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Harry Potter 2005 :: ~¤~ Créations personnelles ~¤~ :: Ecrits des membres :: Concours
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[Concours RPG] Il était une fois - Aya Lennox
Sariel Fawkes
Sariel Fawkes
Serpentard
Serpentard
Année à Poudlard : Diplômé(e)

Matière optionnelle : Médicomagie

Spécialité(s) : - Permis de Transplanage


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[Concours RPG] Il était une fois - Aya Lennox
Sariel Fawkes, le  Dim 12 Aoû - 14:38

Très chère Sarah


Il était là, tous les jours, posté dans la rue, des livres exposés à ses genoux. Personne n'en achetait jamais. Personne ne s'arrêtait jamais devant lui. Il semblait invisible aux yeux des rares badauds qui continuaient leur route.
Cette rue-là, on ne l'empruntait pas souvent. C'était surtout pour rejoindre les deux artères principales de la ville, lorsqu'on était pressé. Mais elle, elle vivait là depuis quelques mois. L'immeuble n'était pas très loin de la faculté dans laquelle elle s'était inscrite, et les loyers étaient moins chers quand la façade ne payait pas de mine.

Chaque matin, elle sortait de chez elle et le saluait. Mais il ne la regardait pas. Tous les soirs, en rentrant, elle s'arrêtait quelques instants en se demandant s'il avait un quelque part où aller. La question était peut-être bien naïve, mais la jeune fille s'inquiétait. Il était vieux, semblait fatigué, et ne bougeait jamais. Elle souhaitait, plus que tout, que chacun ait un quelque part où aller.
Elle lui avait proposé, à plusieurs reprises, de l'héberger un peu. Lui avait apporté à déjeuner, à boire. Mais toujours, les aliments demeuraient immaculés de toute faim, les tasses remplies ou parfois simplement renversées. N'éprouvait-il donc aucun appétit ? Aucune soif ? Etait-il au moins toujours vivant ?

Le plus étrange était qu'elle semblait être la seule à le remarquer. C'était comme s'il faisait partie intégrante de son propre paysage, et qu'il n'avait aucune once de réalité dans celle des autres. Le vieil homme était un oublié. Ce soir-là, en se couchant, Sarah se dit qu'elle n'avait jamais jeté un œil aux livres qu'il proposait.
- Demain, je le ferai.


*

Au lointain, dans les profondeurs de la ruelle, des pas brisèrent le faux silence qui régnait toutes les nuits dans la ville. Plus haut, les immeubles s'endormaient, les voitures se garaient petit à petit, ramenaient leurs propriétaires chez eux après de longues journées de travail ou des soirées improvisées, rendez-vous trop attendus.
Parfois, il y avait d'autres mendiants qui s'arrêtaient, s'endormaient à côté de l'évacuation d'un vide ordures. Ils ne restaient jamais longtemps. Apparemment, ils n'arrivaient pas à dormir, ici. Quelque chose semblait clocher, dans cette ruelle.

Les pas s'approchaient de plus en plus, accompagnés d'un troisième bruit, calqué sur le rythme de la démarche. Un homme, au cliquetis étrange dès qu'il faisait un geste, s'arrêta devant le mendiant et s'appuya un instant sur sa cane. Son visage restait caché dans la pénombre de son chapeau, mais le vieil homme n'avait pas relevé les yeux vers lui. Il fixait toujours l'horizon, semblait percevoir bien plus que la simple poubelle à quelques mètres d'eux.
La silhouette sombre ricana soudainement, puis s'abaissa pour poser un genou au sol, afin de s'imposer à la vue du vieillard. Celui-ci ne semblait pourtant toujours pas le voir. Il avança un bras au cliquetis désagréable, inconnu au genre humain, et posa sa main mécanique sur l'un des livres exposés. Derrière son monocle, un œil perçant déchira la nuit, accompagné du deuxième, nu, mais tout aussi vif. Soudainement, dans un geste de la main, le livre prit feu.
- Le prochain sera le dernier.
Le vieillard ne répliqua rien, mais un rire accompagna la fuite de son visiteur. Le feu s'était éteint, ravalé par le livre.


*

Une profession de foi à laquelle on n'avait jamais cru, une robe blanche constellée de roses laissée au risque d'un cierge allumé dans une main gantée. Un mariage, au premier plan devant un couple qui s'embrassait. Le baiser sur la joue d'une meilleure amie qui n'en était plus une. Des tas de photos, refuges d'une vie, constellaient le mur de la petite chambre étudiante de Sarah. Au-dehors, un lampadaire adjacent éclairait un vieux portrait de sa mère, sûrement pris au lycée.
Lorsqu'elle l'avait loué, le studio était dénué de vie, sans personnalité. Elle était assez fière de ce qu'elle avait réussi à faire. Certes, il avait suffi d'une journée pour décorer ces quelques mètres carrés mais aujourd'hui, elle parvenait à s'endormir en se considérant chez elle.

Sarah était en proie au sommeil depuis quelques heures, mais cette nuit-là, Morphée semblait se dérober à elle. Elle n'avait pourtant pas beaucoup mangé ce soir-là, avait même pris un bain et bu une tisane de relaxation avant de se plonger dans un roman qu'elle appréciait, pour mieux s'endormir. Mais rien à faire. Elle se tournait et se retournait dans son lit comme un diable. Il ne faisait pourtant pas trop chaud. Encore moins froid pour une soirée d'hiver.
Après quelques minutes, elle le sentit s'amarrer. Ses paupières tombaient sur ses orbites, ses muscles se détendaient. Son exemplaire Du côté de chez Swann tomba sur les coussins qu'elle avait laissé au sol. Mais alors que le repos s'imposait à elle, un bruit dérangea le calme de la chambre. Un bruit mécanique.

Telle une furie, Sarah se redressa dans son lit et observa autour d'elle. Qu'est-ce que c'était ? Son cœur battait à la chamade et ses yeux grands ouverts sondaient la pièce pourtant vide. Après quelques secondes, durant lesquelles le bruit ne s'était plus manifesté, Sarah se rendit compte que le bruit provenait du petit jouet mécanique qu'elle avait trouvé l'après-midi même, sur une brocante, dans la rue principale. Elle l'avait trouvé fort sympathique mais maintenant, il semblait bien plus inquiétant, même s'il ne bougeait pas dans sa main. La jeune femme le reposa sur son meuble et recula jusqu'à son lit pour s'asseoir dessus, ses prunelles ne lâchant pas le petit ours. Alors qu'elle dériva pour jeter un œil à l'horloge, le bruit se réitéra et Sarah braqua ses pupilles paniquées vers le jouet.
Mais il était trop tard. Soudain, le sommeil l'appela plus intensément encore et Sarah s'effondra sur son lit.

L'horloge venait d'afficher 3h15.



*

Tout autour, des oiseaux piaillent dans l'espoir d'un nouveau matin. Sarah ouvre les yeux sur un décor pour le moins étrange. Les cimes lointaines d'arbres, apparemment fiers de leurs racines tout autour d'elle, se rejoignent dans un ciel où quelques étoiles persistent encore.
Sarah ne ressent rien, ne perçoit rien de plus que ce qu'elle voit. Lentement, elle se redresse, un peu dans le coaltar, et découvre autour d'elle une large forêt silencieuse. Elle a à peine remarqué les feuilles rampantes qui habillent le sol de ce lieu pour le moins inattendu.

Plusieurs questions bouleversent son esprit, alors qu'elle se redresse et s'essuie passablement. Déjà, comment a-t-elle bien pu atterrir ici alors que quelques...
Instants ? Heures ? Elle ne sait pas mais... Comment a-t-elle bien pu atterrir ici ?
Peut-être est-elle somnambule ? Le stress de ses études lui faisant faire n'importe quoi, cela se serait répercuté sur ses nuits. Ou alors, avant s'endormir, l'idée d'une ballade lui aurait effleuré l'esprit et elle se serait perdue dans une forêt, voisine de la ville.
D'après ses souvenirs pourtant, il n'y a aucun endroit semblable à celui-ci près de chez elle.

Troublée mais étrangement sereine, Sarah décide de sortir de cette forêt et commence alors à marcher. Tout droit, pour commencer. Ces bois ne semblent pas désépaissir, et aucun endroit plus lumineux ne semble vouloir la guider vers une quelconque sortie. Après de longues minutes qui ne lui paraissent pourtant rien, Sarah aperçoit, à sa droite, une petite ouverture dans les ramages d'un sous-bois.
En poussant les feuilles, elle découvre un lac. Et plus loin, au centre de ce lac, un château baigné par l'éclat d'une aube paisible se dessine. Sarah n'en croit pas ses yeux. Elle n'a jamais entendu parler de ce château ! Pourtant, il semble bien lui dire quelque chose...

Quelque part en contrebas, la jeune femme remarque un ponton auquel est amarré une petite barque. Se disant qu'elle n'a peut-être pas le choix, Sarah décide de l'emprunter pour rejoindre l'autre rive.
La traversée se déroule sans encombres, les eaux gardant leur calme limpide alors que la jeune exploratrice fend la surface sur son embarcation. Le temps ne semble pas passer du tout, puisque déjà, l'autre côté est à portée et les pieds de Sarah foulent les herbes hautes.

A l'ombre fraîche de quelques petits arbres avoisinant le domaine, Sarah observe le château. Au centre, une tour s'échappe vers le ciel et semble faire office de chapelle. Mais en explorant les lieux, elle la devine très vite abandonnée, les bancs ainsi que l'autel et les statues étant recouverts de draps blancs. En s'approchant lentement du chœur de l'édifice religieux, Sarah découvre, au pied des marches menant à la sacristie, un petit Missel abimé.
En tournant les pages, elle se rend vite compte que celui-ci est rédigé en français. Les sourcils froncés, elle tente :
- Il y a quelqu'un ?
Mais personne ne vient rompre le silence, à part le roucoulement d'un couple de colombes ayant élu domicile dans un recoin de la chapelle.

Le reste du domaine consiste, apparemment, en une grande bâtisse de maître et une seconde, plus modeste et à l'autre extrémité de l'îlot, ressemble à une petite exploitation vide. La jeune femme, suivant la route de sa propre logique et de cet instinct qu'elle ne se connait pas, décide d'explorer la maison avant toute chose, afin de déterminer si quelqu'un y habite toujours. A cette heure-ci, les propriétaires sont peut-être toujours au lit, mais sûrement plus pour longtemps.
En s'approchant, Sarah découvre une porte entrouverte qui mène sur un corridor poussiéreux. On repassera pour rencontrer des autochtones : la grosse toile d'araignée, très blanche et grossièrement épaisse qui masque l'entrée prouve assez bien que personne n'est entré ici depuis quelques temps. Peu enjouée à l'idée de déranger le travail de la bâtisseuse qui semble s'y être donnée du mal, Sarah escalade une fenêtre pour tomber sur un salon meublé avec un goût et dont les meubles sont également recouverts de draps blancs. Au sol, un journal indiquant la date du 14 juin 1936 lui tape à l’œil. Plus ou moins 70 ans.
- Plus personne n'habite ici depuis longtemps. Mais où suis-je donc ?
La même béatitude que tout à l'heure la gagne. Un Missel français dans une chapelle. Maintenant, la maison principale du domaine, inhabitée. Est-elle réellement en France, et tombée sur une demeure qui n'a pas connu une once de vie depuis très longtemps ? Ou bien s'agit-il d'un rêve ?
Sarah, pour le moins absolument pas tourmentée par ces récentes découvertes, décide de quitter le salon pour traverser le corridor et tomber sur une série d'autres pièces à vivre. Ce n'est qu'en traversant la cuisine, située tout au nord de la maison, et en découvrant un petit garde-manger, que la jeune femme rencontre enfin une source de vie.
Un chat noir, calme et impérieux, fait sa toilette au milieu des étagères vides.
- Qu'est-ce que tu fais là, toi ? s'exclame Sarah en se baissant pour cajoler la créature. Tu as été abandonné ici ?
Le félin se laisse approcher, mais pas caresser. Il observe Sarah de ses yeux intenses, dont le pelage de l'un des deux, un peu plus clair, forme un cercle presque parfait. Alors que Sarah approche sa main de sa petite tête duveteuse, l'animal s'échappe et prend la fuite vers le couloir.
- Attends !
Sarah, le souffle déjà court, suit le chat qui emprunte les escaliers en piteux état de la demeure. L'ascension, effectuée sans grand tourment, se solde par un nouveau couloir, très faiblement éclairé cette fois-ci, aucune fenêtre n'étant disponible dans cette petite pièce carrée qui semble desservir cinq autres portions de la maison. Par contre, pas une trace du chat...
- Minou ?
Perdue dans cette obscurité, l'exploratrice se met à réfléchir. Si cette maison est abandonnée depuis longtemps, alors ce chat est anormalement vieux. Ou alors, quelqu'un d'autre est venu entretemps et a abandonné son chat ici, ou l'a oublié. Dans tous les cas, sa présence ici demeure étrange.
Pauvre créature... Sûrement solitaire depuis quelques temps, elle doit être effrayée par les humains, se dit Sarah.

Et pourquoi ce sentiment de tranquillité étrange ne la quitte donc pas ?

Quelque peu étourdie, pour la première fois depuis ce matin, Sarah se redresse du mur contre lequel elle s'est appuyée et tente d'ouvrir la première porte qu'elle voit. Fermée. Yeux grands ouverts tentant de percer au mieux le voile de ténèbres face à elle, elle s'approche de la seconde porte. Ouverte, mais donnant sur la salle de bain, qui ne présente pas vraiment d'élément notable car tout est recouvert de linges, à part une vieille baignoire qui a du servir de nid à un autre couple d'oiseaux, à en juger par les restants de paille laissés dans son fond.
La jeune femme quitte la pièce en la laissant au préalable ouverte, afin d'avoir un peu de lumière. Puis, poursuit sa route vers la troisième porte qui s'ouvre sur deux chambres en enfilade. La première, apparemment celle d'un couple, introduit celle d'un enfant, à en juger par la taille du lit. Mais ce qui frappe Sarah, c'est la multitude de jouets laissés là. Des jouets mécaniques, qui plus est, peuplant la pièce de leurs petits rouages inactifs depuis des décennies. Quelques boites à musique, empilées les unes sur les autres. Des constructions inachevées au sol.
- C'est comme si...., entame Sarah.
- Comme s'il n'était jamais vraiment parti.
Une autre voix achève les idées de la fille. Et Sarah, le cœur au bord des lèvres, bouleversée et par l'intrusion soudaine, et par la découverte, se retourne brusquement.
Un homme, assez jeune, aux yeux vifs et perçants, l'observe dans l'encadrement de la porte. La moitié de son visage est cachée par un masque en cuir, ce qui explique en partie sa voix étouffée. Mais Sarah ne remarque qu'à peine le bras mécanique, le chapeau, la canne. Non. Tout ce qu'elle voit, ce sont ces yeux, qui la lisent, qui la dévisagent.
- Où suis-je ? commence-t-elle sans préambule. Qu'est-ce que je fais ici ? J'étais, j'étais dans ma chambre et... et...
Elle s'arrête, soudainement essoufflée, et le jeune homme la rassure. Pourquoi perd-elle soudainement ses moyens ?
- Ne t'en fais pas. Tu ne risques rien. Suis-moi, et je te montrerai comment t'échapper d'ici.

Il n'y a pas vraiment besoin de questionner sa confiance. Sarah la lui offre directement. Et alors qu'il lui tend sa main mécanique, un courant froid la parcourt, raidit petit à petit chacun de ses gestes.
Tant pis, se dit Sarah. Si c'est le seul moyen.
Dans leur traversée de la maison, les choses changent. Les choses bougent. La chambre du petit garçon retrouve ses couleurs, la même vie qui l'habitait autrefois. Le son d'une boîte à musique, laissée ouverte au sol, envahit l'espace. Le lit de la chambre des parents se refait tout seul. Les draps, lissés et époussetés, s'accordent parfaitement à la taie d'oreiller et la poussière au sol semble aspirée par l'espace-temps. Le corridor, auparavant assombri, retrouve sa clarté grâce aux appliques posées sur les murs. La salle de bain, quant à elle, n'a pas le temps d'être explorée. Mais le bruit d'une eau limpide s'écoulant dans le bain berce leur descente des escaliers.
- Comment ? chuchote Sarah à ce nouveau compagnon. Est-ce que c'est de... de...
Le jeune homme ne répond pas, se contentant d'accompagner la jeune fille dans le couloir du rez-de-chaussée. Couloir qui lui aussi, a repris toute sa vie. La toile d'araignée n'est plus. Les éraflures du temps et des intempéries, sur la porte d'entrée entrouverte ont été remplacées par une peinture bleue toute fraîche. Au-delà du regard de Sarah, porté vers le salon, les draps blancs n'existent plus. Mais persistent les nuances pastels de meubles de premier choix. C'est comme si toute la vie, laissée pourtant aux dérives du temps dans cette maison, a repris le dessus. Sarah, émerveillée, s'enthousiasme de voir à quel point le passage de ce nouvel ami a su changer les choses. Qui est-il ?
- Sarah ? lance-t-il, calme, reposé sur sa canne.
- C... Comment connaissez-vous mon nom ?
Troublée, elle s'arrête dans sa contemplation et le dévisage.
- Sarah, il est l'heure de dormir, susurre-t-il pour seule réponse, alors que la jeune fille s'écroule sur le sol.


*

Les gazouillis des oiseaux avaient repris, et le jeune homme au monocle observait le dessin des arbres, plus loin, en contrebas de la chapelle, bercer la rive du lac endormi. Pris d'une quiétude soudaine, il inspira longuement et jeta un œil au ciel qui s'éclairait, à l'aube de cette nouvelle journée. Ici, le temps était indéfinissable. Le commencement semblait sans fin.
- Elle est prête. Vous vous êtes surpassé, cette fois-ci, lança le vieux mendiant, dont le visage avait récupéré toute la vie échappée à l'ombre de cette triste ruelle.
Il était revenu d'entre les arbres, et ouvrit la voie, d'un geste de bras, à son acolyte.
- J'aime finir les choses en beauté, déclara simplement James en rejoignant la rive d'une démarche dynamique, dans un cliquetis indéfinissable.

Les cheveux bruns de Sarah encadraient parfaitement son visage paisible. Dans un sourire attendri, l'homme caressa un instant la pulpe de ses lèvres bleutées et entrouvertes, avant d'ajouter entre les mains froides de l'endormie un bouquet de fleurs sauvages. Puis, en se redressant, James poussa simplement la barque vers les eaux du lac, avant d'ôter son chapeau.
- Passe une belle nuit, Sarah.


*

Le réveil avait été difficile. Un manque de lucidité caractéristique des nuits sans véritable repos lui retomba sur le crâne, alors que Sarah se rinçait la bouche dans le lavabo de sa kitchenette.
- Quel drôle de rêve, murmura-t-elle en allumant la cafetière.
Tout en attendant que le café ne coule, la jeune étudiante entreprit de ranger son studio. Elle secoua un peu les draps, avant de les reposer convenablement sur son canapé-lit, et disposa avec soin les coussins qu'elle avait laissé au sol. Puis, elle partit à la recherche de son exemplaire de Marcel Proust, qui semblait avoir tout bonnement disparu.
- Bon, j'ai pas le temps pour ça, déclara-t-elle après avoir regardé sous son lit et sur son étagère de livres.

Dans la rue, l'hiver faisait rage, en totale contradiction avec la tiédeur qu'elle avait pu ressentir hier soir. Sarah disposa son cache-nez convenablement, avant d'apercevoir le mendiant, toujours à la même place. Très vite, sa mémoire lui remit sa résolution d'hier. Il fallait qu'elle jette un œil à ce qu'il vendait.
- Bonjour, murmura-t-elle, intimidée, alors que le vieillard regardait toujours vers un ailleurs dont elle ne semblait pouvoir disposer.
Les livres n'avaient pas grand intérêt. Il s'agissait soit de polars à succès, soit de classiques, ou encore un livre de cuisine ou deux. Sarah fronça les sourcils en découvrant cependant son exemplaire du roman Du côté de chez Swann. Il n'y avait pas à dire, c'était exactement le sien. Elle ne se risqua pas à demander si elle pouvait et dévisagea le vieil homme, passablement irritée.
- C'est mon livre. Je le lisais encore hier soir. Comment l'avez-vous trouvé ?
- Ce qui est exposé ici n'appartient à personne, répondit-il, simplement, sans pour autant jeter un œil à Sarah.
Mais Sarah, pas décidée pour un sou à lâcher prise, s'emporta, répétant à tout va que c'était son livre, qu'il était entré chez elle pour lui voler. Là, un passant pour témoin. Elle tenta de l'arrêter mais il persista, continua sa route sans daigner la voir, sans même daigner la sentir.

- Qu'est-ce qu'il se passe ? chuchota soudainement Sarah, alarmée.
Rien n'allait. Rien. Ni le temps, qui semblait la prendre de court, ni l'atmosphère qui avait soudainement changé. Cette température glaciale qui lui faisait, à elle seule, grincer les dents car personne d'autre ne semblait se soucier du froid. Les passants ne portaient pas d'écharpes. Encore moins de vestes.
Toujours en proie à la panique, la jeune femme sortit son téléphone portable et composa le numéro de ses parents. Après quelques sonneries, quelqu'un décrocha enfin.
- Ma-
- Ce que vous faites n'est absolument pas drôle, siffla la voix de sa mère au bout du fil.
- Maman, maman ! C'est Sarah. Je crois que...
- Comment avez-vous trouvé ce téléphone ? Qui êtes-vous ?!
- Maman... ?
- Écoutez, si vous ne raccrochez pas tout de suite ce téléphone, je... Ma fille est décédée il y a trois mois, vous entendez ? Ma fille est décédée et vous, vous...
La voix se brisa et bientôt, la communication fut coupée.
- MAMAN !
Sarah, livide, dégagea son téléphone de son oreille et le regarda longuement.

Décédée ? Qu'est-ce que... Elle ne comprenait strictement rien. S'était-elle trompée de numéro ? Non, non, car en regardant dans son historique, Sarah ne vit rien. Rien ne s'était passé, juste à l'instant.
Les lèvres tremblantes, la jeune femme laissa retomber son téléphone. Les yeux hagards, elle chercha autour d'elle, se précipita vers le vieillard qui était resté de marbre.
- S'il vous plaît, par pitié, suppliait-elle, la voix brisée par d'intenses larmes, s'il vous plaît, dites-moi ce qu'il se passe... Vous pouvez me voir, je le sais... Ma maman elle...

- Mon enfant.
Et pour la première fois, le sans-abri daigna la regarder. Ses yeux, très doux, rencontrèrent ceux de Sarah, trempés de chaudes larmes.
- N'avais-tu pas l'impression que ta vie se répétait, ces trois derniers mois ?
- Je, je... Non... Enfin, ce sont mes études qui veulent ça, je..., bafouillait-elle, perdue.
- Tu es décédée, Sarah. Un tragique accident, il y a trois mois. Tu as voulu diriger une barque, la nuit, toute seule, et tu t'es noyée. Tu n'es jamais retournée à l'université. Ton corps n'a pas encore été retrouvé.
Un lourd poids s'infiltra en elle, sensation qui perdura quelques secondes, alors que le vieillard continuait à parler. Puis soudainement, un haut-le-cœur la prit, ainsi qu'une toux caverneuse, avant qu'elle ne se mette à recracher de l'eau.

Sarah n'entendait plus le vieillard, ne voyait plus rien autour d'elle. C'était comme si elle recrachait des litres et des litres d'eau à la fois, sans que la sensation d'étouffement ne s'améliore. Après quelques minutes de suffocation, elle finit par retomber sur le sol, le froid ayant fini par envahir tout son corps. Ce n'était donc pas l'hiver, eut-elle à peine le temps d'expirer.



*

- Vous avez déjà vu des cas de ce genre ?
Patrick Maillard se tourna vers son jeune collègue, détachant ses yeux de l'étendue d'eau encore plongée dans la pénombre. Puis, en fouinant dans la poche de sa veste, il trouva de quoi allumer sa troisième clope de la journée. Il était cinq heures du matin.
- C'est déjà arrivé. Le château, là, il attire la jeunesse. Ils ont envie d'explorer. Il suffit qu'ils passent par-dessus la barque ou le moyen qu'ils utilisent pour traverser et ils sont foutus. Du moins, surtout s'ils ne savent pas nager.
Il expira une large bouffée de fumée avant d'indiquer à son collègue de le suivre. Ensemble, ils s'approchèrent de la rive, près d'un petit ponton en bois.
- Elle est partie d'ici, a emprunté une barque et après, Dieu seul sait ce qu'il s'est exactement passé. Elle a fait un malaise, ou un geste malencontreux et elle est tombée à l'eau. D'après ses parents, elle n'était pas très bonne nageuse mais souhaitait par-dessus tout visiter l'île là-bas. Ils savaient pas vraiment pourquoi. Dans tous les cas, à trois heures du matin, elle n'était plus dans son lit.
Le jeune Eric hocha simplement la tête, avant de se tourner vers les camionnettes qui venaient d'arriver. Une équipe en sortit, affublée d'équipements de plongée. C'était la troisième fois qu'ils tentaient le coup.
- Elle doit bien être quelque part, chuchota Patrick pour lui-même.
Eric ne trouva rien de mieux à faire que de hocher la tête. Depuis deux ans qu'il était à la brigade, il n'avait jamais vu un cas aussi complexe. Qui pourtant paraissait bien simple. La jeune fille s'était noyée, elle devait bien être quelque part. Ses yeux parcoururent quelques instants la rive, avant que quelque chose n'attire son œil. Un bout de tissu ou quelque chose comme ça.
- Chef, venez voir !
Ils marchèrent quelques instants, et Patrick sortit sa lampe pour mieux explorer les environs à la naissance du lac.
- pu*ain, c'est pas possible ! s'exclama-t-il brusquement, avant de pousser son jeune collègue pour rejoindre l'eau. Eric, appelle les légistes !
Ils avaient fini par retrouver Sarah.

Un peu plus loin, sur la rive du château, un chat noir, en pleine toilette, se passa la patte derrière l'oreille gauche.


*

- Voyez-vous, il me suffit de trouver leur faiblesse. Sarah, par exemple, ne savait pas nager. Mais Judy, elle, avait des problèmes de cœur. Je sais comment faire.
- N'est-ce pas un peu cruel de compter sur leurs faiblesses pour assurer votre pérennité ?
- On ne fabrique pas un Horcruxe comme ça, mon ami ! Et je ne suis pas un barbare. J'aime les accompagner, après avoir fait mon œuvre.
- Donc, tout ce qu'a vécu Sarah après, seule ou avec vous, c'était ce morceau d'âme qui vivait dans le Horcruxe qui lui avait fait vivre ?
- Exactement. C'est assez grossier, comme description, mais c'est ça. Même si j'ai tué Sarah, j'ai utilisé son âme. Quelque part, elle est donc liée à la mienne. Même si elle n'existe plus et qu'aujourd'hui, elle a tout bonnement disparu.
- Je vois... Il est assez drôle que vous les laissiez ainsi, vos Horcruxes, sur l'étalage du pauvre mendiant que je suis, ajouta-t-il après un silence.
- Mais pas n'importe quel mendiant ! s'exclama James en nettoyant son monocle à l'aide d'un tissu fin. Le plus mystérieux, sans aucun doute !
- Comment avez-vous retrouvé la fille, James ?
- Ce n'est pas très compliqué pour un bon sorcier de retrouver ce qu'il veut. J'ai fouillé les eaux, j'ai fait ma petite mise en scène.
- C'est votre maison d'enfance, c'est ça ?
Le silence se fit. Passablement gêné, les joues rosies, James observa le sol longuement avant de changer de sujet.
- Maintenant que j'ai mes Horcruxes, il va falloir les cacher, alors j'ai eu une idée.
- Quoi encore ? demanda le vieux, déjà irrité par ces nouvelles aventures que l'autre promettait.
- Nous allons cacher chacun des livres dans des bibliothèques du monde entier.
- Et si quelqu'un les emprunte ?
- Eh bien, il y aura 99% de chance que cet individu soit un Moldu et qu'il en meurt, ou qu'il le rende précipitamment.
- C'est cruel, insista le vieillard qui soudainement décida qu'il était temps d'en finir.
Il se transforma en effet en un jeune homme au visage fin et aux pommettes creusées. Ses cheveux noirs tombaient timidement sur son front haut, et il se gratta un instant la tête. James l'observa avec fascination.
- Tu es le meilleur Métamorphomage que je connaisse. J'ai besoin de toi. Et d'ailleurs, ajouta-t-il en se levant, la vie est cruelle, mon cher Markus. Toi-même tu le sais. Trop souvent, on s'est moqué de ton génie. Aujourd'hui, tu les bernes tous. Comme moi, lorsque je me transforme en chat ! N'es-tu pas fier de ce revirement de situation ?
- Si, un peu, j'imagine..., bougonna ledit Markus sans regarder son compère.
- Je préfère ça. Alors, écoute-moi bien, voici ce que nous allons faire...
Markus se pencha un peu plus vers son ami, qui s'était installé sur l'autel d'une petite chapelle abandonnée. Plus haut, un couple de colombes roucoula au rythme de leurs nouveaux méfaits.
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