{L2} Salle de Soins

La tête lui tournait encore et une migraine semblait prendre un malin plaisir à lui tambouriner le derrière du crâne. Elle n’allait certainement pas s’en débarrasser de suite mais elle était vivante, c’était déjà bien non ? Peu à peu, tous ses souvenirs lui revinrent et ceux de la bataille aussi. Le plan était génial et bien ficelé mais il fallait se douter que la peur prendrait le dessus sur l’alliée que l’Ordre du Phénix avait pourtant bien choisi. Mais il n’y a aucune honte à avoir peur, nous avons tous peur de quelque chose. Le secret, c’est d’identifier exactement d’où elle vient, parce qu’une fois qu’un visage est mis dessus, là tu peux lutter, tu peux vaincre tes peurs et même les apprivoiser et en faire des forces... Les membres de l’Ordre du Phénix étaient aussi entraînés pour cela et il aurait fallu se douter que Crystal pouvait craquer. Elle en avait déjà fait beaucoup pour lutter contre le mal et accepter de mettre son existence en danger, ce n’était pas rien. Pour cela, Elenna l’en remerciait de tout cœur. Mais les choses n’avaient pas tout à fait tourné comme prévu.

Le piège tendu aurait dû surprendre les Mangemorts et c’était d’ailleurs ce qu’il s’était passé mais Crystal avait été en danger et la Chef de l’Ordre du Phénix ne pouvait laisser du mal être fait à sa précieuse alliée, elle qui avait déjà tant fait pour eux. Abygaël s’avança pour répondre aux interrogations de la fille aux cheveux de neige et lui résuma la situation. En effet, l’alliée eut peur et son instinct de survie avait pris le dessus, la poussant à lever sa baguette magique et à lancer le premier sortilège qui fut un véritable feu vert pour les assauts. La Mangemorte qui avait torturé Elenna pour Halloween s’était de suite mise à répliquer, ne s’attendant pas à ce que son sortilège soit arrêté par sa fidèle ennemie. S’interposant, la louve avait lancé les hostilités mais malheureusement, la masquée n’était pas venue seule, elle avait bien prévu son coup et son allié sortit de l’ombre pour l’aider. Prise au dépourvue, la Chef parvint à bloquer le premier sortilège mais pas le second qu’elle se prit de plein fouet. Voilà maintenant pourquoi elle était là. Abygael l’avait mise en lieu sûr, laissant les autres sur le champ de bataille.

" Elle risque plus rien... Tu ferais mieux d'aller voir s'il y pas d'autres blessés... "

Il n’avait pas tort. Ici, elle était en sûreté mais ce n’était pas le cas de leurs amis. Aby jeta un regard à Elenna qui acquiesça.

" Vas-y, ils vont avoir besoin de toi et moi j’ai besoin de savoir si tout va bien, si personne d’autre n’est blessé. Fais attention à toi. "

Sans plus attendre, la propriétaire de Waddiwasi s’éclipsa, accordant un dernier regard à son amie. Plus tard, Elenna devrait penser à la remercier. Dans l’Ordre du Phénix, des liens se tissaient et surtout des amitiés. Mais ce qui était bon à savoir, c’était que même si ces relations étaient fortes et fidèles, les Phénix savaient qu’ils se battaient pour autre chose et mettaient en pratique les ordres donnés par la tête de l’équipe. Ils devaient mettre de côté tout amour pour pouvoir vaincre les forces du mal. La demoiselle était fière d’eux, chaque jour un peu plus… Maintenant en tête à tête avec Rurik, ils allaient pouvoir parler un peu plus. Et non, elle n’était pas folle et savait ce qu’elle avait décelé chez le russe. D’ailleurs, ses sens aiguisés dus à des années de pratique ne la trahissaient jamais et le parfum de son allié était toujours le même, il n’avait pas changé en quelques minutes.

" Ça va bien se passer... T'étais en état critique... Heureusement que j'étais là. S'il y a d'autres blessés, je serais prêt... "

C’était un mec bien, à ne pas en douter. Derrière son regard ténébreux se cachait certainement un passé peu joyeux mais aujourd’hui, il était là pour l’Ordre du Phénix et faisait très bien sou boulot. Il semblait sincèrement prêt à intervenir au cas où d’autres seraient touchés comme la fille aux cheveux blancs. Il s’assit au bord du lit, visiblement épuisé par les sortilèges qui avaient sauvé la vie de sa chef avant de poser un regard sur elle, pleins de questions.

" Comment t'as deviné... pour ma lycanthropie ? "

Un mince sourire se dessina sur le visage d’Elenna qui se redressa un peu plus encore, s’asseyant sur son postérieur, les jambes croisées en tailleur aux côtés du colosse. Elle passa une fois de plus sa main sur sa frimousse pour finir de reprendre ses esprits et se racla doucement la gorge pour chasser sa voix rauque avant de prendre la parole.

" Parce que, disons que… je suis habituée à cette odeur ? Je suis un loup-garou aussi et depuis bien des années. Es-tu déjà allé en Norvège ? Les loups-garous présents là-bas sont doués d’une maîtrise à toute épreuve. Mon frère, loup-garou aussi, est allé passer quelques années avec eux, pour apprendre, les étudier puis est revenu ensuite ici. J’étais déjà loup-garou depuis bien plus d’années que lui étant donné que je l’avais moi-même mordu, sans le vouloir bien entendu. Tout ce savoir qu’il a emmagasiné, il ne pouvait le mettre à profit car le contrôle de son « être animal » n’est pas seulement une question de connaissance mais d’années d’expérience. Il m’a fait part de tout ce qu’il avait vu, appris et j’ai commencé à travailler cette maitrise de moi. Cela fait maintenant 11 années que je suis un loup-garou et depuis maintenant plusieurs années, j’ai appris et réussi à me contrôler mes transformations. "

C’était beaucoup d’informations à comprendre mais elle n’en avait pas fini là.

" Maintenant, chaque nuit de pleine lune, je peux prendre ma forme animale tout en gardant un contrôle sur ma conscience. Je ne suis plus l’animal sauvage et meurtrier que j’ai pu être à une époque. A ce niveau-là, mes facultés lupines sont aussi plus accessibles lorsque je suis humaine. Avec beaucoup d’efforts, je peux utiliser mon odorat ou un autre de mes sens même lorsque la lune n’est pas pleine. Mais cela ne fonctionne pas toujours et j’y travaille encore… Oh et je n’ai pas non plus besoin qu’il fasse nuit pour me transformer… "

Elenna était tendue. C’était beaucoup de choses à digérer et peu étaient ceux qui le comprenaient. Certains loups-garous l’avaient même envié et jalousé. Comment allait réagir le russe ?

Abygaël était partie depuis quelques instants déjà... Il pouvait donc parler de sa "condition" sans que quiconque d'autre ne l'entende. Ses alliés de l'Ordre étaient peut-être tolérants et compréhensifs, mais ce n'étaient pas vraiment pas problématique s'ils l'apprenaient... Il avait juste du mal à trouver la meilleure occasion pour l'avouer à quiconque. "Eh, au fait, j'suis un loup-garou, et je mange des innocents quand je pète un câble, c'est à dire à chaque transformation". Mouais... moyen.

Elenna "sentait" qu'il était un loup-garou ? Pourtant il se lavait, hein, peut-être plus souvent que n'importe lequel des autres personnes dans ce QG : entre sa passion pour l'exercice physique intensif, son job de médicomage et sa propension à se retrouver couvert de sang, il finissait très souvent sous la douche. Ajoutons à cela le facteur non négligeable de la détente que cela apportait, cela en faisait presque un hobby !

Sa jeune chef avait donc été aidée, encadrée, soutenue... La Norvège, c'était tellement évident, et pourtant lui-même n'avait pas osé s'y rendre : trop de loup-garous, trop de gens "comme lui", son côté destructeur et sanguinaire qui lui collait à la peau même avec l'aide de la potion Tue-Loup, cela lui aurait probablement apporté bien trop de soucis dans la nation des lycanthropes.

- ... Cela fait maintenant 11 années que je suis un loup-garou et depuis maintenant plusieurs années, j’ai appris et réussi à me contrôler mes transformations.

Onze ans ? Le russe bloqua sur cette durée bien trop précise, bien trop similaire à la sienne... Il écouta à moitié ce qu'elle ajouta ensuite : elle se maîtrisait parfaitement, elle pouvait se transformer à volonté et pouvait se concentrer pour user de traits lupins même sous forme humaine : le colosse de l'Est en était également capable, mais il ne s'en servait jamais, forcer une transformation signifiait subir cette période de contrôle instable, cela allait de pair avec les sens accrus. S'il accueillait la bête pour la moindre chose, cela risquait de dégénérer... De toute manière, il devait d'abord résoudre le problème de son don de légilimancie qui n'en faisait qu'à sa tête.

Rurik tourna légèrement son regard sur le côté, sur celle qu'il considérait comme sa chef au sein de l'Ordre, bien qu'il n'approuvait pas toujours sa manière de faire. Et brutalement, cela lui tomba dessus comme une évidence sous son nez depuis le début : ces cheveux blancs...

« Laisse moi deviner... On doit aussi t'appeler Blanche-Neige quand t'es transformée, j'me trompe ? »

Pendant qu'il parlait, une de ses mains s'était approchée de la jeune femme, attrapant doucement une mèche de cheveux... Bon déjà, ce n'était pas comme du pelage de loup-garou, ça, il s'en souvenait même après toutes ces années. Mais une fois transformée... Il était fort probable qu'il s'agisse d'elle.

« Il y a onze ans, tu étais à Poudlard, non ? Se pourrait-il que tu te sois réveillée dans la forêt interdite, suite à une de tes premières transformations ? »

Ses doigts se crispèrent sans forcément tirer sur cette chevelure inhabituelle : il n'avait pas besoin de confirmation, en fait... Trop de choses coïncidaient... Et la vague de sentiments contraires qui venait de s'emparer de lui ne laissait plus vraiment la place à davantage de réflexion.

Il avait à la fois envie de lui briser la nuque, mais aussi de l'embrasser... Néanmoins, peut-être que son regard, désormais glacial et meurtrier ne risquait pas de laisser transparaître la seconde possibilité.

Reparler de son passé, aurait pu être quelque chose de déplaisant, de douloureux pour la jeune femme. Pourtant, rien de tout ce qu’elle avait vécu s’était transformé en regrets, bien au contraire. La seule chose qui à ce jour parvenait à malmener son petit cœur, c’était ce frère dont elle parlait. Dwayne. Il n’était pas réellement de sa famille, ils auraient pu ne jamais se connaître d’ailleurs, ils n’avaient pas vécu ensemble, pas appris la vie ensemble, rien de tout cela. Mais cela ne changeait rien pour Elenna, le beau brun était comme un membre de sa famille, comme de son sang. Leur avenir avait été lié dans des circonstances bien particulières, et certainement pas celles qui réunissaient autour d’un verre dans un bar.

Un soir de pleine lune, la bête qui sommeillait dans le frêle corps de l’ancienne Poufsouffle avait fait une fois de plus une victime. C’était ce garçon brun à l’allure un peu trop fier, qui s’était décomposé devant le monstre, perdant toute dignité et presque la vie. La louve, après sa nuit de souffrance et de sauvagerie, avait rejoint sa victime et s’était occupée d’elle. Elle avait connu cette solitude nouvelle, cette impression que tout s’écroulait autour de nous, cette envie de ne plus être de ce monde, cette malédiction qui changeait une existence. Si elle avait souffert de devoir apprendre seule sa nouvelle nature, elle s’était promis que Dwayne ne vivrait pas la même chose. Toujours à ses côtés, elle avait été là pour lui apprendre tout ce qu’il devait savoir, pour le soutenir lorsqu’il en aurait besoin, pour l’écouter lorsqu’il devait se confier, pour le réconforter quand ses joues étaient baignées de larmes. Les deux loups-garous étaient devenus comme frère et sœur, rien d’autre.

Les deux étaient devenus membre de l’Ordre du Phénix, puis Auror, scellant leur vie quotidienne même au travail. Si Elenna était loup-garou depuis plus longtemps, Dwayne montrait lui une envie dévorante d’apprendre tout sur leur nature. C’était d’ailleurs pour cela qu’il s’était rendu en Norvège et avait rencontré ce peuple qui leur ressemblait tant. En revenant, il avait gagné en maturité et en connaissances, apprenant tout ce qu’il avait appris et compris à sa sœur de cœur. Elle qui était maintenant là, à expliquer son parcours, ce qu’elle avait entrepris et réussi dans le contrôle de la louve en elle.

" Laisse-moi deviner... On doit aussi t'appeler Blanche-Neige quand t'es transformée, j'me trompe ? "

Ses yeux s’étaient posés sur elle comme si une multitude de questions venaient de naître dans ses pensées. A quoi pouvait-il bien penser ? Et ses suppositions étaient les bonnes. Peu de monde osait poser la question sur la couleur de ses cheveux. Depuis toujours, le blanc était sa couleur. Le blanc et le bleu clair. Cependant, lorsqu’elle se transforma à sa première pleine lune, ce fut comme une évidence. Contrairement à la plupart des loups-garous, en effet, son pelage n’était ni gris, ni noir ou même brun, il était d’un blanc éclatant. Sa fourrure lupine si originale l’avait décidé à faire de sa chevelure la même couleur que celle des personnes âgées, en moins grisonnant. Mais pourquoi Rurik s’intéressait tant à son physique de loup-garou ? En parlant, il s’était dangereusement approché. Si celui-ci ne venait pas de lui avoir sauvé la vie, Elenna aurait certainement reculé devant la carrure du russe mais elle ne bougea pas alors que ses cheveux s’enroulaient autour des doigts du médicomage.

" Il y a onze ans, tu étais à Poudlard, non ? Se pourrait-il que tu te sois réveillée dans la forêt interdite, suite à une de tes premières transformations ? "

Cette question était étrange mais pas tant que ça lorsqu’elle sortait de la bouche d’un autre loup-garou. Se pourrait-il qu’il s’interroge sincèrement sur sa vie passée, sur son acceptation qui avait pris du temps ? Le visage de Rurik se trouvait maintenant à quelques centimètres de celui de la jeune femme qui ne bougeait pas. Elle n’avait pas peur mais sentait une certaine tension qui s’était mise à flotter dans l’air. Sans comprendre réellement ce qu’il se passait, elle planta son regard dans celui glacial du russe. Etaient-ils bleus ou verts ? Elle n’arrivait pas à se décider. La demoiselle laissa ses lèvres s’entrouvrirent pour répondre aux questions de son compère de sa voix douce.

" Je ne savais pas que c’était le surnom que l’on me donnait mais en effet, mon pelage est de la même couleur que mes cheveux : blanc. Tu vises juste une fois de plus, je me suis faite attaquée lorsque j’étais encore élève à Poudlard, dans la forêt interdite. C’est là-bas que je faisais mes sorties nocturnes ensuite alors oui, plusieurs fois je me suis réveillée dans ces bois pourtant sans faire de victime. Juste une fois. Le matin de ma première transformation, un professeur m’a retrouvé à la lisière du parc de l’école et m’a emmené directement à l’infirmerie. Ce matin-là, j’étais pleine de sang mais aucun corps n’a été trouvé et je n’ai aucun souvenir…? "

La poigne du russe s’était resserrée autour de la mèche de cheveux qu’il tenait en otage. Son attitude était anormale mais qu’est-ce qui pouvait bien le mettre dans cet état ? La belle se tut le temps de quelques secondes avant de reprendre la parole.

" Que se passe-t-il Rurik ? Pourquoi toutes ces questions ? "

C'était tellement étrange... Il était si calme, quelque chose se passait en lui, mais il était absolument incapable de mettre le doigt dessus : un vide intersidéral étouffant toute sensation, tout bruit... À moins que cela ne soit une explosion destructrice, assourdissante, déchirante... Impossible de savoir comment il se sentait.

Elenna n'arrangeait pas les choses, était-elle idiote ? N'avait-elle pas compris ?

- Je ne savais pas que c’était le surnom que l’on me donnait mais en effet, mon pelage est de la même couleur que mes cheveux : blanc. Tu vises juste une fois de plus, je me suis faite attaquée lorsque j’étais encore élève à Poudlard, dans la forêt interdite. C’est là-bas que je faisais mes sorties nocturnes ensuite alors oui, plusieurs fois je me suis réveillée dans ces bois pourtant sans faire de victime. Juste une fois. Le matin de ma première transformation, un professeur m’a retrouvé à la lisière du parc de l’école et m’a emmené directement à l’infirmerie. Ce matin-là, j’étais pleine de sang mais aucun corps n’a été trouvé et je n’ai aucun souvenir…?

Oh bon sang qu'elle était lente... Alors oui, elle venait de se réveiller d'un mini-coma dû à une violence attaque de magie noire qui aurait très bien pu la tuer s'il n'avait pas été là... Mais il n'était pas en état d'accepter les moindres excuses. Il se contenta de lui accorder un regard noir.

- Que se passe-t-il Rurik ? Pourquoi toutes ces questions ?

Soupirant, il détendit ses doigts, lâchant lentement cette mèche de cheveux. Son poing retomba sur le matelas, inerte, avant qu'il ne retire complètement son bras gauche, son autre main venant se poser dessus, baguette en main.

« Si aucun corps n'a été retrouvé, c'est parce que ta victime a survécu... D'une manière ou d'une autre, du mieux possible, face à un loup-garou enragé, en tout cas... »

Relevant les yeux vers la jeune femme, il informula un Aelusionem, faisant disparaître momentanément son tatouage intégral au bras gauche, révélant la large cicatrice, dont la forme caractéristique ne pouvait guère permettre de douter de son origine.

Laissant quelques secondes à la louve pour comprendre, il ajouta ensuite.

« ... J'ai eu de la chance... Si je n'avais pas été armé, ça aurait pu être beaucoup plus problématique. »

Ses poings se serrèrent. C'était tout ? C'est tout ce qu'il avait ? Lui dire... Et rien ? Allait-elle mourir sous les remords ? Peut-être pouvait-il lui rendre la monnaie de sa pièce ? Se transformer maintenant, profiter de son état de faiblesse, reproduire ce qui s'était passé, la mettre face à la peur. Rurik s'en sentait vraiment capable... Mais il n'en avait aucune envie.

Grognant, il ferma les yeux, les poings serrés.

« Au début je me disais que si je croisais la personne qui m'avait transformé en cette abomination, j'lui tordrais le cou, l'égorgerait, lui mettrait une lame en travers du crâne... »

Y avait-il besoin de plus d'explications ? Elenna était encore vivante, le colosse de l'Est ne savait plus où il en était... Décidément, cet Ordre avait le chic de le faire dévier de ses habitudes... Il ne savait pas s'il allait y rester bien longtemps.

Brise mon corps,

Brise on âme

Qu'importe,

Puisqu'on à déjà brisé...

...Mon coeur.

with Amy

- Amy...

Qu'est ce qui lui avait pris aussi? Sauver la peau d'un pauvre gars alcoolisé. Tout ça parce que monsieur n'avait pas fait attention où il allait. "Pov' fille". Elle en avait pas marre d'aider tout ces imbéciles, aveugle de ce qui se passait dans le monde? Elle en avait pas marre de vivre avec lui qui lui dictait quoi faire? Saleté de cœur en morceaux. Un jour, il la tueront. La lèvre fendu laissait s'écouler un peu du liquide vital. Des bleus sur les bras, dont l'un déjà couvert de tatouage camouflant les cicatrices datant de plusieurs années. Les épaules jaunes et violettes. Une côte cassée peut-être. Une enfilade sur le nez. Un filet de sang sur la tête. Mais qu'est ce qui lui avait pris? Elle pouvait pas se contenter de boire et se la fermer? Il fallait qu'elle joue encore les héroïnes ! Comme si elle faisait pas ça tout les jours, ça lui suffisait pas. Résultat: le cracmol s'était sauvé, sans se retourner et elle s'est fait roué de coup contre trois gars au sang si pur qu'il devait n'être plus que de la lessive, puis jeté contre une benne a ordure. C'est peut-être ce qu'elle était au fond, qu'une ordure alcoolique qui se battait contre des gens aussi c*n qu'elle. Allez savoir. Les effluves d'alcools enroulaient l'air autour d'elle. Le sang collait à quelques mèches. La jambe gauche était aussi dans un piteux état. La chef allait la tuer. Mais il fallait qu'elle passe ses nerfs sur quelqu'un. Avec le sauvetage, et le changement radicale de la capitaine, Lau' n'était plus ce qu'elle était non plus. Il fallait lui laisser du temps. Un peu de temps. Rien qu'un peu.

- Amy... T'es où bon sang?

L'Irlandaise marchait lentement, boitant jusque dans la salle de soin. Ses mains caressaient la peinture des murs. Froids, et lourds, comme l'était sa carapace toujours présente. Il fallait qu'elle lâche prise, mais comment? Elle n'arrivait pas à se détendre, seulement à se défouler. Sa colère ne s'était pas dissipée en sept ans. Sept misérables années où elle ne se regardait plus dans un miroir. Mais ça lui arrivait de voir son reflet. Et là, tout basculait. Elle se rendait compte qu'il était toujours là. Qu'elle ne saurait pas comment s'enfuir loin de lui tout en le laissant vivre. " Il a suffit que tu joues les héros encore une fois crétin. Laisse moi tranquille, laisse les gens régler leurs problèmes". Nan, il était là, lui souriait, l'écoutait, mais ne parlais pas. Il agissait, comme son cœur lui disait d'agir. Ses côtes la faisait souffrir le martyr. Elle peinait un peu a respirer. Elle survivrait, c'était sur. Elle avait survécu à bien pire après tout. Elle n'était pas faite de métal, mais de chair et d'os comme tout être normalement constitué, bien qu'elle s'en prenait souvent pas la tronche. Et puis, c'était pas la première fois qu'elle revenait comme ça du front. "Fennix va me tuer.... Fennix va me tuer j'le sens..". Tant pis pour elle, elle l'avait cherché".

- Tin, plus je te fuis, plus tu me suis ! Laisse moi tranquille bordel...

La brune avait murmuré, entre ses dents, sa fureur. Avançant toujours vers la porte. Une fois franchie, elle plissa les yeux collant du liquide poisseux et chercha dans l'interrupteur. Pas le noir, elle aimait pas le noir. Son visage revenait la hanter à chaque fois que le noir complet revenait. La lumière s'alluma au bout de quelques tilts, deux ou trois pas plus. Le corps lent et meurtrit s'avança vers la table de secours et, s'appuyant dessus, elle s’essaya. Ses jambes pourtant longues ne laissaient pas la pointe des pieds toucher le sol. La douleur revenait parfois par pics, d'autres fois était plus continue. Sa tête se renversa en arrière. Et ses yeux se refermèrent tout seul. Derrière ses paupières, elle voyait le rouge de sa chair illuminée par la lumière. Et elle attendit...

"Pov' c*ns. Briser mon corps ne sert à rien..."

Un bruit de verre. Schlink. Hé me*de. La tête dans les nuages, ça aidait jamais lorsqu'on manipulait un objet fragile. L'armoire encore ouverte, Amy jeta un coup d'oeil au verre éclaté à ses pieds, la grenadine en main. Au moins, elle avait le mérite d'avoir fait la connerie sans avoir bu. Et ça, peu de gens en étaient capables. Applaudissements ? Non ? Tant pis. Sans lacher la bouteille, la brunette s'abaissa pour ramasser le vert. Quelques chose lui fit mal. Oh p*tain.. La Phénix releva sa main et regarda la longue entaille qui passait d'une extrémité de sa paume à l'autre. Une goutte de sang perla. Puis deux. Puis trois. Puis ça ne s'arrêta plus. Amy était comme dans un bug, incapable de réagir. Ce sang lui rappelait trop.. Trop.. Cette nuit là. Ces mots écrit sur le mur. Cette sorte de transe que jamais encore elle n'avaot vécu. C'était trop.. Qu'avait elle fait.. Qu'avait elle fait.. Ce n'est qu'une partie de toi que tu t'éfforce de cacher au monde.. C'est faux. Amy Shields était tout sauf aussi méchante. Jamais elle n'aurait osé faire une chose pareille. Alors tais toi !

Sursaut avant de se redresser et de basculer en arrière. Réflexe. Se rattraper à la table de travail avec ses deux mains. Respiration haletante qui fait mal aux poumons. Aïe. Cette saloperie faisait mal. Et vu la plaie, il fallait recoudre. Pas de baguette sur elle. Super. Laissée en salle de soin, tête en l'air comme d'habitude. D'un pas lent, la jeune femme monta les escaliers pour rejoindre l'endroit ou elle pourrait arrêter la douleur qui incendiait sa main. Prochaine porte à gauche. Tiens ? Lumière allumée ? C'était pas son style ça. Efforts pour la planète, toussa. Elle accéléra le pas, craignant le pire. Et le pire lui parvint. Elle apperçu Lau', assise sur un des lits, le corps déformé, amoché, lacéré. Envie de crier. Mais non, garder son calme. Première chose qu'on lui avait appris. Vite, elle s'accroupit face à sa soeur d'arme et posa une main sur son épaule.

- Lau'. Lau' ? Laurae ! Qu'est ce que t'as été foutre encore bon sang !

Oups. C'était sorti tout seul. Pétage de plomb, pas grave. Amy se releva, chopa sa baguette sur une des étagère ainsi qu'un longe blanc qu'elle entoura et serra autour de sa main coupée pour éviter l'hémorragie. Ca suffirait pour l'instant. L'infirmière obligea son amie à se coucher. La brunette regarda alors le corps de la Syverell. Punaise c'était moche. En grinçant des dents, elle murmura un #Curo As Velnus avant de denouveau observer le corps. C'était pas droit. Clairement, y avait des trucs pas droits. En soupirant, l'infirmière tourna la tête vers Laurae et dit d'un ton sec.

- Si tu bouges, tu entendras parler de moi ma vieille.

Concentration. Bouffée d'air avant de commencer. Baguette pointée : #Per Ut-Visio. Rayon X qui traversent le corps de l'amie. C'est pas beau. Plein de trucs cassés. Ca va lui faire mal. Mais elle n'avait pas le choix si elle voulait que sa soeur survive. Elle allait survivre. Elle ne lui laissait même pas le choix.

Brise mon corps,

Brise on âme

Qu'importe,

Puisqu'on à déjà brisé...

...Mon coeur.

Une furie. Voilà à quoi ressemblait la Fennec énervée. Fulminante, les cheveux en pétard, la tête comme une bonbonne rouge prête à éxploser. Bonbonne de gaz sous un feu incendiaire. En quelques secondes, la jeune femme s'est sentie petite, gamine, prise sur le fait. Mais elle garda cette impression pour elle même, et ne pipa mot, le visage inexpressif, ou plutôt, semblant de désineressement total. Elle ne voulait pas parler, pas prendre la peine de s'expliquer. Après tout, ça ne servait à rien. A rien du tout. En y repensant, la jeune femme s'était totalement bloqué et avait placé un mur en ciment autour d'elle. Cachant sa faute. Mais le mur en ciment aussi déployé montrait bien que quelque chose n'allait pas forcément. C'était comme ça. Elle ne voulait pas, pas qu'n vienne la prendre en pitié, pas qu'on puisse décider pour elle ce qui faut faire, le bien ou le mal. pas qu'on lui fasse la morale. "Je veux juste qu'on me soigne, je veux juste qu'on me laisse en paix dans ce monde infâme. Je veux juste mourir.". Après tout, qui la pleura ? Les Phénix? Ouin peut-être, mais c'est un soldat, qu'importe. Au bout d'un moment, tout le monde crève, et il aura plus l'ombre d'un souvenir. C'est qu'une poussière. Qui est le c*n qui à déclaré qu'il était facile d'exister mais qu'il était plus difficile de vivre? "J'ai bien envie de lui foutre mon coup de pied dans ce qui lui sert de rectum !".

- Qu'est ce que t'as été foutre encore bon sang !

"ça se voit pas?". Même son esprit semble ironiser avec la débilité de l'instant. Il joue les sarcasmes comme une toquante d'argent. Tic Tac, Tic tac. Énervant au bout d'un moment. Le silence laisse place au vide. Des yeux ailleurs. Des oreilles qui n'écoute que le son de la colère. Des yeux qui se perdent dans le souvenir. Un corps traversé par les coups du passés et une bouche scellé par la honte du présent. L'esprit lui, totalement renfermé à la vision qu'il peut avoir de l'avenir. Elle ne voulait pas voir l'après. Elle voulait rester là, enfermée dans sa bulle nonchalante, ronchon comme pas possible. La vraie Laurae qui à tout perdu mais qui vit avec un coeur brisé, en moins. Pourtant, pourtant elle savait qu'Amy connaissait l'histoire. Elle savait qu'Amy connaissait la vérité qu'elle avait tant caché, jusqu'au jour de son amnésie. Un coeur brisé, qu'il était dur de vivre avec une moitié de soit, et surtout quand une autre avait presque été arrachée des mains des bandits masqués. Surtout après la torture d'un autre de ses semblables.

- Si tu bouges, tu entendras parler de moi ma vieille.

"Fait ton job" semblait répondre sa tête. Mais le silence restait toujours là. La parole était toujours indisponible. La pensée toujours vagabonnante dans les fils qui servaient de réceptacle de l'esprit. Le corps brisé, le corps osculté, le corps soigné. L'âme brisé, l'âme soignée, l'âme guerrier. L'esprit brisé, l'esprit fortifié, l'esprit alerté. Et le coeur? Personne ne l'avait observé. Personne n'avait pris soin de l'écouté. Il était là, faiblissant, malmenant la jeune femme. "Je ne suis qu'une poupée vaudou. Qu'un jouet du destin". Parfois, elle aurait aimé ne pas avoir de coeur, ni de sentiment. Sa puissante magie destructrice, et sa facilité de survie aurait fait le reste. Seule, terrifiante, et enfermée quelque part. Loin du monde. Pourquoi pas devenir une vieille relique dans un coffre enfermé dans un autre coffre perdu dans un lieu piégé et inconnu de tous, dans un autre monde. La où personne ne pourrait la toucher à nouveau sentimentalement parlant. Elle a aimé, son soleil est parti avec une autre: Lynch. Elle a aimé, son frère est parti avec une autre: les eaux. Elle a aimé: sa capitaine a été torturée par ses ennemis. La prochaine fois? Ce sera le tour de ? En attente.

- Aie.

Oui, la douleur, elle l'avait presque oublié dans la sienne. La douleur sur son corps égalait celle qui ne voulait pas la quitter depuis ses 13 hiver. Carmin, Marjory, Ariana, Elenna. Tous avait souffert par sa faute, ou l'avait abandonné. Amy, devant elle... Elle aussi un jour, malheureusement, il lui arriverait quelque chose. Elle aussi ne sera qu'un nouveau coup de poignard dans le coeur meurtri de la Syverell. "Que cela se fasse rapidement. J'ai mal. J'ai froid. J'ai peur. Je veux que ça finisse. Je veux guérir, ou mourir.". La potion ne faisait plus effet, le coeur avait bien trop été malmené par la vie. Et la jeune femme ne pouvait se résoudre à arrêter de se battre. C'était plus fort qu'elle, et elle en mourrait de chagrin si elle ne se battait pas avec les siens. "Laissez moi juste être un soldat".

- Au moins, ils ont prit cher.

Petit rire. Aïe. Douleur. Sastisfaction dans le regard. C'était une bête. Comme un chien. Un chien enchaîné. Un chien de combat. Un chien effrayé par la mort. Un chien qui se battait pour survivre. Un chien qui pouvait y laisser sa peau. Un chien avec une morale, mais contraint de la bafouer par peur de la mort. Un chien... Rien de plus qu'un pauvre clébard qui attends sa dernière heure pour enfin reposer en paix. Un chien trop en colère par la vie. Un chien qui, à la place de la tristesse avait finalement opté pour la violence et pour la colère pour l'aider à porter la douleur.

Agressive.
Alcoolique.
Bagarreuse.
Fière.
Forte.
Fidèle.
Ronchonne.

Voilà le portrait d'une vie. Voilà le portrait qu'elle donnait aux autres.

Rage. Haine. Envie de la taper. Mais vu son état, la taper serait pire qu'autre chose. Son visage était détruit, sa jambe cassée, sa côté pareil, ses bras et épaules recouverts de bleus et d'hématomes. Ca allait bardé une fois qu'elle serait su pied. Une fois son sort de vision arrêté, la brunette soupira et regarda son amie d'un regard méprisant. Elle l'engueulerait après. Pour l'instant fallait réparer tous ces trucs. Pointant sa baguette sur les côtes de la jeune femme, elle passa une main dans son dos pour la maintenir droite. La posture pouvait faire penser à une étreinte mais ce n'était pas vraiment ça dans le cas présent. Les yeux fermé, Amy maintenu le corps de sa soeur d'arme contre elle et droit avant de murmurer un #Brackium Emendo. Lentement, elle sentit la cage thoracique de Laurae se remettre normalement. Après quelques minutes elle la lâcha et s'attaqua à sa jambe en utilisant le même sort. Il fallut cependant plusieurs minutes pour que l'os soit complètement remis en place. Bah oui, la taille faisait que la magie prenait plus de temps à opérer.

- Alors tête de mule. Qu'est ce que t'as été foutre. Et t'avise pas de me mentir parce que tu vas pas apprécier.

Sourire à moitié gentil et à moitié carnassier. La brunette savait bien qu'elle pouvait y aller avec Lau' niveau menaces et insultes puisque la jeune femme s'en foutait royalement. Mais bon. Fallait quand même pas qu'elle le prenne mal sinon ça allait être moyen niveau ambiance au sein des Phénixs mais bon. Une fois la jambe remplacée, Amy posa ses yeux azurs sur le visage de la jeune femme. Là aussi y avait du boulot. Avant d'utiliser un sort pour refermer, il fallait nettoyer les plaies pour ne pas qu'il y ai d'infection. Sinon bonjour la joie et l'hosto juste après. Se relevant, la brunette alla chercher un coton et du désinfectant. Avant de vaporiser, l'infirmière passa une compresse sur les traces de sang pour tout essuyer. Une fois le visage à peu près propre la jeune femme vaporisa du désinfectant sur la compresse et passa sur les plaies.

- Si ça pique je suis désolée mais je peux pas faire mieux.

Quelques secondes d'arrêt avant de regarder son amie et de soupirer. Qu'est ce qui lui avait pris pour être amochée comme ça. Elle s'était encore bagarrée avec elle ne savait qui.. Pourquoi elle pouvait pas rester en dehors de ce genre de truc ? Parce que mine de rien, Amy s'inquiétait beaucoup pour elle. Elle ne l'avait pas montré mais lorsqu'elle l'avait apperçue ça avait été la panique. Pourquoi ses proches devaient se mettre en danger tout le temps.. Pourquoi.. Mine qui s'assombrit et regard qui se baisse. Tristesse et déception.

Brise mon corps,

Brise on âme

Qu'importe,

Puisqu'on à déjà brisé...

...Mon coeur.

Mépris. Haine. Colère. Tout ça pouvait se lire dans les yeux de la Shields. Si on entrait dans ses pupilles, on pouvait découvrir un monde dévasté par les idées noires et la bile jaune. Des rivières de sang, des masques, des mensonges, des étrangers aux visage lisses, comme de la cire fondue par le soleil. Ce regard ne dérangeait pas la Syverell. Au contraire, elle en avait besoin. Pourquoi? Parce qu'il fallait qu'elle pense qu'elle n'était rien. Que ce n'était qu'un chien qui se battait pour survivre. Pour l'espoir de se libérer un jour de cette prison qu'était ce corps trop ressemblant au fantôme qui la poursuivait depuis ses 12 ans. Si elle était née dans un autre monde en guerre... Elle aurait déjà trouver la force de faire des peintures de guerre avec un liquide sanguin. Aurait eu déjà l'amabilité de se battre contre tout type de démons. Aurait été un Dragon ou une créature démoniaque que personne ne pourrait blesser. Ou alors juste une pierre cachée au fin fond d'une boîte que l'on aurait enterré dans un désert aussi grand que Jupiter. Ô oui, mépris. Elle en avait besoin. Sa lèvre en sang esquissa un sourire presque provocateur. Il n'était pas destiné à sa compagne d'arme mais bel et bien à la vie elle même. Celle-ci avait tout fait pour être dure avec la Syverell. D'une dureté sans nom après un si intense bonheur. Et la jeune femme lui rendait la pareil. Marchant, rage au ventre, majeur en l'air, insultant le Temps, l'Amour et ces choses immatérielles. La violence ? Elle s'y complaisait. Robustesse du corps, un esprit fragile et brisé qui semblait se recoller comme si l'on recollait des morceaux de verre avec du vieux scotch poussiéreux. Une boule à neige brisé. Un échiquier qui avait perdu la pureté de son blanc. Doux malheur.

Et Amy ouvrit la bouche. La jeune femme attendait. Qu'allait-elle dévoiler? Colère? Amour? Compassion? Non seulement des petites phrases du style "tête de mule" amicaux. Que fallait-il faire pour qu'on l'insulte à sa juste valeur? Qu'elle revienne avec la jugulaire percée? Un coup tranché de plusieurs centimètre? Un tronc sans tête et sans bras ? La jeune femme perdit son sourire carnassier, provocateur. Le regard se fige, sans la moindre émotion. Ou plutôt si. Un visage qui vient d'appuyer sur la gâchette. L'expression vidée de la colère qui file avec la balle de plomb. Les lèvres figés, sans sourire. Les sourcils droits. Il y avait franchement mieux comme insulte. Elle en était presque déçue au fond. C'est comme ça que l'on grondait les gens pas sage. C'est pas comme cela qu'on rendait justice à un homme tabassé en pleine rue. Tabassé si fort qu'il en était devenu méconnaissable. Tabassé jusqu'à l'inconscience. Et encore, ce n'était pas le premier. Il fallait voir l'autre type d'il y a 3 ans. Il l'avait agressé et s'était retrouvé avec un couteau dans l'épaule. La baguette brisée et jeté dans le fleuve. Au fond, elle n'a jamais su si ce sorcier était encore en vie. N'a jamais su son nom. Encore un fou comme tous ceux qui vivaient ici. Encore un fou, comme elle. A croire que la vie aimait bien les tarés. Et aimait les créer sous diverses formes. Elle n'était que le projet XZB98 K13 un truc du genre. Une expérience de la vie qui a mal tournée.

Mais non, celle en face d'elle n'avait autre chose a dire que "tête de mûle". C'était presque risible. Les effluves d'alcool avaient beau lui monter au nez, elle était pleinement conscience, n'est ce pas? Rien a voir avec son traitement distillé dans l'hydromel. Elle y pensait même pas. Elle secouait juste la tête d'en haut en bas pour répondre à sa sœur d'arme.

- J'me suis battue.

Vérité véridique. Capitain Obvious. Takaregardé. Tavu? Pleinedeboss. Bobo. Douleur.... et sourire. Encore ce fameux majeur à la vie. Si elle pouvait cracher son sang elle le ferait. En tout cas, elle arrivait seulement à tousser comme un minier survivant après un coup de grisou. Ou quelqu'un prenant sa première taf en s'écriant que c'est dégueulasse. Illusion. Encore. Mais illusion proche du réel. Trompe l'oeil. Bien battue oui, ça se voit, mais après? Qui a gagné? C'était ça la vrai question ! Qui avait gagné dans ce combat opposant deux affreux bourrés jusqu'à la moelle? Qu'elle est le chien qui en est sorti vainqueur? Le survivant ? Ou le matraqué?

Elle ne savait si c'était a cause de la magie ou autre, mais la brune senti une énorme douleur dans sa cage thoracique. Comme si on jonglait avec ses côtes et qu'on décidait de faire un barbecue à l'intérieur. Puis après la grosse douleur le soulagement. C'était comme ça dans sa vie a elle. Insulte, combat, quartier mal famés, des prunes... et puis la conscience que l'on est qu'un être immonde, un chien. Puis tout vas bien. On est soulagé. Vous pensez peut-être que c'est complètement faux, qu'on peut pas se sentir bien quand on pense qu'on est pourri. Croyez la Syverell. Quand on est a deux doigts de mourir prématurément, on préfère croire qu'on a rien fait de bon en ce monde pour le mériter. Qu'on le quitte sans le moindre regret. Qu'on a fait notre majeur à la vie, car c'est tout ce qu'on peut faire face à la mort. Mort déjà présente dans la vie d'ailleurs. Mais chut, la Shields ouvre a nouveau la bouche. Fausse alerte, prévient seulement que ça peut faire mal. Ah bah ça oui, la vie faisait mal. Tout pouvait faire mal. La Syverell le savait bien. Et pour guérir, il fallait déjà saigner ou être malade. Ou les deux, comme la Syverell.

- T'inquiète pas pour ça va.

L'alcool sentait fort. Impressionnant n'empêche. Moins l'alcool était fort, plus il puait. L'alcool a 90 sentait que dalle. Seulement le propre, le trop propre. Le décapant. Et on ne pouvait pas l'avaler. L'Hydromel lui sentait bon même si il dépassait les 30 degrés. Franchement... Se brûler les tissus alors qu'on pouvait juste les noyer dans un alcool moins fort pour atténuer la douleur. Elle comprenait mieux les premiers soins au temps du moyen-âge. A coup de vinasse sur une plaie. Va y poto fait toh péter. En replongeant les yeux dans ceux d'Amy, la jeune femme vis quelque chose qui lui déplut énormément. De la peine, la tristesse. Pouah l'horreur ! Peine et tristesse était lié avec l'amour. Et l'amour ça craignait quand on voulait se libérer de cette violence, et de ce monde. Encore une illusion parfaite du cœur. Agissez avec votre tête bon sang de bois. Et la tête de bois elle l'avait. Complètement Rama-Lama Ding Donged, Droopy peckered, fanny packed, f*king the waitress... aujourd'hui.

- Fait pas cette tête. J'suis pas une sainte. Alors arrête de faire cette p*tain de tête.

Si elle était vraiment quelqu'un de bien, alors un fantôme ne viendrait pas la hanter tout les jours au dessus de sa tête, lui disant ce qu'il fallait faire ou ne pas faire. Elle aurait mieux fait de perdre la mémoire pour toujours... ou se tuer en tombant de se maudit balais.. voir même changer de place avec son frère.