Après Poudlard il serait lâché dans la vie adulte, sans aucun repère et nullement attiré par les métiers destinés aux sorciers.

La dernière partie de la question avait été intelligemment esquivé par le Renard. Parler aussi rapidement de la torture aurait eu le don d’éloigner Arthur. Mais, même ce dernier, oublia ce passage là. Parce que l’herbe qu’il avait fumé. Parce que c’était le reste qui l’intéressait plus que tout. Parce que ce masque, bien trop proche du visage du garçon, ne lui évoquait plus la peur, les menaces, mais un nouvel idéal. Les yeux brillants d’espoir, mais aussi de volonté et détermination, il fixait le Mangemort, gobait tous ces mots sans détacher son regard de ses poils roux. Naïf et idéaliste. Il trouvait les propos du Mage Noir injustes et son choix de vie valeureux. Il risquait sa vie, pouvait terminer à Azkaban mais se battait quand même pour ses convictions. Des convictions qui rendraient la vie des sorciers plus belle et plus libre.

Cinquante-Deux avait presque gagné un admirateur. Je veux t’aider. Dit-il avec résolution, les sourcils froncés, sûr de lui, mais peu conscient des mots qu’il employait. Il lui fallait pourtant réfléchir par lui-même, mais l’herbe lui donnait des ailes et lui faisait perdre, pendant quelques heures, des neurones. Je veux moi aussi ouvrir les yeux des autres sorciers, renverser le Ministère pour que le Secret Magique disparaisse définitivement. Voilà un lion déterminé. Puis, ce fut lui, cette fois, qui s’approcha encore plus du visage du Renard. Ça m’intéresse. Il répondait finalement à la question qui lui avait été posé plus tôt. Et toi ? Sourire en coin, légère arrogance. Ça t’intéresse ? Demanda-t-il en reprenant la même formulation que le Mangemort. Bien sûr, cette fois, il ne parlait pas de la Cause, mais de lui-même.