Voilà, nous y sommes. C'est un jour tellement sombre, autant au niveau du temps qu'au niveau de cet événement tragique pour mon petit ami. Je suis sincèrement mal pour lui, mais que puis-je faire à part le soutenir ? Rien de plus. Je le sais moi-même. Malheureusement, il faut passer par cette étape très douloureuse. Mais je vais faire au mieux pour qu'il ne se sente pas lésé, sinon, je serai bien un petit ami ingrat. Je ne connaissais pas beaucoup sa mère, mais je me souviens du Noël formidable que nous avons passé ensemble l'année dernière. Elle était pleine de joie, et pourtant, Jackson m'avait dit qu'elle était malade. Je ne lui avait pas demandé de quoi il en retournait exactement, puisque c'était trop indiscret. Si j'avais été à sa place, je l'aurai très mal pris je pense. Puis, son père me sort de mes pensées en disant qu'il faut y aller. Nous avançons alors au sein de l'Église. Puis, je vois que le cercueil arriver. Je sais combien mon copain souffre. J'ai aussi vécu la même chose avec mon papa. Il me manque terriblement. Toujours agrippé à moi, mon homme et moi avançons au premier rang et le cercueil est posé devant nous. La cérémonie commence, mais je n'écoute pas vraiment. Je suis triste. Trop. Mais je fais l'effort d'écouter lorsque Jackson s'avance pour adresser un dernier mot à sa maman :

- Kaitlyn Brown. Kaitlyn Hartman. Tu est ma mère, celle qui m'a élevé, celle qui m'a aimé jusqu'au dernier instant. Tu fus la plus douce des mamans, ton sourire angélique nous donner de la joie dès que nous l'apercevions, tes yeux remplis de fierté nous faisaient pousser des ailes, nous étions capables de tout faire grâce à toi. Tu resta à mes côtés pour chaque moment de ma vie. Tu ne m'a jamais abandonné. Tu fus mon ange. Tu est mon ange. Tu restera jamais mon ange. Maman je t'aime.

Je ne peux pas m'empêcher de pleurer. Je le vois qui est mal, mais je n'ose pas bouger de ma place de peur de le froisser. Je ne sais pas comment il peut réagir si je lui propose mon aide, donc je préfère le laisser tranquille prendre ses propres décisions. Au fond de moi, je sens que quelque chose se passe dans sa tête et j'ai un très mauvais pré-sentiment. Comme s'il allait m'annoncer une autre mauvaise nouvelle. Je le vois avec son attitude. Il n'est pas comme d'habitude, même quand il est triste. J'ai peur. Il avance vers moi et pose sa tête dans mon cou. Je lui fais un petit bisou sur le front pour essayer de le réconforter un minimum, mais je sais que ça ne peut pas suffire. En regardant à nouveau le cercueil, j'ai aussi envie d'adresser un petit mot à la famille et à mon copain. J'espère qu'il va m'autoriser à le faire. J'ai préparé un papier au cas où. Mais s'il ne veut pas, je ne peux pas aller à l'encontre de sa décision :

- Mon amour, je... dis-je en chuchotant, je peux adresser un mot moi aussi ? Tu as été super courageux de le faire et, même si je la connaissais peu, j'ai préparé un petit truc pour vous tous. Vous êtes aussi ma famille tu sais. Mais si tu ne veux pas, je peux comprendre et je respecte ton choix.

J'espère qu'il va accepter, parce que j'ai aussi besoin de faire mon deuil à ma façon. C'est toujours compliqué comme situation. En tout cas, je serai toujours là pour lui, et je veux lui faire savoir.

J'ai l'impression que la cérémonie ne s'arrête plus, c'est bien trop long. La souffrance est déjà assez grande, pourquoi en rajouter encore et toujours ? J'ai réellement de la peine pour mon petit ami. J'ai cette peine sincère à son égard, parce que je l'aime comme je n'ai jamais aimé qui que ce soit d'autres dans ce monde parfois cruel. La perte d'un parent est toujours extrêmement douloureuse et je sais de quoi je parle, l'ayant déjà vécu moi-même. Je suis là pour mon homme. Mais, au fond, suis-je si utile que ça aujourd'hui ? Je ne sais même pas si j'arrive à atténuer sa douleur si grande, si profonde. Je donnerai tout pour faire revenir sa mère à la vie. Même si je devais prendre sa place. Après tout, je suis remplaçable, ce qui n'est pas le cas de sa maman. Lorsque je demande à Jackson si je peux lire mon petit mot, je suis presque perplexe... C'est peut-être déplacé de faire ça et si ça se trouve, il ne le prendra pas bien du tout. Je commence doucement à paniquer et à avoir quelques gouttes de sueur. Mais à ma grande surprise, il accepte que j'y aille. Je me lève et m'avance doucement pour prendre la parole. Je le regarde. Il a l'air crispé. Ailleurs. Je suis dans le mal le plus total. Le pauvre...

- Je ne vais pas être très long, parce que je sais la douleur que l'on doit encaisser dans ce genre de situation. Kaitlyn était une personne merveilleuse et j'ai eu énormément de chance de la rencontrer. C'est une femme qui s'est battu avec honneur, courage et ténacité. Aujourd'hui, elle a quitté ce monde, mais pas nos cœurs qui battent à l'unisson. Je l'admirais énormément pour ses nombreuses qualités. Je n'ai passé qu'un seul Noël avec elle et ses proches. C'est de loin le meilleur de ma vie pour être franc.

Je me retiens de pleurer en parlant, je veux rester digne et fier, jusqu'à ce que je reprenne ma place qui est aux côtés de mon compagnon que j'aime. C'est maintenant à lui que je m'adresse :

- Jackson, mon amour... Je sais que cette épreuve est très douloureuse pour toi. Je sais ce que c'est la perte d'un être proche. Mais il faut que tu saches que je serai toujours là pour toi. Tu n'es pas un simple compagnon de passage dans ma vie. Tu représentes bien plus que tu ne peux l'imaginer. Voilà, je t'aime, tout simplement.

Ces mots me sont venus à l'esprit comme ça. J'aurai aimé les entendre quand j'en avais besoin, mais je ne connaissais pas encore mon petit Serdaigle à ce moment-là. Du coup, j'ai été très seul, parce que j'ai longtemps été en conflit avec ma propre famille. Je reviens m'asseoir auprès de mon petit ami en lui faisant un petit bisou sur ses lèvres douces.


En sortant de l'église, nous devons suivre le cortège jusqu'au cimetière. J'appréhende énormément d'y aller, puisque c'est un endroit que je ne supporte pas visiter. La seule personne pour laquelle je m'y rends, c'est pour rendre hommage à mon papa. Aujourd'hui, je pense tout particulièrement à lui à cause de ce contexte affreux dans lequel je me retrouve. J'espère vraiment que tout ça va se terminer rapidement, afin que je puisse rentrer avec mon compagnon. Il mérite grandement de se reposer après cette journée déplorable. Il me serre la main, ses yeux remplis de larmes. Nous sommes devant sa tombe. C'est là qu'elle va reposer pour le reste de l'éternité. Elle mérite d'être en paix et de reposer sans douleur. C'est peut-être égoïste ce que je vais penser, mais je préfère qu'elle soit morte et sans douleur, plutôt que vivante et torturée par ses souffrances. Nous sommes humains et nous ne méritons pas de souffrir comme ça. Je vois que les gens prennent une rose afin de la lancer sur le cercueil. Jackson me lâche la main et imite les autres. Vient mon tour. Je fais de même et reste quelques secondes pour murmurer : "Reposez en paix, Madame, je vous adore." Le cercueil commence à s'enfoncer sous terre. C'est bientôt terminé. Mon homme revient à mes côtés et je sens que quelque chose ne va pas. Mais je n'ose pas demander.


Nous sommes maintenant dans la petite maison de vacances des parents de mon copain. Tout le monde est là et ce qui me surprend le plus, c'est que certains sourient et discutent presque comme si rien ne venait de se produire. Peut-être que c'est pour essayer d'oublier cette journée affreuse. Je ne peux m'empêcher de "comprendre" leur réaction. Mais je ne suis pas sûr que Jackson pense la même chose, bien au contraire. En me retournant, je ne le vois plus. Mais j'entends la porte se fermer et je m'empresse d'aller voir. Je commence à réellement comprendre ce qui va se passer et je n'aime pas cette idée. Je le rattrape et lui agrippe le bras pour le tourner vers moi avant de l'embrasser. Lorsque ce baiser se termine, je dis :

- Tu sais, je n'ai que 17 ans, mais je suis loin d'être stupide. Je sais que tu t'apprêtes à me laisser tout seul. J'ai commencé à avoir des doutes pendant la cérémonie à cause de ton état, dis-je sans reprendre ma respiration. Je ferme les yeux l'espace de quelques secondes avant de poursuivre : Pourquoi tu t'en vas ?

Les larmes commencent à revenir tout doucement avant que je n'éclate en sanglots.

Ai-je le droit de lui en vouloir de partir ? Ai-je le droit de l'en empêcher ? Non. Il est libre après tout. Je suis terrifié à l'idée de me retrouver seul, sans personne. Si je ne l'ai plus avec moi, comment pourrais-je lui démontrer mon amour sincère ? Je ne sais même pas où il va et à la limite, je préfère ne pas le savoir. C'est mieux ainsi. Sinon, je serais constamment tenté de lui envoyer une lettre ou d'aller le voir. Mais si j'agissais ainsi, je suis sûr qu'il m'en voudrait et il ne pourrait qu'avoir raison. Je dois le laisser partir. A cette pensée, je me dis que jamais je n'aurai réagit de cette manière il y a quelques temps en arrière. Ou alors, c'est le contexte présent qui me fait cet effet, ce n'est pas impossible. Il souffre tellement que si c'est la seule façon pour qu'il s'apaise, je suis prêt à le laisser partir. Mais... Va-t-il rencontrer quelqu'un d'autre ? Va-t-il oublier ses sentiments à mon égard ? Je dois lui faire confiance. C'est la base d'une relation saine et durable. Et il est hors de question que je gâche ce que j'ai commencé à construire avec lui. Je continue de pleurer, j'attends un geste de sa part. Il ne tarde pas à comprendre : il me serre dans ses bras et pose doucement ma tête contre son torse. Il me caresse les cheveux. Cette sensation... Elle est inoubliable et j'aimerai qu'elle dure encore des heures. Il me regarde, droit dans les yeux. M'embrasse doucement. Je l'aime tellement. Sincèrement.

- Ethan d'amour... Je suis mort. Ma mère était mon ancre en ce monde. Je n'avais jamais remarqué que tu était là pour la remplacer, ma mère a attendu ton arrivée avant de rejoindre Dieu. Tu est mon nouvel ancre. Mais je me doit de me reconstruire Ethan.

Oui, tu es mort et je comprends. J'ai aussi perdu mon papa. Je sais ce que tu ressens mon amour. Cette pensée, je suis incapable de la verbaliser. Je ne sais plus trop quoi dire pour être franc. C'est comme si je venais de perdre l'usage de la parole à tout jamais. C'est frustrant. Il lâche mon visage et me prend la main pour avancer vers l'océan situé à quelques pas de nos pieds. J'hume doucement l'air dégagé par cette eau si bleu, si profonde et si sereine. C'est un univers merveilleux. Mais quelque chose vient troubler l’existence du calme qui régnait là. Un bateau pointe le bout de son nez. Il arrive à grande vitesse. Je comprends qu'il est l'heure de se dire au revoir. Mais je n'ai pas envie. Mon homme me lâche la main avant d'enlever ses chaussures, puis sa veste, cravate, chemise, ceinture et pantalon. Il se retrouve en caleçon, face à moi. Je suis... surpris. Et en même temps, j'esquisse un sourire devant cette situation quelque peu cocasse. Il s'approche de moi et mon sourire s'efface aussitôt. Son front touche le mien et ses paumes effleurent mes joues.

- Ethan je doit partir. Je vais en Italie. Je doit savoir qui je suis réellement. Je reviendrais, je te le promet. Mais toi... m'attendra-tu ?

Il faut que je lui dise quelque chose, que la parole revienne. Mais je dois avant tout me calmer. Non, je ne suis pas en colère. Mais triste. N'importe qui serait dans mon état dans une telle situation. C'est ça qu'on ressent quand on est amoureux, que la personne part. C'est atroce. La vie n'aime pas voir les gens heureux on dirait. Il a perdu sa mère, je perds mon copain. Mon ami. Mon amant.

- Jackson... Je te fais confiance. Tu es l'amour de ma vie et..., dans un murmure, je t'aime et je t'attendrai le temps qu'il faut. Prends soin de toi.

Je l'embrasse une dernière fois avant de tourner les talons et de m'enfuir en courant. Je n'ai plus la force de le regarder. Sinon, je vais m'effondrer pour de bon.

Adieu.
Jackson Emerenziana.