Les vacances sont presque terminées, pourquoi le temps passe aussi vite ? Bon j'en avais certes bien profité entre avancer mes cours, les balades, profiter pour passer du temps avec ma sœur...mais tout de même. J'avais décidé de profiter de ce temps maussade pour faire une virée dans les boutiques, le meilleur moyen de se remonter le moral est de faire chauffer la carte de crédit après tout. Habillée de mon long manteau et de mes gants, j'arpente les devantures de magasin d'un pas lent, je les connaissais déjà presque toutes. Celle-ci c'est la boutique de souvenirs un attrape-touristes, juste à coté une boutique d'informatique et en face une librairie. Ici c'était une ville connue pour ses grands magasins, peut-etre la meilleure d'Ecosse à ce niveau là. Moi ce qui m'intéresse c'est bien évidemment les magasins de bijoux et de hautes coutures, il fallait bien suivre les nouvelles collections.

Les mains remplies de sacs, je commence à me rendre compte que je ne pourrais rien porter de plus. Puis ma carte bancaire avait assez donné comme ça, et moi aussi. Il état grand temps de faire une petite pause, on dirait pas comme ça mais faire les magasins ça creuse. Je m’arrête donc à une petite terrasse et commande un mojito avec une gaufre au chocolat. Hum des calories, il va falloir une bonne séance de sport pour bruler ça. J'enfile mon casque audio sur les oreilles histoire de me couper du monde et me plonge une fois encore dans mes pensées.

Je ne pouvais être plus ravi qu'en cet instant. De toutes les terres verdoyantes et empreintes de magie, l’Écosse n'avait à rougir devant aucune de ses concurrentes. Ses plaines aux herbes douces, ses pierres dressées, ses falaises majestueuses ! Rien ici ne se prêtait plus à l'imagination et au romantisme ! Les vents violents et frais, tout droit venus du nord, un nord encore bien plus au nord que celui de l’Écosse, soulèvent les esprits, ravivent les flammes des passions et emportent dans leur sillage tous nos mots et nos pensées. Quelle idée exquise que d'être venu passer ces quelques jours d'été en ce lieu splendide. Mais la nature n'était pas la seule à être reine, bien plus verte que rousse en cette période de l'année, les villes et villages apportent eux aussi leur touche de grandiose à ce tableau de maître. Les petites habitations aux coloris naturels, les toitures en ardoise finement ciselée, et les galeries marchandes qui ouvrent grand leurs porte et volets à tous les passants. Une aubaine pour moi, puisque j'en suis un ! Je suis même un passant très curieux, trop sans doute, qui papillonne avec entrain d'une devanture à l'autre. Tous ces objets intrigants, toutes ces vitrines aguicheuses, j'étais une proie facile pour n'importe lequel de ces commerçants. Un oiseau dansant de branche en branche, sans se soucier de rien d'autre que d'apprécier le soleil et siffler gaiement entre les feuilles.

Après mon passage dans un établissement tout à fait remarquable - on y vendait des tableaux immobiles ! Pas un mouvement, rien ! - je m'attarde une minute sur des montres qui ne comportent pas la moindre aiguille. Un vendeur m'en met une au poignet, impatient de me faire essayer son produit auquel je ne comprends guère rien. Une simple surface lisse, agrémentée d'un ou deux boutons sur le côté. L'objet en lui-même n'est pas particulièrement beau mais très minimaliste dans sa conception. Le vendeur me dit alors de me connecter à mon compte par commande vocale. Je ne comprends pas un traitre mot de cette invitation. Face à mon désarrois, le voilà qui se penche en avant pour parler directement à mon poignet ! Après quelques mots clefs qui sonnent tout aussi magiques que n'importe quelle formule de chez nous, voilà que la surface noire de la montre s'illumine ! Un tas d'informations y défilent, sans queue ni tête, et le discours commercial du jeune homme en face de moi m'est aussi compréhensible que s'il parlait le fourchelangue. Je hoche la tête sans savoir à quoi je dis oui mais ça m'est égal : cet artefact est tout bonnement fascinant !

Je ressors donc de là avec une acquisition en plus et un peu d'argent moldu en moins. Mon budget ne m'inquiétait pas plus que ça, le taux de conversion entre les deux monnaies étant à mon avantage. C'est alors qu'un éclat formidable me tape dans le coin de l'oeil. Une boutique de vêtements faisait la part belle à tout un tas d'étoffes aux couleurs resplendissantes ! Ni une ni deux, je me précipite tel un enfant ayant vu un jouet à sa portée. Quelques heures plus tard, me voilà beau comme un gallion neuf. Un joli chapeau "à la mode en ce moment", un châle m'entourant la gorge et une nouvelle veste rose réfléchissante. Les habits moldus sont si originaux ! Bien que leur sens de l'esthétique m'échappe encore après toutes ces années, je ne me lasse pas d'en découvrir encore et toujours plus !

C'est le pas joyeux et le sourire jusqu'aux oreilles que je me mets en quête d'un endroit où me désaltérer. Malgré la météo écossaise peu prisée dans les discours, il faisait délicieusement bon et toutes ces émotions m'ont donné soif. Avisant une petite taverne moldue - une brasserie, comme ils disent - je n'hésite pas une seconde à m'installer en extérieur. Attendant que l'on vienne prendre ma commande, je tente de ranimer ma nouvelle montre. Depuis que j'avais quitté la compagnie du vendeur, elle me refusait son attention ! Pourtant ce n'est pas faute de lui demander gentiment si tout allait bien pour elle. Les machines moldues sont si intelligentes mais tellement susceptibles... un peu comme les hippogriffes !
A ma droite, une table plus loin une jeune femme déguste une gaufre aux senteurs des plus divines. Mmh, du chocolat. Je me penche vers elle dans l'intention de lui demander conseil, lui tendant du bout des doigts ma montre vexée, le regard un peu perplexe.
- Excusez-moi, mademoiselle ? Loin de moi l'envie de vous déranger durant la dégustation de ce qui semble être la plus appétissante de toutes les gaufres ! Elle dégage des parfums si exquis que je serais tenté moi-même d'en commander une ! Bien que je digère mal les produits laitiers, un de mes plus grands malheurs je l'admets volontiers. Imaginez passer toute votre enfance sans ces douceurs pâtissières dont se délectent d'ordinaire tous les autres enfants ? Une véritable injustice de la nature ! Mais ce n'est pas pour cela que je vous demande votre aide, pardonnez-moi. En réalité, je viens d'acheter cette montre au magasin un peu plus haut dans cette charmante rue mais depuis elle semble me bouder sans raison apparente ! Je lui ai pourtant adressé la parole poliment, comme le vendeur l'avait fait devant moi mais sans succès. Pourriez-vous lui dire que je m'excuse de l'avoir blessée et de bien vouloir la rallumer ?

J'espérais que ma question ne dévoilerait pas tout de suite mon inadaptation à ce monde sans magie. Je me dis que, peut-être, la jeune demoiselle mettra mon incompréhension totale de la technologie moldue sur le compte de l'âge et qu'elle ne me trouvera pas trop bizarre.

J'aurais dû emmener un bouquin tiens, il fait tellement bon que j'ai envie de passer l'après midi entière sur cette terrasse. Et ce mojito est franchement exquis, c'est franchement dommage que ma petite sœur n'ait pas voulu venir avec moi, elle aurait adoré cette gaufre. Enfin me débrouillant pas mal en patisserie, je lui en ai fait il n'y a pas si longtemps, presque aussi bonne que celle-ci d'ailleurs. Observant le paysage autour de moi je ne peux que constater la sérénité des gens autour de moi. C'est ça que je ne comprends pas, pourquoi tant de différence entre les moldus et sorciers alors que ces derniers ne sont pas si différents. Perdue dans mes pensées, une voix provenant près de moi me ramène à la réalité, je  jette un coup d’œil surprise, retirant mon casque pour mieux entendre sa requête.  Curieux discours que voilà, je suis ravie d'apprendre pour son intolérance au lait en tout cas, ainsi que son amour pour la patisserie. Et il a l'air curieusement perdu avec sa montre, mais qu'est-ce qu'il veut dire par parler à la montre ?


Un sourcil levé, je saisis sa fameuse montre pour mieux la regarder de près, jolie modèle au passage. "Si vous venez de l'acheter elle ne devrait pas avoir un problème de pile normalement" dis-je en la retournant. Oh mais c'était une montre connectée, il ne l'avait probablement pas configuré encore, mais  il n'a pourtant pas l'air si vieux, et c'était une chose évidente à savoir. Je n'étais pas fan des montres connectées, mais je connaissais un peu le processus. C'était peut-etre un de ces jeunes réfractaires à tout progrès technologique mais qui par la force des choses doit acquérir un de ces objets. Bon allons l'aidez le pauvre, soyons bonne âme pour une fois. "Il faut la connecter à votre compte google, vous avez perdu vos identifiants ? " Je demande en relevant la tête vers lui.

Immédiatement je ne peux m’empêcher d’être stupéfaite par son style vestimentaire que je n'avais pas encore remarqué, pourtant c'était difficile. Si style au singulier était possible, car il y avait un beau mélange de look. Un chapeau étrange, un châle qui devait l'étouffer, et une veste rosse pétante. Mais à quel sorte de personnage j'avais à faire ? Je ne sais pas pourquoi mais j'ai le pressentiment que cette histoire de connexion de montre va être longue à régler. Je soupire et prononce  le mot "connexion" à ce petit objet, immédiatement l'écran de connexion s'affiche, satisfaite je lui tends son achat. "Voilà et là vous pouvez vous y connecter normalement"

La jeune fille manipule sous mes yeux cette montre aussi fermée qu'un coffre de Gringotts et j'ouvre des yeux ronds d'incompréhension et de fascination en observant chacun de ses gestes. C'était incroyable ! Il n'y a rien de plus exaltant que d'avoir le privilège de côtoyer un expert. C'est à leur côté que l'on apprend le plus sur leur domaine et leur savoir-faire. Moi-même je peux rester des heures devant des présentations et conférences de chercheurs en botanique ou métamorphose, buvant presque leurs paroles comme les sacro-saints évangiles. Je ressens la même sensation face à cette jeune dame qui parvient à percer les secrets de cette technologie avec une facilité déconcertante ! Reprenant en main mon bien qu'elle me tend après ouvrage, je ne cache pas mon admiration.
- Incroyable ! Tout bonnement incroyable ! Vous êtes une vraie connaisseuse ! Qui aurait cru qu'il suffisait d'un seul mot magique, une seule formule adéquate, pour la faire réagir ! Il faut croire que les Moldus – enfin je veux dire, les horlogers comme ceux qui ont créé cette merveille – raisonnent de la même manière que nous autres les So– enfin je veux dire les gens comme moi qui n'y connaissent rien. Connexion. Connexion. Oh par tous les astres cela fonctionne à merveille ! Je ne vous remercierais jamais assez pour votre aide précieuse mademoiselle. Vous m'avez été d'un secours plus que primordial et me voila à présent sauvé de mon océan d'incompréhension. Quelle horrible sensation que celle de ne rien comprendre à tout ce qui nous entoure, n'est-ce pas ? Et dire que c'est sans doute comme cela que se sentent les bébés dés leur venue au monde ! Pas étonnant alors que leur premier réflexe soit de hurler leur désarrois à plein poumons. Connexion. Ah voilà l'écran qui se rallume, j'ai crains un instant de l'avoir reperdu ! Gwendal Flores. Pardon, je me rends compte que je me présente à la montre avant de le faire avec vous ! Quel malpoli je fais ! Oh attendez, quelque chose est apparut ! « Identifiants invalides », qu'est-ce que cela veut dire ? C'est pourtant bien mon nom. « Nom d'utilisateur ». Ou alors juste : Gwendal. Ah non, toujours pas. Quelle misère que d'être ainsi refusé à la porte de la propre montre ! Mais quelle redoutable efficacité contre les intrusions externes, c'est remarquablement intelligent, vous ne trouvez pas ? Oh laissez-moi vous offrir une boisson pour vous remercier, c'est bien la moindre des choses que je puisse faire, n'est-ce pas ? Moi-même je me laisserais bien tenter par un de leurs desserts d'ici. S'ils sont au moins à moitié appétissants que votre gaufre, je devrais en être satisfait sans le moindre problème. Gwen. Ça non plus tu ne l'acceptes pas ? Mh j'ai bien peur d'être alors à cours de nom à te donner petite montre...
Il devait bien y avoir un moyen de lui faire comprendre que c'était bien moi qui lui parle. Peut-être s'attend-elle encore à voir le vendeur de la boutique ? Ce serait bien ma veine, le garçon était charmant mais je n'ai pas pris la peine de retenir son nom ! Décidément, la politesse n'est pas mon fort aujourd'hui, voila qui est des plus regrettables.

Mais qu'est-ce qu'il raconte ? Je crois que j'ai lâché mon attention quelques secondes et loupé la majeure partie de son discours, je n'ai saisi que quelques mots au vol. Et dans ces mots il y a le terme moldu qui a résonné à mon oreille, c'est d'ailleurs celui-ci qui m'a fait perdre le fil. Ainsi tout s'explique, ce monsieur fait donc partie du monde magique et a choisi d'explorer aujourd'hui l'autre monde. Ça me rassure un petit peu sur son état mental déjà, il n'est donc ni taré ni senil. Sa montre a l'air de lui tenir tête, je ne suis pas certaine que sans un compte au préalable il puisse se connecter, mais ça sera compliqué à lui expliquer.

- Asseyez-vous donc, et oui je serais ravie de prendre un verre.

Il n'a pas l'air d'avoir l'âge d'être à Poudlard ni d'avoir fait étude des moldus. Il risque d'être déçu de son gadget, car de plus il ne pourra s'en servir dans le monde sorcier. Je termine mon verre d'une traite avant de le reposer sur la table.

- Pour vous connecter il faut entrer vos identifiants. C'est ceux de votre compte Google par exemple, vous en avez peut être un via votre ordinateur ou téléphone.

Je ne si pas si c'est deux concepts lui parlent, mais je crois que sans ça ce sera difficile pour lui. Si les objets moldus l'intéressent il aurait dû commencer par des objets plus simples comme une console ou encore un casque de musique ou iPad.  Je me demande entre lui et ma grand-mère, auquel il serait plus simple d'apprendre ce genre de truc.

- Et vous n'avez pas à vous cacher, je suis aussi une sorcière. Vous n'êtes plus à Poudlard j'imagine ?