Au travers d'une énième ondée marsienne, Elias et Kohane s'étaient frayés un chemin jusqu'aux abords du Ministère. Il était bien quinze heures, et ils espéraient bien l'un comme l'autre que la foule se serait dispersée pour qu'ils n'aient pas à attendre une plombe devant les bureaux de vote. Ils n'avaient qu'une heure trente avant de devoir retourner aux Trois-Balais pour préparer le service du soir. Une heure trente, c'était largement suffisant pour faire le trajet jusque la capitale, filer au coeur gouvernementale et glisser un bout de papier dans l'urne. En théorie. C'était sans compter sur le fait que l'évènement avait littéralement rameuté toute la communauté sorcière de l'Angleterre. Si les fous furieux des neuf heures tapantes avaient sans doute fait la queue une éternité avec leurs compatriotes tout aussi zélés, ceux comme eux débarquant dans le creux de l'après-midi avec le même espoir en tête d'éviter la foule furieuse du petit matin n'en avaient pas beaucoup moins à patienter. Qu'est-ce que j'aime pas les foules, c'est plein de cons grommela Elias à l'attention de Kohane, qui étouffa un sourire amusé et le rassura d'une main sur l'épaule.

Les conversations étaient sourdes, comme de lourds secrets partiellement révélés entre les différentes personnes rassemblées là pour leur mission on ne peut plus importante. L'oreille trainante, Elias entendit quelques sombres crétins déblatérer de l'importance de la loi et du sang, du secret magique et autres faits d'importance historique. Des conservateurs. Il les avait dans le pif. Mais Kohane parvint à le distraire en lui montrant quelques tours de passe passe du bout de la baguette. Les formules qu'on apprenait aux enfants quand ils en étaient encore à leur balbutiements magiques, et qu'ils étaient encore émerveillés d'un rien. Elias était cela maintenant. Un enfant fasse à la magie, qu'il trouvait sublime. Et il adorait les mini-spectacles de Kohane, qui d'une ingéniosité sans faille lui montrait sans cesse toujours plus de choses, tant pour lui apprendre que pour lui rappeler, le rassurer, ou l'impressionner. Refais la lumière qui raconte une histoire ! il demanda avec excitation. Et elle le fit.

Pour sûr que si le secret magique il avait été levé, Elias il trouverait tout ça moins magique. Sa perte de mémoire n'aurait pas impliqué tant de revirements dans sa vie. Parce que la magie aurait fait partie du monde comme tout autre chose, et il n'aurait pas été tant surpris de son existence. Tout ça le frustrait tout autant que ça l'excitait. La re-découverte lui permettait un regard neuf sur les choses, tandis qu'il se demandait parfois où il en serait s'il n'avait jamais du tout reprendre de zéro. La file s'avança suffisamment pour qu'ils voient ce qui se tramait un peu plus loin. Elias guetta d'un oeil le type en charge du bon déroulement des évènements du jour. Un costard serré jusqu'à la clavicule, un crâne rasé qui révèle un visage au regard impavide. Il avait ce sourire sympathique à l'encontre de tout un chacun, ce regard que toute célébrité se garde pour les choses officielles, crispé et faux, présent uniquement pour la photo.

Il laissa passer sa Mokeuse devant lui, et lorsque son vote fut fait il s'avança à son tour. Du coin de l'oeil il vit Kohane lui faire un signe comme quoi elle l'attendait devant, et il lui adressa un sourire amical avant de s'adresser au fonctionnaire. Elias Baxter. Enfin Baxter, le nom, et Elias le prénom. Les fonctionnaires des fois c'était tellement terre à terre qu'il était bien capable de louper l'ordre d'écriture par pur soucis de bien faire. Le bulletin de vote remplit dans le plus grand secret trouva rapidement sa place au fond de l'urne, et le trentenaire quitta le bureau pour rejoindre sa Mokeuse. Ont votés ! Et il passa son bras dans le sien pour l'entrainer à sa suite. Vite, quittons cette endroit lugubre Kohane, avant qu'on ne se fasse dévorer l'esprit par des Magenmagouilleurs !