Visiblement stressée et affolée par les événements, Nyan n'exprimait pas son choc avec l'air grave et sombre de ses camarades. Au contraire, elle semblait électrisée. Son regard parcourait les lieux sans toutefois oser s'aventurer partout. Son premier réflexe avait été d'aller voir ceux qui avaient été blessés. D'autres, plus sages, arguèrent que s'ils allaient voir les blessés, cela attirerait une attention non souhaitée sur eux et pouvait également mettre en danger la vie de leurs blessés. Quoi de plus simple pour leurs adversaire que de leur rendre alors visite pour les achever dans leur sommeil?

Valens essaya de ne pas penser que sa mère de coeur faisait peut être partie des gens à l’hôpital. La promesse qu'elle avait exigée de lui lui revenait sans cesse en mémoire comme une gifle à ses instincts. Ne pas chercher à la venger, il avait promis de ne jamais chercher à la venger. Pour l'heure ce n'était pas plus mal, il serait devenu fou. Pourtant il ignorait combien de temps il pourrait contenir ses émotions avant que la rage ne l'emporte et qu'il rompe ce serment ou devienne fou. Pour l'heure, il tiendrait.

Ecoutant la jeune femme, il apprit qu'elle était une gardienne, probablement de poufsouffle, plutôt douée et qui était proche du concierge de poudlard. Cela rendait ce dernier louche. Il espérait qu'il n'en allait pas de même avec le garde chasse. Le nouveau phénix avait été appelé ici pour un interrogatoire et cette perspective affola de plus belle la probable compagne de Quidditch d'Evanna, surtout lorsque il demanda à son elfe de maison de ramener les instruments de torture. Il lui fut demandé si c'était une plaisanterie et s'il avait vraiment des instruments de torture chez lui. Regardant un instant Kyara qui savait pertinemment de quoi il en retournait, il revint à la jeune femme qui l'interpelait ainsi et lui répondit d'une voix calme où transparaissait un soupir.

- Non, je ne plaisanterais pas avec un sujet aussi grave. On m'a appelé pour une nécessité. J'ai juré de mettre mes talents à votre service et je respecterai toutes mes promesses, que ceux ci me plaisent ou non. Je ferai ce qu'il faut, je ferai mon devoir. Quant aux instruments de torture, disons que j'ai ce qu'il me reste des deux derniers, la "collection" reste encore à faire.

Il baissa alors légèrement le regard avant de continuer.

- Ce ne sera que le troisième interrogatoire auquel je participe de manière... active. Kyara était là aux deux autres et sait à quoi s'attendre. Ce que j'ai appris à ce sujet n'est pourtant pas inné, ces connaissances viennent des dizaines d'interrogatoires que l'on a ainsi pratiqué sur moi, une façon comme une autre d'apprendre.

Conclut le jeune homme avec un rictus amer.

S'énervant, son interlocutrice exprima sa frustration par un coup dans le mur. Nyan ne souhaitait pas voir ce fameux Ergrin, ni maintenant, ni jamais. Elle ignorait de quel monstre il pouvait s'agir mais elle savait qu'il ne s'agissait pas d'un membre de l'ordre, au contraire de Valens. Ce dernier répondit.

- Ce n'est pas un membre de l'Ordre, c'en est l'une des ressources. C'est... un outil.

Ce dernier mot lui avait brûlé la bouche tellement il lui faisait horreur. C'est ainsi qu'on l'avait désigné depuis qu'il était sortit du ventre de sa génitrice, c'est ainsi qu'on l'avait forgé et malgré sa révolte, son éducation avait toujours une influence non négligeable sur sa manière de penser. Il releva alors le regard en direction de Kyara en lui demandant.

- Kyara? Vous savez mieux que quiconque de quoi il en retourne. Vous étiez là lors des interrogatoires et vous étiez là lors de l'assaut de ce soir. Je me fie à votre jugement. Vous connaissez le principe d'un interrogatoire, surtout en urgence, et pourquoi poser des questions ne suffit pas à obtenir de réelles informations. Est-il nécessaire de la faire parler?

Sa réponse, pour Valens, allait clore le débat. Dès lors, il ferait appliquer cette décision.

Le regard du jeune avait cherché celui de Kyara afin qu'elle puisse trancher pour lui. Le référentiel de valeurs qu'on lui avait enseigné était mal adapté pour ce genre de décision. Ses parents lui avaient inculqué que la nécessité faisait force de loi et qu'il ne devait laisser aucun obstacle, surtout pas moral se dresser en travers de son chemin. Lorsque sa personnalité s'était réveillée, il s'était éveillé à la compassion en même temps et ses amis au contraire lui avaient appris à conserver des repères moraux. Mais quand ces enseignements nouveaux tremblaient sur leurs fondations, les anciens réflexes reprenaient le dessus. Entre les deux, il était déchiré.

La jeune femme qui l'avait accompagné durant des péripéties calamiteuses ces derniers temps avait su le suivre et le guider à la fois lors de ces situations. Cette fois encore, c'est ce qu'elle fit. Elle déclara un état de nécessité qui pour Valens réglait la question. Ce qui était nécessaire aux siens ne souffrait ni faiblesse, ni sacrifice trop grand. Certes, à part une minorité, ce n'était pas son cercle familial proche. Pourtant, il avait juré allégeance au groupe entier.

Nyan explosa alors et le serpent à plumes répondit à ses cris d'une voix calme et résignée. Elle affirma d'abord que ce genre d'interrogatoire était une horreur. Il ne chercha pas à le nier.

- Ca l'est. C'est une solution et une horreur. Toutefois cela ne la rend pas moins nécessaire.

Son interlocutrice enragée clama alors qu'il existait d'autres solutions pour la faire parler. Le jeune homme leva alors un sourcil intéressé avant de le rebaisser en comprenant que c'était des paroles en l'air.

- Peut être. Pourtant, que vous n'en ayiez proposé aucune en vous opposant à cette solution ci est pour moi un aveu éloquent.

Effarée, elle lui demanda comment, après avoir été si souvent torturé, il pouvait encore vouloir faire une telle chose. Secouant doucement la tête, il lui répondit.

- Vous vous trompez, je ne le veux pas, je ne le voudrai jamais, pourtant je le dois.

Comparant ces méthodes aux mangemorts que plus rien ne différenciaient d'eux dans ces conditions, elle franchit une barrière qui craquela la prison au fond de son âme où il gardait sa colère enfermée. Elle ne tiendrait pas très longtemps à ce rythme. Déjà sa voix devenait moins calme. Ne comprenait-elle pas la notion de nécessité. Ne comprenait-elle pas les enjeux? Le vert et argent savait que l'enfer était souvent pavé de bonnes intentions. Il savait aussi que les mauvaises ne pavaient pas le paradis.

- A chaque information cruciale que l'on refuse d'arracher à sa source, c'est l'un de nos compagnons qui meurt. Par notre faute. (Il parcourut rapidement d'un bras l'assemblée des phénix du bras) Lequel voulez vous voir mourir en premier de votre main Nyan? Lequel? Je vous en prie, dites le nous pour que nous allions plus vite...

Apparement, il était cette personne là car elle le désigna, pas de sa main mais de son pied. Valens l'avait vu venir car il avait sentit la colère monter et exploser au sein de son interlocutrice. Cependant, il n'esquiva pas le coup. Se contentant de bander ses muscles et se résignant, il reçut le coup de plein fouet, bien campé sur ses jambes. Le choc fut retentissant, elle n'y était pas allé de main morte. L'air fut chassé de ses poumons et les cartilages craquèrent en absorbant l'énergie. Il ne broncha pas et ne poussa pas un cri malgré toute la douleur que cela avait du occasionner, il ne le pouvait de toute façon plus. Seules quelques larmes perlèrent sur ses joues et elles ne coulaient pas pour lui. Car capturant ce pied contre lui de l'un de ses bras, il posa sa baguette de l'autre sur la jambe de la jeune femme en informulant un stupefix qui ne pouvait dès lors plus être évité. Alors qu'elle tombait sur le sol, il récupéra le contrôle de son diaphragme et, retrouvant l'usage de la parole il murmura.

- Je suis navré, cela aussi était nécessaire, pourtant je ne l'ai pas voulu...

Puis il chancela sur quelque pas avant de tomber sur le sol. Apparemment, le cartilage n'était pas le seul à avoir cassé...

A moitié encore dans les brumes de son rêve, il vit une créature étrange... Tiens un loup! Luminescent... Qui parle... Avec la voix de Kyara... Il allait falloir qu'il discute avec cette dernière pour apprendre à faire cela, ce pouvait être pratique. Cette pensée détourna un instant le serpentard de ce qui se révélait véritablement important. Ce rêve était vraiment étrange, les lieux semblaient très réels. Mais! Attendez! Il était réveillé! Elle était réveillée! Poussant un soupir, il se leva et délassa son corps avant de se diriger vers la cave.

Dès que Kyara aurait appelé Ergrin, la danse macabre pourrait commencer. Valens espérait qu'elle allait parler. Ergrin au contraire, espèrerait qu'elle ne parle pas. Question de point de vue et de centre d'intérêt. Néanmoins, le premier étant remplacé par le second, il n'aurait pas vraiment voix au chapitre. Hugin avait fait son travail et avait ramené tous les instruments de torture qu'ils avaient besoin, tous ceux de la liste, pratiquement les même que la fois dernière à quelques ajouts près. Les instruments de torture? Enfin si on voulait. Le tortionnaire se demandait toujours comment on pouvait torturer avec un canard en plastique vibrant. Certes, Hugin l'avait déjà ramené la dernière fois et son maître lui avait demandé de ramener la même chose, ce dernier était donc en tort. Cependant, il était presque certain de n'avoir pas mentionner le canard en peluche et le canard WC. Avait-il si peur des canards qu'il les prennent pour des instruments de torture? Il allait falloir avoir une petite discussion avec l'elfe... toutefois ce n'était ni l'heure ni l'endroit.

Pénétrant dans cet endroit sombre, humide et lugubre (nan la cave), le vert et argent rejoignit Kyara et se posta à ces côtés. Ils étaient arrivés au moment limite et il abhorrait ce qui allait se passer. C'était pourtant nécessaire, le membre de l'organisation secrète en lui le savait. L'information représentait un pouvoir qui pouvait faire toute la différence. Il allait donc le faire sans pourtant en apprécier la perspective. Jetant un regard à Kyara, il lui confirma une interrogation silencieuse.

- Il va être l'heure de l'appeler. Cette tâche te revient puisque vous le connaissez déjà. Après cela, il n'y a plus de marche arrière.

D'autres allaient également venir, d'autres allaient le découvrir, d'autres allaient le craindre ou en être écoeuré tout comme cela écoeurait Valens. Néanmoins, la nécessité avait force de loi et son devoir passait avant ses goûts et ses préférences. Il eut tout de même un léger sourire en songeant que Hugin était le seul à ne pas se laisser dégoûter ainsi. Le maître restait le maître, avec ou sans ses jeux bizarres. Et le maître demandait parfois des choses insolites que Hugin pouvait lui ramener. Pfff... Et qu'était-il sensé faire avec une "ampoule à économie d'énergie". Hugin lui avait dit que cela permettrait au maître de ne pas gaspiller ses forces durant l'interrogatoire. Malgré ces affirmations, même en cherchant bien, il n'était pas convaincu par ces explications.

Valens songea une dernière fois qu'il était dommage de devoir en arriver là avec un visage connu. C'était la dernière fois de la journée qu'il s'accordait une telle pensée, un luxe qu'il ne pouvait s'accorder. Kyara semblait prête car elle lui demanda d'une voix forte.

- Nous avons besoin de toi, Ergrin!

Aussitôt, le jeune homme tomba à genoux et poussa un râle. Les mains au sol, ses gémissements furent audibles tandis qu'il semblait lutter et souffrir. Ses doigts se replièrent un moment sur la pierre nue et un filet de bave s'écoula de ses lèvres avant que son corps ne se relâche. C'était Valens qui avait chut au sol, pourtant c'était Ergrin qui se releva. Ses yeux grands ouverts ne cillaient pas, tandis que des yeux fous parcouraient l'orbite à la découverte de son environnement. Se focalisant sur la prisonnière, il applaudit alors en s'exclamant d'une voix étrangement aigüe.

- Oh! Qu'avons nous là! Un présent pour Ergrin? Ergrin est content de ce que lui offre la mère nourricière. Ergrin va pouvoir s'amuser! J'espère que la mère nourricière en a prévu plusieurs, Ergrin ne sera pas pleinement satisfait de si peu.

Sans attendre de réponse, l'homme s'avança vers la prisonnière. Même si son visage semblait rester immobile, ses yeux dans leurs orbites examinaient la jeune femme attachée sous toutes les coutures. A l'aide d'un scalpel, il taillada avec un petit rire les vêtements d'Evanna, l'écorchant un peu lorsque ses coups n'étaient pas assez précis. Le reste fut arraché et jeté en l'air en riant de plus belle comme s'il s'était agit de confettis. Rammassant des cordes et du fil de pêche, il attacha solidement chaque jambe à un coin de la table, écartées, en prenant bien soin à ce que le fil de pêche rentre dans la chair et les cordes les recouvre. Chacun de ses mouvements serait un délice à regarder tandis qu'elle serait l'auteur de sa propre mutilation. Oeuvrant de manière consciencieuse, on peu de bave coula de sa bouche pour s'étaler sur les jambes de la mangemort et s'écouler de chaque côté. Puis d'une voix toujours aussi aigüe mais mielleuse à l'extrême, il s'adressa enfin à la personne dont il venait d'attacher les pieds.

- Bienvenue! Bienvenue chère amie! Vous êtes l'invitée d'Ergrin. Vous allez voir, vous et Ergrin ferez beaucoup de choses amusantes avant de déjeuner. N'hésitez pas à signaler à Ergrin ce qui vous fait plaisir.

Puis la prenant par les cheveux, il essaya de la redresser une fois sans y parvenir. Réessayant, il en fut au même point. S'énervant un peu, il finit par lancer un sort de paralysie avant de trancher les cordes qui retenaient son buste. La tirant une nouvelle fois par les cheveux, il parvint cette fois ci à la redresser au prix d'une demi-poignée de cheveux ensanglantés qui lui restèrent dans la main. Tout en posant une chaise sur la table qu'il fixa avec un leggluten, il lui murmura afin que les autres ne puissent pas entendre.

- Ecoutez Ergrin. Surtout, quoiqu'il arrive, ne faites pas ce que les autres vous disent de faire. Ergrin sait que ce sont des rabats-joie. Ils enlèveront le jouet des mains d'Ergrin si le jouet n'est pas récalcitrant. Ergrin sera triste si on lui enlève son jouet. Et si Ergrin est triste, Ergrin s'ennerve.

Puis, enroulant le nilon autour de ses poignets dont la peau se déchira sur un centimètre lorsque le fil de pêche en nylon pénétra sous la peau, il les attacha au dossier de la chaise afin que sa nuque repose sur le bord de la chaise. Il consolida enfin le tout avec la corde restante. La position, très inconfortable faisait reposer le poids avant tout sur les poignets et la nuque. Après avoir, par un sort de soin, refermé les chair autour du fil de pêche, il libéra la prisonnière du sort de paralysie. S'écartant pour mieux voir, il parut satisfait de son oeuvre et applaudit alors avec un rire strident.

La fatigue pointait le bout de son nez et cela se voyait sur les traits tirés de Mione. Mais être mère de jumeaux apprenait à vaincre cet état, même lorsque cela se produisait de façon répétée. Elle pouvait donc conserver pleinement ses facultés de concentration, même quand il lui arrivait d'étouffer un bâillement. Et de la concentration, elle risquait d'en avoir besoin. La journée risquait d'être longue, et...compliquée psychologiquement.

Tout était prêt, et même si Mione devait attendre qu'on l'appelle pour descendre une nouvelle fois à la cellule, il lui était impossible de s'assoupir. Elle se tenait en chien de fusil dans son lit, s'infligeant volontairement cette position peu confortable pour garder en tête le rôle qui serait le sien lors de l'interrogatoire. Et pour se convaincre qu'elle ne faisait pas une grosse bêtise... Les paroles qu'avait prononcé Aby quelques heures plus tôt et la scène surréaliste qui s'en était suivi l'avait choquée. Mais pour autant elle n'avait rien fait. Un doute affreux l'habitait depuis : peut-être que Valens commettait une énorme erreur. Peut être qu'Aby avait raison. Peut-être...

Il fallait qu'elle se ressaisisse. Souffrir maintenant pour mieux appréhender les prochaines heures, voilà qu'elle serait sa méthode. Et oublier sa famille, oublier tout ce qui la rattachait à la vie et au bonheur. Ne garder à l'esprit que la raison qui l'avait pousser à accepter de prêter main forte à ses amis. Susciter la crainte pour amener les réponses.

Toute la force qu'elle mettait à se convaincre elle même devenait moins nécessaire au fur et à mesure qu'elle digérait le briefing de Valens. C'était lui qui dirigeait les opérations et elle était heureuse de voir qu'il gérait magnifiquement bien la situation pour le moment. Il y a quelques semaines encore, ils avaient été obligés de reporter une mission, qu'ils avaient pourtant bien préparée. Et comme il s'agissait de la première mission de son collègue, elle avait eu peur que cela le dégoûte, mais il n'en était rien.

Alors qu'elle se répétait encore une fois ses instructions dans sa tête, un Patronus envoyé par Kyara fit irruption dans sa chambre. Le signal.

Quelques instants plus tard, dans la cellule, Mione se cala contre un des murs, ne laissant paraître aucune émotion. Elle ne connaissait pas la Mangemorte en question, mais cela ne changeait pas grand chose.

Lorsque Valens demanda à Kyara d'appeler Ergrin, Mione laissa l'anxiété la dominer quelques instants. Elle n'avait jamais vu Ergrin. Dès lors elle ne savait pas à quoi s'attendre et cela l'angoissait un peu. A peine Kyara eut-elle prononcé son nom que Valens tomba en poussant un râle. Sa souffrance semblait aussi palpable que celle qu'allait subir quelques instants plus tard la Mangemorte.

Il lui fallut par la suite développer des trésors d'ingéniosité pour ne pas s'enfuir de cette cellule. Elle gardait les yeux rivés sur leur prisonnière, préférant éviter de songer à la douleur que devait lui procurer les jeux d'Ergrin. Elle se concentra sur les détails, tentant de deviner s'il allait utiliser le fil de nylon ou la corde, ou les deux. Mais pour le moment, ce n'était pas à elle d'intervenir...

Leur charmante invitée n'était pas en manque de verve concernant l'accueil qui lui était réservé. Toutefois, elle faisait erreur dans l'image qu'elle se faisait d'eux. Les phénix était des anges, c'était vrai, tout à fait vrai, entièrement vrai. Néanmoins, elle confondait gravement les anges avec les saints. Et les anges n'avaient jamais été des saints. Elle allait payer cette erreur au prix fort. Les Séraphins par exemple étaient des juges impitoyables qui ne reculaient devant rien pour accomplir ce qu'ils considéraient comme étant la justice divine. A la distinction que les phénix se souciaient du peuple plus que des lois divines, les deux espèces emplumaient se ressemblaient énormément. Et si les Séraphins étaient l'exemple le plus proches des oiseaux de feu, les autres choeurs des créatures célestes n'étaient pas en reste. Pris par cette révélation, il leva les yeux au ciel et murmura.

- Des anges... L'appel des anges... Pour se repaître des anges déchus. Ergrin a entendu l'appel du Séraphin.

Puis il sembla reprendre ses esprits et songea aux paroles de la future suppliciée et à celles de la mère. Prenant la défense de la première, il protesta. Non seulement il y avait du vrai dans ce qu'elle disait mais elle était sienne, il ne leur laisserait pas. Tournant lentement autour d'elle comme un fauve autour d'un proie impuissante, ses yeux grands ouverts qui jamais ne semblaient ciller restaient braqués sur la prisonnière quelque soient ceux à qui il s'adressait. Il gloussait de manière presque hystérique lorsque son scalpel glissait près de la peau ou laissait une entaille dans les étoffes qu'elle portait encore. Sa langue récupérait de temps en temps la bave qui coulait à la commissure de ses lèvres. Ses gestes devenaient de plus en plus fébriles.

- Non ne leur dis rien, l'invitée est à Ergrin. Elle était juste là avec des amis pour cueillir des champignons, des oignons et autres herbes aromatique. Juste une réunion entre amis, Ergrin le pense. Comme elle le dit, vous ignorez tout d'elle. Alors qu'Ergrin va prendre le temps d'en contempler la beauté intérieure. C'est comme ça que l'on dit Mère Nourricière? L'invitée a raison, vous êtes dépourvus de la moindre civilité. Ergrin parie que vous n'avez même pas proposé à manger à notre invitée de marque. Déplorable sens de l'hospitalité. Honte! Honte sur vous! Ergrin au moins compte bien l'inviter à diner.

Tout en continuant à la frôler de son scalpel, il informula un terrorim. Ergrin appréciait entendre leur extase. Cela donnait un autre goût à son repas. Finissant son tour, il prit le temps d'arracher avec une violence aussi soudaine que brève les morceaux d'étoffe couverts d'entailles qui lui ceignaient encore la poitrine et le ventre, ne lui laissant que de maigres effets sur elle. Laissant là son oeuvre à demi-achevée, il sembla s'en désintéresser et continua à tourner comme si de rien était.

S'arrêtant près de ses jambes nues, il se baissa pour en caresser le mollet. La piquant de la pointe du scalpel, il fit perler quelques gouttes de sang qu'il lécha afin d'y goûter. D'un air appréciateur, il regarda les gouttes restantes avec fébrilité. Sans prévenir, il mordit soudainement dans le mollet et referma doucement ses mâchoires dans un étau puissant mut par une volonté inébranlable. Progressivement, la morsure fut de plus en plus difficile à supporter. Plus qu'une morsure, les dents entaillèrent la peau et pénétrèrent la chair. Peau, chair et muscle, l'émail et l'ivoire s'entrechoquèrent au paroxysme de ce mouvement, libérant un liquide chaud, poisseux et écarlate. Tirant sa tête sur le côté, il arracha le morceau de chair de sa propriétaire légitime et d'un sort arrêta l'hémorragie.

Tandis qu'il mâchait avec un plaisir visible le steak tartare, il désinfecta la plaie en y projetant un peu de vinaigre stocké sous la table. Il prit ensuite un bandage dans lequel il plaça du gros sel prélevé dans le sceau et en fit une compresse nouée sur la plaie. La lente morsure avait déjà été douloureuse mais l'action combinée du vinaigre et du sel ne faisait rien pour arranger cela, bien au contraire. Il reprit alors son tour en prenant le temps d'apprécier toute la saveur de la captive au sens propre du terme. Il ne s'arrêta derrière elle un instant que pour rester songeur et se baisser afin de prendre autre chose sous la table. Déglutissant enfin, il s'adressa de nouveau à elle.

- L'invitée a raison, ils ne sont pas bons! Pas bons du tout! Leur viande est nerveuse et filandreuse, il faudrait la cuire vraiment longtemps pour qu'elle soit comestible. Ergrin vous assure que vous par contre, vous n'êtes pas mauvaise ma délicieuse enfant. Comme vous devez avoir faim, Ergrin vous réserve un morceau de fins connaisseurs. Comment appréciez vous la viande? Saignante je parie, ou rosée, la bonne viande ne se cuit jamais beaucoup ou elle perd de sa saveur. Ce serait tellement dommage. Ergrin suggère tout de même d'abord que l'on prouve à ces mal pensants que vous n'avez absolument rien à cacher.

Reprenant sa marche, il trancha plusieurs fois dans les sous vêtements sans se préoccuper réellement des petites entailles qu'il laissait dans la peau. Il retira alors les derniers morceaux de tissus qu'il restait à la jeune femme à l'exception du bandage tout frais. Le seul morceau de tissu qu'Evanna devait regretter qu'il reste en place. Ainsi nue, bras et jambes écartés, il ne restait effectivement pas grand chose à cacher. Toutefois, ce n'était pas vraiment ce que les acolytes d'Ergrin semblait vouloir voir dévoiler. Ignorant complètement cet état de fait, il s'occupa du repas promis.

S'agenouillant à ses pieds, au sens le plus littéral du terme, il saisit sur sa jambe gauche attachée le pied qui s'offrait à lui? Dans tous les sens du terme cette fois ci, il prenait son pied. Immobilisant cet appendice, il commença toujours aussi lentement à faire glisser son scalpel sous l'ongle qui recouvrait le gros orteil, s'insinuant douloureusement de plus en plus loin. Bien plus loin que la partie visible et ignorant les cris, il poussa le vice jusqu'à la matrice de l'ongle et finit quelques incisions supplémentaires. Cet ongle, il finit par le faire sauter dans un décollement écoeurant de chairs soudées entre elles.

De la lame, il gratta la chair sous l'ongle, d'abord doucement, puis assez vivement, décollant une bouillie de chair sanguinolente. Encore et encore, la lame enlevait couche de chair après couche de chair dans un interminable calvaire. Il ne parut bien vouloir s'arrêter que lorsque il se rendit compte qu'il était en train de gratter l'os. Reposant la chair prélevée sur l'os, il entreprit de cuire légèrement la viande obtenue avec un briquet qui eut pour effet également de commencer une cautérisation. L'os noircissait plus rapidement que la viande ne cuisait néanmoins ce détail semblait lui échapper complètement. Une fois satisfait, il reprit la viande encore sanguinolente et stoppa magiquement l'hémorragie. Une fois de plus, il désinfecta au vinaigre blanc et banda le carnage avec du gros sel.

La viande en début de cuisson en sa possession, il se dirigea vers son invitée.

- Goûtez ce qu'Ergrin vous a préparé avec amour, c'est succulent. Mangez, vous avez besoin de reprendre des forces.

Evanna semblait moyennement disposée à faire preuve de curiosité culinaire ce qui énerva le tortionnaire.

- C'est très malpoli de refuser ainsi un plat cuisiné pour vous, avec des ingrédients de première qualité qui plus est. Ergrin vous pensait mieux élevée que cela!

Pressant violemment l'arrière de la mâchoire, il força mécaniquement cette dernière à s'ouvrir et enfourna la "nourriture" dans sa bouche. Puisque elle s'était montré récalcitrante avec lui, Ergrin lui maintint la bouche fermée et, au bout d'un moment, utilisa sa baguette pour remplir d'eau sa bouche. Puis, du tranchant de sa main, il donna un coup sur le bas de sa trachée pour la forcer à avaler. Ce n'est qu'alors qu'il sembla s'apaiser, s'éloignant un petit peu d'un air boudeur et renfrogné.

Tout ce qui se passait dans cette cellule semblait proprement irréel... Enfin proprement, façon de parler. La tirade de la mangemorte l'obligea à la fixer et ainsi à voir la souffrance qui commençait déja à l'envahir. Ses paroles, elle les comprenait. Qu'aurait-elle pu penser d'autre ? Des Phénix qui pratiquaient la torture, c'était légèrement antinomique... Mais c'était pourtant nécessaire. La gifle que lui administra Kyara ramena la séance dans le chemin qu'elle n'aurait pas du quitter. Le but était d'obtenir des informations, pas de s'interroger sur le bien fondé des moyens qu'ils utilisaient.

Mais la suite des agissements de Valens-Ergrin ne put laisser Mione indifférente. Alors qu'il mordait dans le mollet de la Mangemorte, Mione laissa échapper un "Non !" à peine audible. La bouche sèche, elle n'arrivait pas à croire à ce qui se passait, pensant même à un moment que ce qu'elle voyait n'était que le résultat d'un sort d'illusion, chargé de les plonger tous dans l'horreur... Mais ce n'était pas le cas. Pourquoi tout le monde le laissait faire ? Pourquoi était-elle bouffée par sa loyauté indéfectible envers les Phénix ? C'était la première fois qu'elle était aussi tiraillée, incapable de bouger ou d'agir. Elle aurait tout fait pour l'un de ses frères d'armes, tout. Et en même temps en ce moment, la personne qu'elle souhaitait le plus protéger était cette Mangemorte qu'elle ne connaissait pas et qui venait peut être de plonger certains de ses camarades dans le coma.

Elle fit tout son possible pour essayer de reprendre contenance, de se dire que tout ça n'était pas réel... Mais lorsqu'il s'attaqua au pied de la jeune fille, Mione ferma les yeux. C'était trop insoutenable et même si elle savait qu'Ergrin n'était pas Valens, elle n'arrivait pas à croire à ce qui se passait dans cette pièce. Elle répéta un "Non" un peu plus audible entre ses mains, mais personne ne l'écoutait.

Alors qu'Ergrin s'éloigna enfin de la captive, Mione s'approcha, ne voulant pas croiser le regard des Phénix... Elle ne regardait que 97 et lui dit d'une voix faible, hésitante :

- Je... Désolée. Vous n'auriez pas dû subir tout ça, dit-elle d'une voix évasive. Mais si vous répondez aux questions, tout sera fini, vous savez... Je sais que vous devez protéger les vôtres mais vous en avez assez fait. Si vous parlez, ce sera plus simple pour tout le monde... termina-t-elle en espérant qu'elle l'écouterait.