Il y a toujours des choses à faire au Ministère. Tout le temps. Et heureusement car cela permet à la Magenmage de ne pas se perdre dans les méandres de ses pensées. Le travail permet d’oublier. Il y avait de nombreux dossiers à faire, des tâches à valider – des plus harassantes aux plus tranquilles. Tout pour éviter donc, de revenir à cette fameuse soirée où tout avait dérapé entre son ancien gérant et elle. Il fallait dire qu’elle était plutôt proche du burnout personnel que d’autre chose. Vouloir éviter à tout prix Azaël – n’était-ce pas un mauvais point ?

Toujours est-il qu’en voulant à tout prix ne pas penser à lui … Elle ne faisait que ça. Un soupir meurt sur ses lèvres alors qu’elle jette un œil à un énième dossier. Dont elle vient de relire la même phrase insipide qui ne changeait absolument rien aux flux de ses réflexions. C’était risible. Elle n’aurait jamais dû se laisser distraire par Peverell, jamais dû se laisser attirer dans cette folie dévastatrice. Après tout, c’était un risque pour eux deux, pour leurs propres vies mais également pour la cause qu’ils avaient choisi d’embrasser – chacun de leurs côtés.

Le fait que ses pensées n’aillent pas exactement dans le sens qu’elle voulait rendait la brune totalement dingue. Elle avait l’impression d’être une cocotte-minute sous pression, prête à l’implosion – ou l’explosion – dès que le vase déborderait. C’est-à-dire dans vraiment pas longtemps. Elle en était certaine. Elle sortait d’une réunion, son tailleur impeccable, le visage un peu trop las – il y avait trop de réunion au Ministère – et les traits marqués par la fatigue des nuits sans sommeil.

Elle lisait encore une fois la même phrase, adossée au mur du couloir lorsqu’elle le vit. Au départ simple silhouette qui se découpait dans la lumière du Ministère, elle était pourtant certaine qu’il s’agissait de lui. Toutefois elle ne se risqua pas à un coup d’œil vers lui. Non. Elle voulait fuir, encore. Faire comme si elle ne l’avait pas vu. Pourtant elle était prise au piège, la sortie était derrière lui, elle ne le savait que trop bien. Elle était prisonnière de son propre enfer : pourquoi ne pouvait-elle pas simplement assumer ce qu’elle ressentait vis-à-vis de son ancien gérant ? Pourquoi fallait-il toujours qu’elle fuit, sans arrêt ?

Pour le protéger, elle le savait. Pour se protéger aussi. Pour éviter d’avoir à souffrir une nouvelle fois. Des pertes, des disparitions. La brune déglutit rapidement alors qu’elle se décide enfin à affronter les choses – ou plutôt à passer à côté. Elle se redresse alors et prend le pari – beaucoup trop risqué – de passer à côté de lui comme si de rien n’était. Vraiment désespérante, elle le savait. Gardant ses yeux rivés vers le bas, elle fait comme si de rien n’était alors qu’elle se dirige vers lui. Alors qu’elle sent son regard sur elle, l’interrogation qui vient. Frisson qui se propage sur son échine. Elle sait qu’elle ne pourra pas fuir alors elle se résigne à un « Bonjour Mister Peverell … » et le détaille d’un œil aiguisé. C’était aussi étrange que terrible. Ce regard qu’il portait sur elle, cette incompréhension qu’elle lisait dans son regard. Les cernes qu’elle voyait sous ses yeux. Et ce profond vague à l’âme qu’elle ressentait en le voyant.

Elle le détaille alors qu’il lui fait face, se tient face à elle de toute sa hauteur. L’empêchant d’aller plus loin. Il lui répond d’un ton froid comme la banquise. Polaire au possible. La brune le détaille, ses yeux passent sur sa mâchoire crispée, sur ses yeux cernés, sur ses prunelles qui la fixent intensément. Sa réponse laisse un gout d’amertume dans la bouche de l’ancienne auror : à quoi s’attendait-elle après tout ? Après l’avoir fui comme elle l’avait fait, pouvait-elle espérer meilleur accueil ? Bien sûr que non.

Elle déglutit rapidement, recule. Un pas en arrière. Pour se laisser la possibilité de reprendre sa respiration, de remplir ses poumons d’un air qui se raréfié autour d’elle. Elle aimerait tout recommencer, lui dire, lui expliquer pourquoi il était mieux pour lui comme pour elle qu’ils se fuient, qu’ils n’essayent pas dans la voie des sentiments. Ce n’était pas pour eux, elle le savait. C’était trop douloureux. Ca faisait trop mal, elle le savait. Et plus que tout, elle ne voulait pas le perdre.

Pourtant, elle devait bien admettre que le fuir n’avait pas rendu les choses plus évidentes pour autant : son amitié avec lui s’en trouvait écornée. Abîmée par une distance qu’elle espérait légitime mais qui la rongeait de l’intérieur jour après jour. « Je … » nouveau pas en arrière, pour reprendre ses esprits, guider ses pensées vers quelque chose de plus construit, de moins brouillon. Mais elle n’y arrivait pas, bien évidemment. Cela aurait sans doute été trop facile. « C’est … » nouvelle tentative d’explication, elle se sentait de lui offrir des raisons à sa fuite même si elle n’arrivait pas à aligner trois mots.

Et dans le tourment de son esprit, dans les méandres de ses pensées elle n’arrivait plus à voir clair. Là qu’il lui faisait face elle n’arrivait plus à trouver de raisons légitimes et cohérentes. Avait-elle réagi sous l’angoisse ? Sous la peur qu’elle avait de le perdre ? Les choses pouvaient-elles être aussi simples ? Elle secoue sa tête, de gauche à droite avant d’inspirer et d’expirer à plein poumons. Pour se donner du courage, si tant est qu’il y est une infime part de volonté sous ses traits.

Finalement, elle baisse les yeux, cherchant à éviter le contact visuel avec lui – une nouvelle fuite, encore – et se contente d’un « Félicitation pour ton poste au Ministère ». C’était sincère, le Ministère avait besoin de personne de sa trempe pour pouvoir lutter sur tous les fronts d’opposition … et aider l’Ordre Noir. Aussi. Mais ça c’était plus secret. « Je suis désolée … je dois y aller », qu’elle formule en vitesse. Elle était partagée, comme si elle espérait qu’il la mette au pied du mur, qu’il réclame une explication, qu’elle libère ce trop-plein d’angoisse et d’émotion face à lui, qu’elle lui avoue la vérité, simplement. Et de l’autre côté, elle voulait qu’il la laisse s’enfuir, à nouveau. Qu’il ne la retienne pas, quand bien même elle en serait totalement désœuvrée et perdue. Choix douloureux, dans un cas comme dans l’autre.

Il s’avance vers elle, l’empêchant de fuir comme elle avait voulu le faire. Proie prisonnière de son prédateur, presque consentante comme victime. Incapable d’articuler un mot. Ses mains se posent sur ses bras, l’empêchent de s’esquiver. Elle sait qu’il la cherche des yeux et pourtant elle se contente de regarder le sol, de n’être qu’une poupée de chiffon entre ses mains. Comme un pantin dont on aurait coupé les fils. Incapable d’avancer. « Regarde-moi ». L’ordre est impérial et elle sait qu’elle ne peut s’y soustraire. Alors ses prunelles se lèvent vers lui, abysse de son âme. Dans ses iris noisette il pourrait aisément y lire sa peur et son inquiétude. Elle le détaille avec effroi, une expression de douleur sur le visage. Parce que voir sa détresse à lui en réponse à sa souffrance à elle, elle ne s’y résout pas.

Et ce dont elle ne voulait pas prendre conscience lui vient pourtant en pleine face. C’est les lèvres de l’auror qui s’exprime, lui balance la vérité. Lui demande des comptes. Lui rappelle le presque-scandale du plan cul dans le dirigeable. Il n’arrête pas là et continue, marquant clairement son incompréhension face au comportement de la jeune femme. Les larmes affluent sous les paupières de la brune, elle essaye de les ravaler, de les garder pour elle, de ne pas lui montrer la terreur que provoque l’éventualité d’une relation avec lui. Chaque mot qu’il lui laisse la percute alors qu’elle ne dévie pas – pas encore – son regard de son visage. Contemplation presque hypnotique.  

« C’est simple Elly ». Non Peverell, rien n’est simple, bien loin de là et elle ne le savait que trop bien. Combien de relations avaient-elles perdu par excès de confiance ? L’auror détaille son visage alors que la brune laisse passer une unique larme sur sa joue. Elle secoue sa tête mais ne tente pas de se soustraire à l’emprise du brun. Pour la simple raison que ses mains chaleureuses sur sa peau ravivent en elle le souvenir d’une soirée passée en sa compagnie. Et de toutes les autres où il avait été là. « J’suis prêt à me battre pour toi, mais pas contre toi », la brune frissonne face à l’aveu de l’auror.

« Tu ne comprends donc pas ? ». Yeux plein d’espoir qui se relèvent vers lui, qui l’interrogent aussi, un peu. « Il ne s’agit pas de savoir si je veux être avec toi ou non … » regard qui dévie, pour ne pas admettre la vérité, cette vérité qu’il voulait pourtant entendre. Comment lui en vouloir ? Non, elle s’en voulait à elle-même, d’avoir trop peur pour essayer. De craindre l’avenir pour eux deux si jamais ils osaient s’imaginer une vie à deux.  Et de devoir tirer un trait sur lui, sur leur amitié si jamais rien ne se passait comme prévu. Que dire du reste, de la souffrance, de la perte, de ces gens qu’elle ne reverra plus. Elle ne voulait pas qu’il entre dans cette catégorie. Jamais. Et si pour cela, elle devait vivre malheureuse, alors elle le ferait.

Le regard baissé, paupières mi-closes, elle avoue en un murmure « Je ne veux pas te perdre. Et tous ceux qui me sont proches meurent ou disparaissent … pas toi, s’il te plait, pas toi ». Elle ajoute, comme pour se défendre, pour qu’il comprenne qu’il ne s’agissait pas de lui mais bien d’elle « Tu as vu ce qui s’est passé ce soir-là, tu imagines seulement ? Ce qui aurait pu t’arriver ? ». C’était presque un cri du cœur, une douleur lancinante dans la poitrine de l’ancienne auror qui n’avait de cesse de repasser ladite soirée dans son esprit. Mécanisme complexe de défense pour ne plus souffrir … alors que la souffrance, pourtant, est belle et bien là.

Il semble que l’explication donnée par la jeune femme ne soit pas suffisante au gout de Peverell, il reformule « Tu ne veux pas me perdre donc tu m’évites ? ». Il pousse un soupir et elle aussi. Comme une réponse silencieuse. L’une de ses mains remontent le bras de la Magenmage, frôle son épaule, rejoint son cou puis sa joue. Elle ferme les yeux à ce contact, comme si soudainement la chaleur revenait dans son corps, comme si à nouveau il y avait quelque chose pour rythme sa vie.

Un sourire se dessine sur le visage de Peverell alors qu’elle le contemple, qu’elle le regarde, qu’elle attend, peut-être, la suite des événements. Il se risque à une blague alors qu’elle n’a pas le cœur à rire, ni sourire, d’ailleurs. Elle reste là, prisonnière de ses tourments, de ses ombres qui la dévorent et de ses démons incertains. Sans qu’elle ne se rende compte de quoique ce soit, il l’attire à lui, l’enserre dans ses bras. Bras ballant, corps latent, elle ne bouge pas, se laisse faire, se laisse mener. Marionnette sans vie, presque sans saveur.

Il continue pourtant, la rassure du mieux qu’il peut. Elle veut y croire, aimerait se laisser tomber dans la chaleur qu’il lui offre. Mais dans le tombeau des mots qu’il lui laisse, elle ne retient qu’une seule parole, symbole de promesse et d’avenir. « La seule chose dont j’ai besoin c’est toi », qui résonne à ses oreilles, encore et encore. Elle n’écoute pas le reste, non pas parce qu’elle s’en moque mais surtout parce qu’il n’y a rien d’autre qui perfore ses tympans aussi forts que ces mots-là.

Elle relève son regard vers lui, les yeux humides de toutes ses pensées contraires qui vont et viennent dans son esprit. Des larmes coulent alors qu’elle tentait de résister à ce flot de pleurs qu’elle sentait venir. Geste rageur de son bras pour essuyer les perles salées qui avaient coulé sur ses joues. Et dans le mouvement, sa main frôle le corps de l’auror, la pulpe de ses doigts touche le torse du jeune homme, provoquant une décharge électrique dans tout le corps de la brune.

« Je » qu’elle marmonne alors qu’elle cherche une nouvelle fois ses mots. Et sa main, restée en suspens entre elle et lui, se pose finalement sur son torse. Répétition d’une action déjà faite alors que ses yeux sont toujours verrouillés dans les émeraudes de Peverell. « Je suis désolée, vraiment ». Pour elle c’est simple, elle s’excuse de la distance, de sa fuite, de son égarement alors qu’elle aurait préféré commencer cette nouvelle vie à deux, loin de ses problèmes et de ses peurs. Dans les bras d’Azaël. Mais ce dernier le comprendrait-il de la même manière ?

La main de Peverell se superpose sur celle de la brune, sa chaleur se répand sur la peau de la jeune femme, qui frissonne à ce contact. Il penche également sa tête sur le côté, lui donnant un petit air craquant auquel elle ne résiste pas, se mordant la lèvre inférieure dans un geste inconscient. Elle ne le quitte pas des yeux, le fixant intensément alors qu’il lui demande une précision. Comme s’il n’osait croire à des excuses pour la fuite, ou plutôt comme si l’incertitude demeurée, de savoir pourquoi elle s’excusait. Si c’était de sa fuite de ces dernières semaines ou pour un éventuel abandon à venir.

De son côté il lui confie qu’il ne compte pas la laisser faire, sous entendant qu’elle ne s’enfuirait sans doute pas aussi facilement que la première fois. Au travers de ses larmes, qui coulent sans discontinuer, elle ne peut qu’observer la sincérité de ses paroles, son regard qui transcende tout lorsqu’il pose ses yeux sur elle. Deux aimants qui se retrouveraient toujours attirés l’un par l’autre, par la force des choses.

A vouloir l’éviter à tout prix, elle devait bien se rendre compte qu’elle s’était rendue malheureuse, oui, mais qu’elle l’avait aussi rendu malheureux. Tout en lui le criait, elle ne pouvait voir que ça. Se rendre à l’évidence qu’à l’esquiver comme elle l’avait fait, elle les avait plongés tous les deux dans une spirale infernale, un cercle vicieux dans lequel aucun des deux ne pouvait s’en sortir sans l’autre. Soupir léger qui s’extirpe de ses lèvres alors qu’elle continue de le fixer. Combien de minutes passèrent ainsi sans qu’elle ne réponde à sa question ? Alors que leurs regards étaient rivés l’un à l’autre ? Elle serait bien incapable de le dire.

« Désolée … d’avoir fui ». Un murmure presque inaudible qui s’extirpe de ses lèvres alors qu’irrémédiablement son regard le fuit encore, dévie. Pour ne pas lire la déception dans ses yeux, pour ne pas y voir la douleur qu’elle avait elle-même installé dans ses émeraudes. Mais à ce jeu-là, malheureusement, elle finit par perdre : le regard de Peverell ne trompe personne. Le murmure inaudible de la Magenmage n’est pas parvenu jusqu’à lui, alors elle insiste. Se rapproche légèrement de lui, s’autorisant à respirer les effluves de son parfum, à observer le moindre grain de sa peau qui s’offrait sous ses yeux. Pour glisser à son oreille un « Je suis désolée de t’avoir fui de la sorte » accompagné par des larmes qu’elle ne pouvait plus contenir. Douleurs des semaines précédentes où elle avait pensé le perdre pour le préserver, pour se préserver aussi.

Au bout du couloir un toussotement se fait entendre, et aussitôt la Magenmage remet une certaine distance avec le Peverell. Elle-même se racle la gorge. La surprise est lisible dans son regard, bien entendu. Elle ne pensait pas être surprise alors qu’elle était en pleine discussion avec Peverell. Comme une adolescente prise sur le fait. Le regard de biais, elle s’excuse encore d’un « Désolée … Je sais pas si tu veux que ça se sache ou non enfin … j’en sais rien ». Il est aisé de sentir dans les mots de la brune qu’elle est totalement perdue et que l’absence d’Azaël des dernière semaines à laisser quelques douleurs dans ses chairs.

Pourtant, lorsqu’elle agrippe la main d’Azaël il n’y a plus aucune hésitation, seulement l’empressement de se retrouver en vase clos avec lui, pour pouvoir continuer à discuter plus tranquillement. Quand elle rentre dans la salle de réunion, suivi d’Azaël, elle lâche quasi aussitôt sa main et reprend sa distance de sécurité, comme si elle cherchait à se protéger de ce qu’elle pouvait ressentir pour lui. Comme si elle cherchait à éviter les pulsions et désirs qui naissaient quand il était à proximité.

Une affiche magique à placarder partout ? Elle a bien entendu ? Il parle de son frère. Oui, c’est sûr. Pour ce genre d’idée Arty serait le premier à suivre son meilleur ami. Elle roule des yeux. Elle préfère ne pas répondre – de peur que la réponse ne soit pas à la hauteur des espoirs de Peverell. Il y a tout un monde entre les deux, un gouffre qu’elle a elle-même creusé. C’est terrible en vérité, cette sensation de mal-être qui oppresse sa poitrine.

Et il semble qu’Azaël soit prêt à en jouer. Un air de chien-battu passe sur son visage alors qu’il demande un baiser de réconciliation. La Magenmage dodeline de la tête, comme pour se donner le courage de son prochain discours, de ses prochains mots. Le voir là, affublé de cette expression, la laisse dubitative. Sorte de contemplation comme s'il était devenu une œuvre d’art qu’elle voulait passer son temps à observer. Elle reste à distance, les larmes ont fini par cesser de couler. Ses manches essuient ses yeux, geste absolument pas glamour mais qu’importe. Derrière ses mains, elle continue à le regarder, à le jauger peut-être. Ne faisait-elle pas une erreur ?

Malgré tout, malgré ses doutes, malgré ses angoisses. Elle se rapproche. Comme une adolescente prise à son propre piège. Arrivée face à lui, elle garde une distance raisonnable, refusant d’entrer dans son espace vital. Nouveau jeu auquel ils semblaient se vouer. Ses yeux ne le quittent pas, détaille son visage crispé, sa mâchoire dotée d’une barbe de quelques jours, taillé, entretenue. La contemplation continue sur les yeux de l’auror, sur ses cernes en dessous. Sur l’arrête de son nez. Sur ses lèvres charnues qu’elle rêverait d’embrasser. Pour camoufler son désir, ses pulsions qui naissent à son côté, elle se mord la lèvre inférieure. Refusant de céder.

Et pourtant, comme une attraction charnelle dont elle ne saurait définir l’origine, elle s’avance encore. Très proche de lui – trop sans doute – sans pour autant le frôler ou le toucher. Comme si elle attendait l’autorisation. Comme si elle voulait profiter de ce temps avec lui, à ses côtés. Simplement. Elle ne sait pas comment s’y prendre, voilà l’entière vérité. Parce qu’elle est rongée de doute et d’inquiétude, parce qu’elle a l’impression qu’on lui enlèvera ce bonheur dès lors qu’elle y touchera du bout des doigts. Pourtant son visage s’avance légèrement vers lui, et dans une douceur infinie elle dépose ses lèvres sur les siennes.

Baiser furtif, quelques secondes tout au plus et elle s’éloigne de lui. Tiraillée entre l’envie dévorante qui ronge ses entrailles et sa raison. Faible conscience qui tente de raisonner l’esprit de la brune. Sans succès pour l’instant vu comment son regard brille de mille désirs. Finalement, elle demande d’un ton presque espiègle « Satisfait ? ».

Il se délecte de la situation, affiche un sourire amusé alors qu’il lui confie qu’il n’est pas satisfait. Elle, de son côté, affiche une mine boudeuse, l’air quelque peu effrontée. Comme si elle n’aimait pas sa réponse. Alors qu’il n’en est rien. Elle sait qu’il réclame davantage, comme son corps à elle l’appelle, elle sait qu’il en est de même pour lui. Que chaque parcelle de sa peau vibre à son contact. Comme un appel pour céder à la tentation. Comment refuser, en même temps, ce qui lui fait envie ? Cette chaleur qui se répand à chaque contact physique ? Ce trouble qu’il crée à chaque regard ?

Il se saisit de sa main et l’attire à lui, dans un geste qu’elle ne refuse pas, se laissant amener, porter contre son torse. Comme si elle avait attendu ça depuis des jours et des jours. Leurs lèvres se rencontrent à nouveau. Avec douceur et intensité, tel et le feu et l’eau qui se rencontrent, fusionnent pour ne faire qu’un. Ravage des âmes alors que leurs corps jouent une délicate symphonie. Alors que leurs langues se rencontrent, s’emmêlent à nouveau avec virulence et désir. Elle se sent défaillir, colle son corps contre le sien, comme pour lui réclamer davantage encore.

Pourtant il recule de quelques pas. La laisse presque pantelante après un tel baiser, le regard hagard marquant son incompréhension. Dans ses entrailles grondent une envie de plus, un besoin de le sentir contre elle, tout entier. Pourtant, elle ne bouge pas. Se contente d’hausser les épaules lorsqu’il dit qu’il est davantage satisfait désormais. Elle non, clairement, et dans son regard il est aisé de lire son insatisfaction personnelle.

Elle ne le lâche pas du regard alors qu’il lui indique qu’il a hâte de travailler avec elle, prenant un ton qu’elle ne lui connait pas – presque pompeux – ce qui la fait sourire, légèrement. Elle, elle est perdue dans le souvenir de ce baiser, ses doigts effleurant ses lèvres, comme un besoin d’encore auquel elle refuse de céder. Pourtant, elle répond d’une voix distante « Hâte que je ne partage pas Mister Peverell », énième pique joueuse pour le provoquer. « D’ailleurs, je me demande vraiment ce que vous faites ici ». Sourire joueur alors qu’elle se détourne de lui, qu’elle lui tourne le dos pour regarder les fenêtres et le faux paysage qui s’y offre. Magie du Ministère. « Franchement, je ne suis pas sûre que vous puissiez être d’une quelconque utilité au Ministère ». Son regard pétille de malice, son corps a des envies d’encore qu’elle sait inavouables. Alors quoi de mieux que de le pousser dans ses retranchements ?

TW : ça s'barre en live c'était pas prévuuu désoooooo

Des secondes qui s’égrènent alors qu’elle ne le regarde plus, alors qu’elle s’est détournée de lui comme si de rien n’était. Quelques minutes qu’elle s’est lancé dans ce jeu avec lui. A peine revenu, et voilà déjà à quoi ils en étaient rendus. A se pousser dans leurs retranchements respectifs. Rapidement, un mouvement furtif se fait sentir derrière elle, dans son dos. Effluve d’un parfum qui monte à son nez et d’un frisson qui laisse sur sa peau une chair de poule incontrôlable. Il inspire dans ses cheveux, créant pour l’ancienne auror une nouvelle valse d’émotion qu’elle peine à contrôler. Elle vacille un peu, sur une jambe, sur l’autre, pour résister. Pour ne pas se retourner et embrasser langoureusement l’auror qui se tient derrière elle.

Ses mains se referment là, juste en bas. Provoquant un nouveau spasme dans le corps de la brune. Le souffle du jeune homme sur sa peau provoque en elle une nouvelle montée de désirs, d’adrénaline aussi. Elle se rendait seulement compte qu’elle était prête à tout pour lui. Qu’elle avait cherché à fuir l’inévitable. Désormais qu’il était là, contre elle, elle ne voulait plus s’en défaire. Comme un trésor trop précieux pour être exposé, montré. Garder secrètement, jalousement. Voilà exactement comment elle voyait Peverell désormais.

L’une de ses mains se jouent baladeuse, voyageuse experte d’un terrain déjà conquis, acquis, soupir d’expiation alors qu’elle le laisse encore guider le voyage incandescent. Tel Icare qui vole trop près du soleil, eux voyagent trop près de l’exaltant. Trop près d’une passion dévorant les sens. Ils finiraient damnés pour ça, c’était sûr. Sa langue se joue d’elle, ses dents abîment ses chairs, laissent trace de son passage, marque son territoire. Elle sourit, se retient de rire même parfois lorsqu’il se révèle trop chatouilleux.

Il la fait tourner, volte-face alors que son regard trahit l’envie qui la gouverne. Brûlure ardente de ses sens, de sa peau sur la sienne. Quand il parle de son corps de rêve, une lueur s’allume dans le regard de la jeune femme, énième étincelle qu’il allume avec ses gestes, avec ses mots. Elle ne peut que soupirer devant la vérité du propos : il a un corps de rêve, et elle en rêve nuit après nuit. De cette soirée au dirigeable où ils avaient laissés leurs raisons à la porte de la cabine.

Nouvelle salve de baiser à laquelle elle répond avec ardeur. Langue qui se lie et se délie au rythme d’une danse effrenée et enivrante avec l’auror, pas de demi-mesure possible entre elle et lui, elle le sait. Plus il la touche et plus elle veut être touchée. Soupir alors que ses yeux demi-clos réclame presque déjà des encore au Peverell. Jeu dangereux. Elle en avait pleinement conscience.

Finalement, il s’écarte presque un peu. Légérement. Pour lui lancer une dernière pique, la mettre au défi d’aller plus loin, peut-être ? Sourire coupable sur les lèvres de la Magenmage. Qui lui renvoie l’ascenseur aussitôt « Mince, tu recule déjà ? », langue qui claque sur le palais avant de passer furtivement sur ses lèvres. Elle fait quelques pas, obligeant Peverell à reculer le long d’une table de la salle de réunion. Ses mains qui cherchent, tâtonnent, profitent du passage pour admirer le corps de l’auror. « Hmmm » qu’elle laisse s’extirper de ses lèvres, une moue mutine sur le visage.

« Tu veux vraiment jouer à ça ? ». Elle n’attend pas la réponse, laisse quelques baisers le long de la jugulaire du brun, avant de trouver l’objet de son désir. Dans l’une de ses poches intérieures, elle trouve sa baguette, qu’elle extirpe avec délicatesse devant les yeux interrogateurs de son amant. Un faible « Collaporta » à destination de la porte. « Simple précaution pour ne pas être dérangés … » qu’elle abandonne en murmure alors qu’elle dépose un baiser à la commissure de ses lèvres. Elle dépose l’arme de l’auror, devenue inutile, sur la table derrière eux.

Elle veut jouer avec lui, s’amuser. Echanger une part de plaisir aussi, peut-être. Le regard allumé d’une lueur joueuse, elle le dévore des yeux avant de laisser ses mains le parcourir, départ de sa joue, descente vers son cou. Elle profite du passage pour l’embrasser langoureusement. Avant de laisser à nouveau ses mains à l’exploration de l’auror. Veste de l’homme qui valdingue à distance. Vêtement devenu fort peu utile pour l’activité à laquelle les deux sorciers allaient s’adonner. Elle s’accroupit face à lui, le regarde d’un regard particulier. Celui qui dit qu’elle avait bien l’intention de relever tous les défis qu’il lui lancerait. « Et toi, t’es prêt à jouer ? » qu’elle lui lance alors qu’il la toise de toute sa hauteur.