Mia avait le souffle court de s'être rappelé pour la énième fois de se souvenir douloureux. Comme pour se protéger de tout le mal extérieur que le monde entier pouvait lui vouloir, elle croisa les bras et saisit entre ses deux doigts de chaque main d'un bout de son blouson ; c'était sa manière à elle de dire : Vous ne m'aurez plus. Mais la vérité c'était qu'elle était à la merci de tous sans pouvoir changer la donne. Elle ne savait pas se défendre, elle ne savait pas frapper là où ça faisait mal. Et d'après ce qu'elle avait compris, le contraste était fort avec sa mère qui était une combattante hors pair. C'était tout ce qu'elle savait, mais c'était déjà beaucoup. Peut-être qu'elle ne méritait pas d'être sa fille d'avoir été aussi lâche et impuissante. Elle n'avait pas hérité des gênes de combattante de Claire Wilson, la Gryffondor était même l'inverse : elle se laissait marcher dessus et elle se laissait détruire.

- Toi tu m'as l'air d'en avoir sur la conscience.

Mia releva la tête et croisa le regard de Kyara qui semblait s'être apaisée. Elle ne pouvait pas faire autrement que de montrer qu'elle allait mal. Six mois auparavant, elle n'aurait pas accepté que quelqu'un s’apitoie sur son sort de cette façon et elle l'aurait envoyé pètre de la plus belle façon qu'il soit ; mais aujourd'hui tout était différent et la jeune blondinette n'était plus la même. La vérité c'est qu'elle s'était perdue et ne savait pas elle-même qui elle était. Mia avait mal, c'était tout. Son interlocutrice s'approcha d'elle et avec une même rengaine, la jeune fille eut un mouvement de recul. La brune ne sembla pas vouloir insister plus que cela et désigna d'un geste ample un banc qui se trouvait non loin.

- Tu ne me connais pas, je ne te connais pas, mais je te propose quand même de d'écouter si tu as besoin de parler à quelqu'un, des fois on a plus de faciliter de parler à un inconnu. En plus tu es venu comment ici et tu comptes rentrer comment ? En bref je te propose de t'écouter et de te ramener au château si tu le souhaites. Je ne te force en rien, c'est à toi de choisir.

Peut-être qu'au fond la solution se trouvait juste là. Se confier à une inconnue paraissait totalement fou mais sans savoir pourquoi, cette idée là réconforta la jeune fille. Kyara ne semblait pas être quelqu'un de dangereux, même s'il fallait toujours se méfier de l'eau qui dort. Il était possible que de suivre cette jeune femme allait lui porter préjudice mais après tout elle n'était plus à une erreur près dans sa vie ; de plus, elle tenait toujours fermement entre ses doigts sa baguette même si elle n'était pas sur de réellement savoir s'en servir contre quelqu'un. Mia était le genre de fille à rater un Petrificus Totalus dans la précipitation et la crainte.

- Ca veut dire que... tu travailles à Poudlard ? J'veux dire, je sais que j'ai pas le droit d'être ici sans une autorisation mais j'en avais vraiment besoin et...

Elle cessa de parler. Aligner plus de deux phrases, voilà bien longtemps que ça ne lui était pas arrivée. Assise sur ce banc, elle se recroquevilla sur elle même, enserrant de ses bras ses genoux comme elle en avait prit l'habitude. Elle baissa alors la tête et se résigna à se confondre en explication. Tant pis si elle avait eu la malchance de tomber sur quelqu'un qui travaillait dans son école. Elle dit simplement :

- Si tu connais vraiment ma mère... J'aimerai que tu ne lui dises rien.

Mia souffla un grand coup comme pour se donner du courage. Elle se surprit entrain de trembler des mains tant la douleur du souvenir était vive. La Gryffondor regarda à l'opposé de son interlocutrice ; elle était trop honteuse pour affronter son regard et ne pouvait se résoudre à batailler contre un regard interrogateur. Elle balança alors la bombe avec plus de simplicité qu'elle ne l'aurait imaginé.

- On m'a fait du mal.

Ce soir, Joe devait faire sa ronde dans les rues de Loutry. Il y habitait, s'était plus facile d'accès pour lui que d'aller au fin fond de l'Angleterre sans son permis de transplanage, d'ailleurs il devrait sérieusement s'y mettre. Il sortit de sa maison assez tôt. Il y revenait régulièrement. Il faisait le tour du village, deux ou trois fois, rentrait chez lui pour boire un coup, manger. Puis ensuite, il retournait faire un tour dans le village. Toute la journée, il s'était occupé de cette façon. Il ne s'était rien passé d'exceptionnel dans la journée, comme à son habitude le village était désert. Les jeunes ne sortaient pas, les parents non plus. Tout le monde restait chez sois ! Joe avait juste croisé deux filles qui discutaient, le black ne prit même pas la peine d'écouter ce qu'elle disait. Il continua son chemin sans faire attention à elles.

Fin du RP.

Sans même s'en rendre compte, Mia s'était mise à légèrement trembler rien qu'en parlant, à demi mot, de ce qui lui était arrivée. Cela risquait d'être compliqué de continuer tant la douleur était encore présente et bien ancré dans son être. Elle se demanda un instant si elle partirait ou au moins si elle s'estomperait mais cela lui semblait au jour d'aujourd'hui complètement impossible. Elle allait devoir vivre avec ce poids durant le reste de sa vie ; elle allait devoir haïr le reste du monde durant le reste de sa vie ; elle allait devoir se battre contre elle même jusqu'à la fin de sa vie. Comme si elle souhaitait à nouveau enfouir au plus profond d'elle cette affliction, elle s'arrêta sur ce que Kyara venait de lui dire : elle aussi était une élève à Poudlard... C'était peut être pour cela qu'elle avait cette sensation de déjà vu mais pourtant il lui sembla que quelque chose clochait... Comment pouvait elle connaître sa mère ? Et à quel point étaient-elles proche ? La surprise que la jeune brune avait affiché en hélant la fille Wilson était peut-être due au fait qu'elles ne s'étaient pas vu depuis un moment. Et, pourquoi elle avait été si surprise quand Mia lui avait dit qu'elle était la fille de Claire ? Elle se demande un instant si sa mère avait caché l'existence de sa fille aux autres et pour quelles raisons. Tout était bien trop compliqué.

- Qui t'a fait du mal ? Qu'est ce qu'on t'a fait ?

Question fatidique. Retour sur l'instant. Parler. Son coeur battait si fort qu'elle avait envie de le prendre et de le jeter le plus loin possible, de le détruire et de ne plus jamais le revoir afin de faire taire toutes les peines qu'il pouvait renfermer. Mia n'était pas forte. Elle ne savait se battre, relever la tête et continuer. Elle aurait voulu être cette fille pleine d'assurance qu'elle était avant pour pouvoir diminuer le plus possible la souffrance qu'elle pouvait ressentir et pour avancer. Elle aurait voulu lui prouver qu'elle n'était pas celle qu'il croyait.

- Je crois que je n'arriverai jamais à le dire.

Une larme s'échappa du coin de son oeil pour la énième fois depuis ces dernières semaines. La jeune blondinette ne les sentaient même plus rouler sur sa joue, elle les essuyaient d'un revers de manche plus par habitude que par gêne. Les pulsations de son coeur étaient tellement élevées qu'elle avait l'impression que n'importe quelle personne se trouvant autour d'elle l'aurait entendu à travers sa peau. Peut être que se planter un couteau dedans le ferai taire. La Gryffondor aurait tout donner pour faire taire ses sentiments et ne plus rien ressentir.

- Je m'appelle Mia Joy... Et je me suis faite violer par le Concierge de Poudlard.

Elle avait sortie ça d'une traite, d'une voix roque et monotone, le regard perdu dans le vide. C'était la première fois qu'elle le disait et ce fut comme si elle revivait la chose une à nouveau. Mettre des mots sur son agression venait de lui faire prendre conscience de ce qui lui était arrivée. D'un coup, elle manqua un battement de coeur et n'arrivait plus à respirer. Elle tentait de reprendre son souffle mais les larmes l'empêchait de se concentrer. C'était toute sa peine qu'elle déversait. Tout son corps tremblait. Et elle avait mal.

Il n'y avait a présent plus aucune raison pour que son histoire s'arrange et que les images s'effacent. Pour toujours elle aurait en mémoire ce regard froid et haineux qui l'avait regardé encore et encore, avec ce sourire satisfait qui pouvait se dessiner au coin de ses lèvres. Plus rien n'aurait de saveur à présent. Mia avait raconté son histoire d'une traite, elle avait résumé toute sa douleur en dix mots à peine. La proportion de sa souffrance avec le nombre de mot qu'elle avait employé montrait bien à quel point la situation pouvait être affligeante. Tout ça n'était que torture. La jeune demoiselle était à présent à la merci de n'importe qui, elle était si fragile... Comment une femme si forte avait pu avoir une fille aussi frêle. La panique empara tout son être et la Gryffondor était comme paralysé. Elle n'arrivait plus à rien faire, et même respirer lui semblait compliqué.

Elle sentit alors Kyara s'approcher d'elle après un temps de pause. Elle qui était aussi de Poudlard devait très bien connaître le Concierge. Dans la tête de la blondinette, l'homme ne pouvait être qu'un monstre mais elle se demanda un instant si c'était le cas pour tout le monde. Peut être qu'en réalité, la brune l'appréciait pour des raisons inconnues. Elle frissonna une nouvelle fois : peut-être que Monsieur Dey avait effectivement des amis, des personnes qui l'appréciait. Ces personnes savaient-elles à quel point cet homme pouvait être un monstre ? Vivions nous entouré d'eux ? Mia n'avait plus foi en rien. Elle haïssait le monde entier.

- Là, ça va aller, calme toi, respire, ne t’inquiète pas c'est fini maintenant, reprend ton souffle Mia

Elle l'avait prit dans ses bras, tentant tant bien que mal de la bercer et de la calmer. La situation était délicate. Fort heureusement, la blonde ne pouvait pas bouger tant la crise était forte mais elle aurait pu lui mettre un gros coup de point en plein dans la figure uniquement parce qu'elle l'avait touché. Depuis cet après midi là, plus personne n'avait touché la demoiselle ne serai-ce que lui toucher la main ou le bras. Elle avait éviter tout contact et là, elle se retrouvait dans les bras d'une inconnue qui de sa main lui tapotait doucement la tête comme pour lui montrer qu'elle était en sécurité dans ses bras. Kyara était encore à Poudlard, elle était loin de croire qu'elle était en sécurité. La jeune femme commença alors à se calmer.

- Ecoute moi Mia, il faut que tu en parles à un adulte, il faut que toute cette histoire soit tiré au clair, tu ne peux pas garder tout ça pour toi d'accord ?
- Non.

Elle avait répondu immédiatement, sans réfléchir. L'idée d'en parler à quelqu'un d'autre lui était insoutenable. Elle n'arriverait jamais à dire à nouveau ce qui lui était arrivé, encore plus maintenant qu'elle savait ce que ça faisait que d'en parler : elle avait juste l'impression de revivre le drame une nouvelle fois. Elle se leva alors du banc, non sans difficulté tant ses jambes semblait refuser de la soutenir ; croisa ses bras sur sa poitrine comme pour se protéger du monde extérieur ; baissa la tête et suivit des yeux les deux larmes qui s'écrasèrent sur le sol. Il n'y avait plus rien à faire. Mia se tourna alors à nouveau vers cette jeune fille qui lui était complètement inconnue.

- Je... Je suis venue ici pour en parler à ma mère. Ma propre mère. Mais, je n'y arriverai pas alors qu'elle est la femme à qui je dis tout. Comment je vais lui dire que je n'ai pas su être assez forte pour... éviter ce qui m'est arrivé ? Toi qui l'a connait, tu sais à quel point c'est une femme forte et moi, moi, je... je suis fragile. On m'a tout prit Kyara, même mon trait de caractère bavard. Je ne suis plus rien, tu comprends ?

Elle s'énervait au fur et à mesure qu'elle parlait, mêlant le geste à la parole, elle rapprochait souvent sa main droite de ses cheveux avant de faire balancer son bras au loin. Elle piétinait, c'était sa façon à elle d'obliger ses jambes à la soutenir face à la situation. Elle voulait reprendre sa force et ça devait commencer ainsi. Mia regarda alors droit dans les yeux la jeune fille avant de lui dire :

- Je suis incapable de le dire à qui que ce soit d'autres...

Kyara semblait choquée par les révélations que la demoiselle venait de lui faire. Elle avait tout lâcher d'une traite sans faire attention à son interlocutrice. Après tout, elle savait que la demoiselle venait elle aussi à Poudlard et il était fort probable qu'elle connaisse également le Concierge. Même si l'idée lui paraissait impossible après ce qu'il lui avait subir, peut être que Monsieur Dey pouvait être quelqu'un de gentil avec d'autres personnes. Parfois le mal se trouve précisément là où on l'attend le moins. C'est souvent un voisin qui nous dit toujours bonjour avec un grand sourire qui cache le corps d'un homme dans son sous-sol. Elle frissonna à cette idée. Et si il l'avait tué ce jour là ? Même si d'une façon on lui avait prit son âme, son enfance, sa virginité, elle restait tout de même envie. Est-ce que cela avait une signification particulière ? Peut être qu'elle avait été épargnée juste parce qu'elle avait encore des choses à accomplir... Peut être fallait-il qu'elle se venge. Ou bien elle devait vivre avec ce mal et il fallait qu'elle soit puni. Perdue. Mia était totalement perdue. La brunette tentait tant bien que mal de rassurer la cadette avec des mots qui se voulait réconfortant.

- Tu as tort Mia. Tu n'es pas plus rien, tu es encore toi bien qu'à l'heure d'aujourd'hui tu sois incomplète. Ce n'est pas toi qui serais faible, c'est lui. Lui qui n'a pas eu de courage en te faisant ce qu'il t'a fait. Tu ne dois pas t'en vouloir à toi, tu dois reprendre ta vie en main. Je sais que c'est dur et je ne dis pas ça comme des paroles en l'air. Il faut que tu te reprennes en main, comme tu le vois la vie continue et elle ne t'attendra pas. Même si pour toi ton monde semble s'être arrêté de tourner ça n'est pas le cas en vérité. Il faut que tu sois forte, tu en es capable, toute personne en est capable. Tu dois prendre ton courage à deux mains, accepter ce qui s'st passé, ne pas t'en vouloir et surtout en parler à quelqu'un d'autre. Justice doit être faite.

Rien était juste dans ce qu'elle avait vécu. Strictement rien. On avait profité de sa faiblesse et fait en sorte de montrer sa supériorité hiérarchique. Croire une élève qui pouvait paraitre un peu idiote au premier abord par une superficialité voulue ou croire un Concierge ancré dans job depuis plusieurs années et étant un adulte responsable... Elle jurait éternellement dans sa tête contre la vie, contre ce qu'elle avait vécu. Elle détestait être cette fille faible mais n'arrivait plus à faire autrement. Justice devait être faite.... Elle avait besoin de plus, elle avait besoin de quelque chose qui l'a rendrait de nouveau forte, quelque chose qui lui permettrait de reprendre le dessus. Mais elle n'avait aucune idée de ce que ça pourrait être, de qui ça pouvait être

- Est-ce que tu désires passer le reste de ta vie imcomplete ? À frisonner à chaque fois que quelqu'un te touchera . À te sentir mal à l'aise quand tu verras un homme ? Tu te vois être comme ça jusqu'à la fin . Je ne pense pas que c'est ce que tu souhaites et ta mère non plus. Cette dernière va vite s'en rendre compte de ton état si tu te laisses couler. Tu as deux solutions Mia. Soit te laisser abattre et couler, soit relever ta tête et lutter, te battre, réclamer justice. La balle est dans ton camp, tu es la seule à pouvoir prendre cette décision et quelque soit celle que tu prendras tu te retrouveras changé.

Au fond, Mia savait pertinemment que Kyara avait raison mais il était difficile d'accepter sa faiblesse et lorsqu'on est au fond du trou, il semble plus simple de creuser encore plutôt que de s'accrocher aux parois afin de remonter. Se battre ou mourir. La Gryffondor avait honte de l'image qu'elle pouvait renvoyer. Elle avait tellement envie de rentrer chez elle un instant et de serrer tout contre soit sa mère, de sentir ses bras rassurant enserrés son corps et rester dans ce havre de paix éternellement. Sa mère était tout et resterait un tout ; il lui était impossible de vivre sans elle. Reprendre le dessus, ça risquait d'être le combat le plus difficile de tout sa vie.

- Je vais me battre... Mais j'ai encore besoin de temps pour le faire. Je dois rentrer à Poudlard, je reviendrai parler à ma mère, il le faut.

Elle se leva du banc, comme pour montrer qu'elle avait comprit le message que lui avait adresser son interlocutrice inconnue du jour. Elle allait se battre, refaire surface, sortir la tête de l'eau. Mais la blessure était encore bien présente et il lui fallait du temps pour guérir, si c'était possible, ou au moins pour oublier et enfouir la douleur au fond d'elle. Elle regarda alors la brune avant de lui dire simplement :

- Merci d'avoir été là Kyara, ça me touche.... Vraiment.