Voyage américain [En cours]

Voyage américain

W/ Kohane W. Underlinden

Saison 31 - Fin du printemps

A

éroport de Londres : tout juste deux semaines après son retour d'Égypte, Lara repartait en vadrouille. Il s'agissait de son premier voyage en tant que Magizoologiste. En effet, la Métamorphomage venait d'être diplômée après de longues années d'études. Des années à travailler d'arrache-pied, que ce soit sur ces cours ou à la Boutique d'Animaux Magiques mais ces efforts avaient payés. Elle avait monté les échelons progressivement à la Boutique pour en devenir la propriétaire : un véritable accomplissement que de posséder son propre commerce aussi jeune. Et maintenant, l'obtention de son diplôme. Tous ces voyages, toutes ces thèses, toutes ces prises de risques n'avaient pas été vains. Deux la marquaient particulièrement : son tout premier dans la réserve des dragons de Roumanie et un plus récent, qui l'avait marqué d'une manière beaucoup plus triste. Néanmoins, bien que ce souvenir soit loin un des plus douloureux, la jeune femme le chérissait quelque part. Il faisait partie de sa vie maintenant après tout...

Aujourd'hui, elle n'était pas à l'aéroport londonien pour une destination exotique. En effet, cette fois-ci, Lara partait pour l'Amérique du Nord et, plus précisément, l'Arizona. La rencontre avec le Nundu ne l'avait calmé qu'un temps (quand bien même elle avait toujours les cheveux blancs et les yeux gris ahem) et son envie d'aventure avait repris le dessus, bien qu'un peu plus timide qu'à l'ordinaire. Chasser le naturel, il revient au galop... Ce coup-ci, c'était l'Oiseau-Tonnerre qui intriguait la jeune femme. Bien qu'elle n'ait aucunement la prétention d'être Norbert Dragonneau, cette créature l'intriguait et la passionnait. Il y avait bien des livres qui parlaient de cette oiseau mythique mais la curiosité et la soif de savoir de Lara ne pouvaient pas se contenter de cela. Non non. Il fallait absolument qu'elle aille en voir en chair et en os, de près bien évidemment. Sinon, le voyage ne serait pas réussi.

La voilà donc en train d'attendre son vol, dans le hall de l'aéroport. La jeune femme aurait très bien pu transplaner ou demander un portoloin mais la simplicité des transports moldus lui plaisaient bien. Après tout, ils ne se prenaient pas la tête : on monte dans l'avion, on s'assoit et on attends tranquillement que les choses se passent. Quoi de mieux ? Rien. Surtout que la propriétaire de la Boutique d'Animaux Magiques n'avait qu'une valise cabine : son studio-valise. Tout était là-dedans : couchettes, bureau, petite cuisine, salle de bains et endroit pour les animaux. En parlant d'animaux, la Métamorphomage avait bien entendu amener Aeolian et Olympia. Les autres, eux, étaient restés dans le confort de Serene Place.

Feuillant son livre sur les animaux magiques, Lara ne prêtait pas attention aux regards qu'on pouvait lui lancer. Après tout, les Moldus devaient sûrement la prendre pour une hurluberlu ou une passionnée d'un univers fantastique comme celui que l'on trouve dans les jeux vidéos ou dans les livres moldus. Toutefois, les choses devinrent un peu plus suspecte quand la valise se mit à remuer légèrement dans laquelle Lara mit un petit coup de pied. Ce n'était clairement pas le moment de se faire remarquer...

Du monde, du monde qui se presse, court presque, arriver à l'heure, ne pas rater son vol. J'ai toujours trouvé fascinant les transports Moldus. Et leur façon de voler... ils ont trouvé comment s'élever dans les airs sans magie. Dingue, hein ? Au fond, la technologie Moldue n'est-elle pas une forme de magie ?
Plantée dans le hall de l'aéroport, j'observe, un temps, les gens qui passent. Ils marchent sans me regarder. Des familles, beaucoup. Des gens seuls. Des groupes hétéroclites de gens.
Je n'ai presque jamais pris l'avions Moldu. En fait... juste une fois, je crois. Mais je trouve ça fascinant. Alors, après avoir passé quelques minutes en mode poteau au milieu de l'aéroport, je finis par emboîter le pas d'une famille venant d'arriver. Je les suis mais sans les coller -ils trouveraient ça suspect et je m'attirerais sans aucun doute des ennuis.
Ils s'arrêtent devant une sorte d'écran avec les destinations écrites. Un oh muet se forme sur mes lèvres. Tellement d'endroits ! On peut vraiment aller partout, à partir d'ici.
Je ne remarque même pas la famille qui s'est éloigné, pour faire enregistrer les bagages, comme a dit la femme. Et je reste plantée là, à imaginer toutes ces destinations.
Les Trois Balais ferment quinze jours en août. Autant dire que c'est le bon moment pour partir. Je n'ai jamais trop eu l'habitude de voyager ou partir en vacances. J'ai beaucoup passé mon temps libre dans notre bonne vieille terre britannique. Ou loin de tout, dans les Alpes Autrichiennes. Mais là, c'est différent. L'année scolaire va se terminer, donc plus de cours à donner. Les Trois Balais occuperont encore mon mois de juillet. Puis... J'aurai du temps.Et je me dis qu'on pourrait partir quelque part, avec Adonys. Quant à savoir où, voilà la grande question. Alors mes yeux scrutent les destinations. A la recherche d'idées à proposer. Je cherche un mot, un nom, qui inspirerait mes oreilles. Des sons qui seraient jolis à entendre -le lieu le serait forcément tout autant !
Je rêve un instant, sur ces mots. Ces lettres qui se suivent pour appeler à un lieu lointain. Un lieu qu'on imagine d'une certaine façon, un fantasme presque.
L'exotisme est le privilège des dominant·e·s, qui ont le pouvoir de façonner une contrée à l'image de leurs désirs et de leurs fantasmes. Le miracle fait que la contrée en question finit par s'adapter à cette vision, dénaturant ce qu'elle est pour offrir à la population dominante satisfaction. Malgré tout, avoir conscience de ce rapport de pouvoir n'empêche pas de parler exotisme et construire ses rêves d'ailleurs sur ses idéaux occidentaux.

Je sors de ma rêverie lorsqu'un gamin me bouscule sans faire exprès. A peine un mot d'excuse tout en continuant de courir, poursuivi par celle qui pourrait bien être sa soeur. Ils rient aux éclats, zigzaguant entre les personnes présentes. Et une voix d'homme s'élève -sans doute le père- tentant de les rappeler à l'ordre. Sans grand succès. Rah lala, les gamins infernaux !
Réalisant que ça fait de bonnes longues minutes que je suis figé devant le tableau des départs, je décide de me mettre en mouvement pour ne pas trop attirer l'attention. D'autant que je n'ai, avec moi, aucune valise. Ce qui détonne un peu, par rapport au reste.
Je reprends donc mon exploration de l'aéroport. Laissant les noms de lieux lus précédemment flotter dans mon esprit.

Lorsque vous êtes en mouvement et que les gens sont occupés, ils ne remarquent pas forcément que vous les avez vus. J'aime ces moments où je passe, je vois sans être vue, presque. Je remarque, mais personne ne fait attention à moi. Je ne suis qu'une parmi d'autres.
Et dans le tas de personnes désoeuvrées dans l'aéroport, je remarque une femme qui lit. Je crois que ce qui m'a tapé dans l'oeil en premier est la couverture de son livre. Que je crois connaître. Les couleurs, la forme... Je m'approche discrètement pour tenter d'en lire le titre -sans grand succès, si je veux rester suffisamment éloignée pour ne pas l'importuner.
Mais tout à coup, une chose se passe.
Une sorte de sursaut dans la valise... et un coup de pied, comme pour demander à la valise de se calmer. Là, j'avoue, ça attise ma curiosité. N'ayant pas l'habitude d'avoir peur des gens, encore moins de les aborder alors que je ne les connais pas, je vais, cette fois résolument et de façon ostentatoire, vers la jeune femme :

-Ta valise cherche à s’enfuir ?

Cette fois, je suis assez proche d’elle et, sans même chercher à me cacher, penche la tête sur le côté, pour lire le titre de son livre.

-Oh.

Quelle surprise. Je doute qu’une Moldue ait pu être en possession d’un tel livre. A moins de compter un·e sorcier·e dans sa famille. Ce n’est donc peut-être pas une Moldue.

-Tu t’intéresses aux animaux magiques ?

C

ontinuant de feuilleter son livre sur les animaux magiques, Lara ne prêtait pas grande attention à son environnement et aux gens l’entourant. Après tout, elle ne gênait personne, assise toute seule sur l’un des nombreux sièges que comptaient l’aéroport de Londres. Seule sa valise qui bougeait toute seule pouvait éventuellement intriguer et Lara s’empressait de mettre un petit coup de pied dedans pour faire comprendre aux créatures là-dedans qu’il fallait rester sage encore quelques temps.

Néanmoins, ce qui devait arriver arriva et elle finit par attirer l’attention de quelqu’un. Pourtant, il y en avait du monde dans cet aéroport mais il avait fallu que cette jeune inconnue la remarque ELLE et son bagage gigoteur. Relevant les yeux à la première phrase prononçait à son attention, Lara fixait son interlocutrice : était-ce une moldue ou une sorcière ? Allait-elle avoir des problèmes avec une inconnue quelques instants avant de prendre son vol ? Il ne manquerait plus que ça… Néanmoins, l’attitude de la jeune femme relevait plus de la curiosité que d’autre chose et, au pire des cas, elle lui ferait croire qu’il s’agit d’un recueil regroupant les créatures magiques d’un livre qu’elle avait lu. Bien comme échappatoire non ?

Toutefois, pas le temps d’imaginer quoique ce soit de plus puisque l’Inconnue posa une question qui indiqua tout de suite qu’elle connaissait l’univers des sorciers. Soit parce qu’elle en était elle-même une soit elle était une moldue qui avait un sorcier dans sa famille. L’instinct de Lara penchait plutôt vers la première hypothèse, il fallait l’avouer. Un sourire de soulagement naquit sur les lèvres de la Caméléon et elle montra le siège à ses côtés afin d'inciter la mystérieuse inconnue à s'asseoir « Je suis Magizoologiste et mes animaux sont là-dedans » Doigt pointé vers la valise, qui continuait toujours de remuer légèrement. Visiblement, Olympia et Aeolian avait décidé de ne pas être sages… Prions pour que personne d'autre ne les remarque. Observant quelques secondes l’aéroport bondé, la propriétaire de la Boutique d’Animaux Magiques retourna son attention vers l’Inconnue « Au fait, je m’appelle Lara, je pars en Amérique pour étudier les créatures magiques justement. Et toi, tu es ? » Après tout, elle avait un peu de temps à tuer, autant en profiter pour discuter.