Balthazar vous a apporté le thé sans que le silence ne soit brisé. Elle est là pour te parler, et pourtant vous vous contentez de vous regarder dans le blanc des yeux. Tu comprends que ce qu'elle a à dire n'est pas évident à laisser sortir, elle n'est pas du genre à tourner autour du pot. Du moins pas avec toi. Alors tu te contentes d'attendre. Attendre qu'elle soit prête à enfin lâcher ce pourquoi elle est là. Tu avales une gorgée brûlante de thé avant de reposer la tasse sur la table, préférant attendre que le breuvage refroidisse un peu avant de t'y risquer à nouveau.
Et enfin, l'information arrive. Tu hausses un sourcil. N'est-ce pas le genre de nouvelle pour laquelle tu es sensé la féliciter ? Tu n'en fais rien. Tu te doutes qu'il y a autre chose. Autre chose qu'une grossesse mise en pause à cause de la faille temporelle. C'est quelque chose de difficile, mais rien d'insurmontable. Pas pour elle. Elle a vécu tellement pire. Alors tu attends encore, sans la quitter du regard. Il faut croire que t'es devenu un peu plus patient qu'avant. Et ça a du bon, puisqu'une nouvelle information vient s'ajouter à la première. Elle n'arrive pas à le digérer.
Qu'est-ce que ça veut dire ? Pense-t-elle qu'un enfant n'est rien d'autre qu'un repas avarié ? C'est quoi ce délire encore. Comment peut-elle utilise ces mots pour désigner la chair de sa chair ? La mort de Lyra lui a porté un sacré coup, tu le sais, tu le comprends. Il n'y a rien de pire pour un parent que de perdre son enfant. Mais la vie s'offre de nouveau à elle, et c'est ainsi qu'elle réagit ? Tu serres les mâchoires un instant, préférant détourner le regard pour ne pas exploser. Tu ne sais rien de ce qu'elle ressent réellement. Et ce n'est pas elle qui saura te l'expliquer clairement. Le sait-elle simplement elle-même ? T'en doutes. Les Peverell et les sentiments, c'est une longue histoire, et elle finit rarement bien.
Tu prends plusieurs secondes pour enregistrer la nouvelle, redescendre. Si ce n'est ce petit serrement de mâchoire, tu es resté parfaitement neutre. Tu attrapes de nouveau ta tasse pour boire, reprendre tes esprits. Et enfin, tes yeux se reposent sur elle, avec un calme détonnant.
- Que comptes-tu faire ?
Tu lui poses la question comme tu pourrais lui demander le temps qu'ils annoncent pour le lendemain. Comme si l'enfant n'avait aucune importance. Et pourtant, tu lui en veux d'avoir parlé ainsi. Elle n'aurait pas dû. Ce n'est pas normal.