Salle d'interrogatoire n°1

En général, il n'aimait pas que l'on s'infiltre en lui comme ça sans vraiment lui demander son avis... Dans son esprit hein. Quoique, c'était probablement valable pour quoi que ce soit d'autre. Mais disons que là... Il y était préparé, et ce n'était pas une petite légilimens qui lui faisait peur, il avait encaissé des tortures bien plus traumatisantes psychologiquement qu'une fouille de son esprit. Oui, ça existait. Et ce n'était pas forcément la magie qui occupait le podium.

Mais il devait faire le vide, car s'il pensait trop à toutes les méthodes de torture qu'il connaissait, ça ne risquait pas d'être facile à cacher à la légilimens. Celle ci termina sa cigarette et l'écrasa au sol (bonjour le respect pour les lieux...) et se planta devant lui... C'était assez comique sur le coup. Peut-être qu'elle mourrait en se brisant la nuque en levant les yeux pour le fixer dans les yeux ? Accident de travail, mort presque naturelle, mais rien qui pourrait lui causer des ennuis... quoique... on pouvait l'accuser de lui avait brisé la nuque. Il l'avait déjà fait, c'était tout à fait possible (et très jouissif...), mais il allait passer son tour. Pas sur une Auror, du moins pas aujourd'hui.

Lorsqu'elle pointa sa baguette sur lui, il fit le vide total, réclamant le silence complet dans son esprit : il était du genre à s'étaler dans tout un tas d'élucubrations mentales, mais son entraînement d'occlumens lui donnait un très bon contrôle sur tout ceci. Elle ne prononça pas la formule, une erreur de sa part, vu que sa "victime" savait pertinemment ce qui allait se passer, la jeune femme ne faisait que consommer quelques forces supplémentaires pour rien. Tant mieux pour lui.

La salle s'écroula tout autour de lui, violemment, et les flashs lumineux entrecoupés d'images commencèrent à défiler. Tout ceci était parfaitement normal et il ferma les yeux, se laissant bercer par le flot de ses propres souvenirs. Mentalement, il serra le poing : faire un lien entre son corps, qu'il maîtrisait si bien, et son esprit était une manière de procéder lui permettant d'être en confiance.

Il se vit tout d'abord offrir tout un tas de reproches à différents élèves, ce n'était pas mauvais, ça, il n'y avait qu'un détail à éviter à Poudlard, c'est pour cela que son cours avec Lizzie Bennet ne défila pas, il fallait l'éviter, ne pas penser au bonheur qu'il avait éprouvé en lui écrabouillant sa petite face de chieuse sur le mur. Le lien avec la médicomagie était presque naturelle, cela ne risquait pas d'alerter l'Auror qui se croyait aux commandes de cette inspection en "profondeur".

Une opération, quelques patients dont il s'occupait, son comportement pas forcément rassurant mais toujours professionnel et efficace... Tout ceci aussi ne pouvait pas être une mauvaise publicité pour sa poire. Il s'attarda un brin sur ceci, éprouvant une certaine allégresse à se voir bosser comme ça, on pouvait voir la passion du métier... Ça ne lui plaisait pas d'être facile à analyser sur ce point là, mais au final, ce n'était pas plus mal.

Une faille se manifesta, ses souvenirs disparurent en un instant. Un sentiment s'empara de lui... Un sentiment qu'il ne connaissait que trop peu, une sorte de regret... à part pour Morgan, mais il n'y avait rien rapport avec lui... Ce souvenir n'était pas le sien ! Non non, il ne fallait pas fouiller dans l'esprit de l'Auror, bon sang ! Il n'avait pas envie. Le visage du professeur Blanchet apparut et il hésita un petit moment. Il essaya d'atteindre ce souvenir, curieux, mais les détails lui échappèrent lentement entre ses doigts tendus, il n'arrivait pas à accéder à ce souvenir bien ancré dans le crâne de la jeune femme. Une sorte de tremblement le fit vaciller dangereusement, et son esprit s'accrocha à un autre souvenir, sans doute un petit peu lié à celui concernant le professeur de Soins aux créatures magiques, et il ne put s'en extraire, les images défilèrent à toute vitesse.

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Haine... Vengeance... Cet homme devant lui était son père ? Oui, c'était ce qu'il ressentait. La rage s'emparait de lui, mais ce n'était pas la même chose, ce n'était pas sa rage habituelle, il ne savait pas ce que c'était que de haïr un de ses parents, et ce sentiment devait être celui d'Anthéa. L'homme le fixa d'ailleurs en prononçant ce prénom, confirmant donc au médicomage qu'il était un peu trop ancré dans ce souvenir. Cela semblait être une dispute, et avant qu'il ne puisse songer à briser le lien, il vit un premier sortilège partir de sa propre baguette... enfin, celle de l'Auror... et le vieil homme fut projeté contre un mur.

Il Elle se rapprocha de son géniteur et le gratifia d'un...d'une... droite ? Non non ! Bordel ! Rurik s'indigna tout seul, en spectateur impuissant. Il ne pouvait pas dire qu'elle frappait comme une fille, ce serait insulter la gente féminine, franchement, ce n'était pas comme ça qu'on décrochait une droite, mademoiselle ! Et sur un vieil homme pas très robuste en plus, pfeuh ! Un second sortilège fit voler le moldu (il discernait à peine que les protagonistes disaient).

Son père, une vengeance ? Il comprit facilement ce qui se passait : ses parents ne devaient pas apprécier le fait d'avoir une personne différente dans la famille, une sorcière... Peut-être souhaitaient-ils revenir aux vieilles méthodes de bûcher... Anthéa était retournée les voir pour se venger de leurs paroles, probablement d'autres actes peu dignes de parents, mais même le criminel trouvait que malmener ainsi cet homme, son père de surcroît, n'était pas vraiment "bien".

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Les images s'arrêtèrent de défiler et Rurik en fut soulagé, il n'aimait pas se retrouver dans la tête des autres lorsqu'il ne le souhaitait pas. Ce qu'il venait de voir était assez troublant, il avait vu et fait des trucs affreuses en Russie, mais quand même... Le contexte de la scène à laquelle il venait d'assister était plutôt malsain.

Ses pensées sur la Russie le firent à nouveau basculer dans ses propres souvenirs... Et ça c'était mal, TRÈS MAL ! Se concentrant à nouveau, il se raccrocha au premier souvenir qu'il put trouver et qui ne parlait pas de mafia, de drogues ou de tueries. De la lumière l'aveugla, une lumière bicolore, rouge et bleue, la sirène des voitures de police. Il se vit alors en train de conduire une de ses voitures de patrouille, le regard rivé sur la route. Ce souvenir datait de son dernier passage en Russie, une course poursuite plutôt mouvementée. Ce n'était pas une chose qu'il voulait montrer, mais c'était toujours mieux que de le voir affalé sur un canapé, avec ses sbires mafieux consommant de la drogue, refusant toutes poudres, graines, pilules et autres formats pour se rabattre juste sur de la vodka.

Alors qu'il allait laisser son flot de souvenirs enchaîner sur une arrestation, son souvenir se volatilisa, une salle d'interrogatoire apparaissant devant ses yeux... Oh non ! Il ne fallait pas qu'elle tombe sur un interrogatoire un peu trop musclé ! Surtout qu'il n'était pas habillé en policier, cela voudrait dire que... Un instant... La femme devant lui ressemblait assez à...

** Oh bordel Rurik, t'es trop stupide... ** songea-t-il.

Il s'agissait de la salle d'interrogatoire, chez les Aurors, l'inspection de son esprit était terminé. La jeune femme semblait toute ébranlée, s'étant laisser tomber sur sa chaise, manquant tout de même de tomber en arrière sur le coup, le fixant ensuite d'un air bizarre.

- Je suis tombée sur un truc un peu différent, là-dedans. Différent, dans le sens imprévisible... T'es un flic chez les moldus?

Elle venait de le voir, pourquoi posait-elle la question ? Il s'installa sur sa propre chaise et croisa les bras, l'air quelque peu déboussolé, hésitant un brin à lui répondre sarcastiquement que non, il n'était pas flic, mais acteur dans des films, et que c'était une honte qu'elle ne lui avait pas demandé de signer son soutien-gorge au vu de sa célébrité dans le monde entier. Sauf qu'au vu de ce qui venait de se passer, il était sans doute préférable de ne pas abuser... et l'idée de toucher un soutien-gorge l'écœurait assez...

« Ouais... C'est un crime d'avoir une vie en dehors de Poudlard et Sainte-Mangouste ? » grogna-t-il.

Il avait essayé d'être désagréable, mais pour une fois, il n'avait pas réussi, son ton était resté neutre, correct. Bon, autant lui faire le récit développé, au moins plus de questions.

« J'ai été arrêté pour une histoire de drogue quand j'étais jeune, je revenais tout juste d'Angleterre et du coup je me suis pas méfié, je suis tombé au mauvais endroit, au mauvais moment, j'ai écopé de trois ans de prison, et quand je suis sorti j'ai voulu retrouver les raclures qui ont réussi à s'enfuir alors que moi j'étais innocent. J'ai fini flic, j'ai monté en grade, j'ai nettoyé toutes les suspicions sur mon compte... Et finalement je continue à bosser là bas quand j'ai du temps, ils ont besoin de moi et je compte pas les abandonner. »

Tout ceci n'était vrai à 100%...Disons 99%, il ne s'était pas vraiment engagé dans la police pour retrouver les personnes qui étaient là le jour de son arrestation (non, il les avait tuées une à une, d'une manière qui n'attirait pas l'attention, en laissant deux en vie, assez blessées pour faire genre que les coupables étaient sous les barreaux).

« Voilà pourquoi j'apprécie pas trop qu'on me soupçonne pour rien tout simplement parce que j'ai une gueule qui colle pas forcément à mes occupations, je suis passé par des trucs, et ça rigole pas dans le coin où je suis affecté en Russie. »

Les bras toujours croisés, il détourna légèrement le regard en grognant. Il n'aimait vraiment pas parler de ça, pour lui ce qui se passait en Russie et en Angleterre ne devaient pas se mélanger, cela avait été le cas avec l'inspecteur Austin, et là il devait limite raconter son passé à cette jeune femme.

Ça ne l'enchantait guère, mais tant que ça ne touchait pas à son côté mafieux, ce n'était pas si horrible que ça... Son regard se posa à nouveau sur l'Auror pour voir comment elle réagissait à toutes ces "révélations".

Maintenant, c'était Rurik qui avait toute son attention. La jeune femme l'écouta avec intérêt. Son air perplexe laissa peu à peu place à une expression concentrée. Elle cherchait la faille dans ses paroles. Ce souvenir était tombé dans son inspection comme un cheveu sur la soupe. Il paraissait presque trop beau pour être vrai. Elle fronça les sourcils. Se pouvait-il qu'il ai pu créer ce souvenir de toutes pièces? Elle n'en était pas si sûre. A moins qu'il ai un minimum de maîtrise en Occlumancie. Mais ça, elle ne pouvait pas le savoir.

La brusque interruption de la connexion entre leurs esprits l'avait sonnée. Sa vision était encore un peu floue. Et la mise au point ne faisait qu'augmenter la douleur qui sévissait dans son crâne. Quelle idée, de pratiquer la Légilimancie debout! Elle aurait dû s'asseoir dès le début. Mais elle s'était surestimée, la jeune Auror. Elle croyait tenir le Russe au creux de sa main. Elle n'aurait qu'à serrer un peu le poing pour l'écraser. Faire de la bouillie de géant.

Contre toute attente, le sorcier dévoila une partie de son histoire. Il n'avait pas l'air enchanté de se livrer ainsi. Mais encore une fois, il prouvait sa bonne foi. Pourquoi mentirait-il? Elle l'aurait vu, si il avait tenté de lui cacher quoi que ce soit. Cette grande masse qu'elle avait en face d'elle... Un flic sur le territoire de la Mère Patrie. C'était invraisemblable. Elle n'arrivait pas à digérer le morceau. Elle l'aurait mis d'emblée de l'autre côté des barreaux. Ce qu'elle s'apprêtait à dire lui faisait grincer les dents.

" - Je t'ai mal jugé. Faute avouée, à moitié pardonnée, non?" dit-elle avec un sourire faux.

Ses maux de tête s'amplifiaient au fil de sa réflexion. Malgré cette soudaine information -et pas des moindres-, elle ne lui faisait pas confiance. Du moins, pas encore. Beaucoup de choses dans sa vie l'avaient rendue méfiante. Et ça la conduisait à agir peut-être trop vite. De se lancer tête baissée dans des histoires. Et parfois des histoires qui pourraient dégénérer. Sans qu'elle ne s'en rende compte. Pour l'instant, la Dowell était persuadée d'avoir le contrôle sur tout ce qui se passait dans sa vie. La réalité ne tarderait pas à lui brûler les doigts.

" - Je te vois assez mal dans le rôle du défenseur de la veuve et de l'orphelin... T'as plus la dégaine d'un tortionnaire. Mais bon, je crois que tu m'as au moins convaincue que tu disais la vérité. " admit-elle sur un ton presque déçu.

Se relevant de sa chaise, elle marcha sur les quelques centimètres qui les séparaient. Elle se campa juste devant lui. Son visage était fermé. Complètement inexpressif. Sa baguette toujours en main, elle l'appuya quelques secondes sur la joue du brun. Elle n'avait pas peur de lui. Même si elle pouvait lire quelque chose de sombre dans son regard. Un secret -ou plusieurs- enfoui miroitait dans ses yeux clairs. Anthéa savait pertinemment qu'elle n'avait pas tout vu le concernant.

" - Fais attention quand même. Je te garde à l'œil. Mais tu peux partir, j'ai eu ce que je voulais."

Elle ne recula pas. Même lorsqu'il était assis, il la dépassait. Et largement. La provocation était inutile, mais elle jubilait intérieurement. Elle se sentait puissante, de pouvoir provoquer ce colosse Russe. C'étaient des personnes comme lui qui l'avaient brutalisée toute son adolescence à Poudlard. Des gros durs cherchant à prouver leur supériorité. Maintenant, c'était elle qui avait le pouvoir. Qu'il s'amuse seulement à lever sa baguette sur elle. Il n'aurait pas à attendre sa riposte très longtemps. Néanmoins, elle lui avait aussi donné la possibilité de simplement quitter les lieux. A sa guise.

L'expression de la jeune Auror était très agréable à observer, comme si quelque chose la frustrait, comme si le fait que Rurik passe pour quelqu'un de bon la rendait malade. Oh, si seulement elle savait tout ce qu'il cachait, il ferait beaucoup moins le malin, mais il s'était chargé d'établir tout un tas de précautions dès qu'il avait commencé à faire des choses pouvant l'envoyer directement en prison. Contrairement à ce que l'on pouvait penser, non, il n'était pas une grosse brute à cervelle d'oiseau.

- Je t'ai mal jugé. Faute avouée, à moitié pardonnée, non ?

Ce sourire n'était pas naturel, et ce ton laissait entendre que ces paroles lui écorchaient la bouche... Dommage pour elle que lui soient accessibles seulement des preuves de son bon comportement, en tant que professeur, médicomage ou policier. Tous les petits détails qui permettaient d'atténuer les monstruosités qu'il avait fait et qu'il faisait encore, elle s'était tout pris en pleine poire !

- Je te vois assez mal dans le rôle du défenseur de la veuve et de l'orphelin... T'as plus la dégaine d'un tortionnaire. Mais bon, je crois que tu m'as au moins convaincue que tu disais la vérité.

Haussant les épaules, il répliqua :

« Ne jamais se fier aux apparences... C'est pas ce qu'on dit, en général ? »

Ayant repris son aplomb, la femme s'était relevée, agissant comme s'il ne s'était rien passé, comme si elle avait toujours eu le contrôle, que rien ne la dérangeait, qu'elle avait toujours raison. D'un geste qui se voulait autoritaire et sans doute tout plein d'autres choses, elle posa sa baguette contre la joue de l'imposant russe. Elle ne faisait qu'essayer de l'impressionner, ça ne risquait pas de marcher, elle n'avait pas la force de plonger à nouveau dans son esprit, il ne craignait rien de sa part... Rien de magique, rien de physique, même installé sur sa chaise il était aussi grand qu'elle et toujours aussi massif. Pourquoi faisait-elle cela ? Avait-elle besoin de vouloir paraître supérieure ? Une frustrée qui voulait du pouvoir... Il ne manquait plus que ça, surtout si elle s'accrochait à sa jambe comme une sangsue...

- Fais attention quand même. Je te garde à l'œil. Mais tu peux partir, j'ai eu ce que je voulais.

Ça confirmait bien ce que le mafieux pensait, il reconnaissait facilement les gens avides de pouvoir, il en voyait au quotidien en Russie. Il allait devoir lui rabattre son caquet...

« Très bien, je m'en vais alors... »

Redressant sa main droite, il la posa sur l'épaule gauche de la jeune femme et se redressa, non sans lui faire sentir un aperçu de toute la force qu'il était capable d'exercer, la dépassant amplement et la surplombant de toute sa hauteur. Sans lui lâcher l'épaule, il ajouta :

« Je confirme que les apparences sont bien trompeuse, on pourrait vous prendre pour quelqu'un de correct... Et pourtant, vous lui avez fait ça... À votre propre père, hein ? Pas joli-joli... Et vous me jugez sans même me connaître... »

Il laissa échapper un léger sifflement en la repoussant, sans y mettre toute sa force, mais fermement tout de même, afin qu'il puisse passer sans lui arracher l'épaule. Si elle s'en prenait à sa propre famille, alors il était fort possible qu'elle soit capable d'un bon nombre de "bavures" au vu de sa propension à abuser de ses avantages d'Auror. Il ne comptait pas se servir de ce détail pour la faire chanter, mais cela lui donnait un bon aperçu du personnage.

A son grand étonnement, le sorcier fit preuve d'un sang-froid exemplaire. Il soutint son regard azur, de ses prunelles plus sombres. Elle aurait pu le trouver tout à fait à son goût. Cette pensée lui fit contracter une légère grimace. Même admettre qu'il était séduisant, ça l'agaçait... Ca lui faisait des nœuds dans l'estomac, même. Anthéa devait bien admettre que, contre toute attente, il l'avait bluffée. Elle n'avait rien trouvé de compromettant en fouillant son esprit. Et elle enrageait intérieurement. Comment un type qui renvoyait une image aussi glauque pouvait-il être blanc comme neige? C'était louche... Et peut-être trop parfait.

Ne jamais se fier aux apparences.

Quand elle le regardait, elle ne voyait qu'une brute épaisse. Difficile de passer outre cette première impression. Une phrase d'un protagoniste de Sin City -un film moldu- lui revint en mémoire. "Moi, j'fais dans le sonore et le dégueulasse.". Ca correspondait bien à Rurik. D'ailleurs, le personnage ayant prononcé ces mots lui ressemblait, étonnamment. A croire qu'il s'en était directement inspiré. Mais il ne semblait pas être homme à se donner un genre. Non, il paraissait authentique. Aussi authentique que la violence animale terrée en chaque être humain. Sauf que lui, il avait décuplé la sienne. Et il arrivait à faire ressortir son mauvais côté, à la blonde. Après tout, ça ne l'étonnerait même pas si il faisait cet effet-là à tout le monde.

Le Russe releva toute sa masse musculaire de la chaise. Sa main était venue enserrer son épaule. Il y émettait une pression convaincante. Nul doute qu'il aurait pu lui briser l'os, en serrant au bon endroit. La jeune femme ne bougea pas. Elle ne daigna même pas jeter un coup d'œil sur sa main. Il se tenait droit devant elle. Il la dominait de sa stature physique. Qu'est-ce-qu'il cherchait à prouver? Qu'il était plus grand? Ou plus fort? Merci, inspecteur obvious. On n'avait pas besoin de les mettre côte à côte pour savoir qui en imposait le plus. Néanmoins, elle le laissa faire, un air indifférent peint sur son visage pâle.

Les mots qui sortirent de sa bouche furent un coup de massue. Son corps trembla. Un électrochoc, qui l'avait projetée en plein dans la réalité. Sa réalité, si moche soit-elle. Un flot de question et d'émotions la submergea entièrement. La rage intense, mélangée subtilement au doute. Comment avait-il su? D'où tenait-il cette information? Ce moment crucial de sa vie, où elle avait pris la décision de déverser toute sa rancœur contre sa famille. Et c'était tombé sur son père. Car c'était lui qui avait toujours parlé pour ses deux parents. Bien sûr, sa mère n'avait jamais prit sa défense. Mais la sorcière la comprenait. Elle n'avait pas voulu s'opposer à Peter Dowell, son père. Elle, sa propre fille, s'était dressée contre lui, en revanche. Un soir d'été, alors que Londres était endormie, elle l'avait passé à tabac. Il l'avait mérité. Amplement.

Son visage dépeignait une désagréable surprise. Une évidence qui s'était imposée à elle. Venant de Rurik en plus, c'était le paroxysme de l'ironie. Lui aussi, il l'avait jugée sans aucune pitié. Sur ce point, il n'était pas si différents, finalement. Sauf que lui avait des preuves de ce qu'il avançait. Sauf qu'il lui manquait une bonne partie de l'histoire pour interpréter ses actes correctement. Non, elle n'était pas violente quand ça lui chantait. Son père avait généré, et entretenu cette violence si longtemps contenue. D'abord, elle se sentit le besoin de se justifier. Elle ne voulait pas passer pour ce qu'elle n'était pas. Mais elle se ravisa, se souvenant qu'il n'avait aucun pouvoir sur elle. Excepté peut-être celui de lui rompre tous ses os en un temps record. Cependant, il ne s'y risquerait pas. Elle recula sous la poussée du géant.

" - De quoi tu... La ferme, se renfrogna-t-elle. Tu ne sais rien de moi. Et certaines personnes méritent leur sort, qu'elles partagent le même ADN que toi ou non. En l'occurrence, il le méritait. " confia-t-elle en détournant le visage. Son ton était imbibé d'une colère froide.

Ses mâchoires se contractaient par à-coups, faisant palpiter les muscles y étant reliés. C'était une façon physique pour elle de ravaler ses paroles. Pourtant, elle lui aurait bien craché son venin à la figure. Mais c'était trop facile. Il aurait certainement adoré la voir se donner en spectacle. A essayer de passer pour quelqu'un de bien. Etait-elle encore quelqu'un de bien? Elle ne le savait plus. Mine de rien, les paroles du brun l'avaient faite douter sur elle-même. De toute façon, elle n'avait absolument rien à lui prouver. Pour qui se prenait-il, un donneur de leçon? Un faiseur de morale à la dégaine d'un tueur en série. Et la logique, dans tout ça?

Tout de même secouée par ce bref échange, elle alla s'adosser contre le mur. Non loin de la table en vrac. L'Auror s'alluma une autre cigarette. Sa migraine lui heurta la tête de plein fouet. Elle l'avait presque oubliée pendant ce laps de temps. Elle fronça les sourcils, se concentrant sur la douleur. De sa bouche, la fumée grisâtre s'évaporait dans les airs. D'un ton las, elle s'adressa à nouveau à Rurik.

" - Sors d'ici, avant que je ne t'envoie une chaise à travers ta tronche de repris de justice sorti d'un mauvais film d'action américain... "

C'était son ultime chance. Il pouvait tourner les talons, et partir. La laisser tranquille avec son passé et tout ce qu'il renfermait. Toutefois, si il s'avisait de rajouter un mot là-dessus... Anthéa n'hésiterait pas une seconde à mettre sa menace à exécution.

À vrai dire, il était plutôt surpris de ne pas s'être pris le moindre sort de la part de l'Auror, il avait visiblement appuyé exactement là où ça faisait mal, là où ça faisait vraiment mal ! Bon, il ne cherchait pas à vouloir se faire attaquer par un représentant de l'élite de la "police" magique. Si c'était le cas, il y avait beaucoup d'autres solutions beaucoup plus simples.

- De quoi tu... La ferme. Tu ne sais rien de moi. Et certaines personnes méritent leur sort, qu'elles partagent le même ADN que toi ou non. En l'occurrence, il le méritait.

Il baissa brièvement la tête, la main sur la poignée de la porte, qu'il avait déjà actionné et tiré de quelques millimètres. Il savait au moins ça d'elle, qu'elle s'en était pris à son père. Cependant, il ne savait pas ce que c'était que d'avoir un père... Les deux hommes qui s'en étaient rapprochés étaient l'autre Rurik, et Viktor. Son rapport à ces deux hommes ne faisait que la blâmer de s'en être pris à son géniteur.

« Ouais, t'as peut-être raison... »

Sans ayant vraiment de ton à sa phrase, elle l'avait probablement mal prise. L'odeur d'une autre cigarette parvint à ses narines au moment où il jeta un œil par dessus son épaule. L'Auror semblait profondément affectée. Pour une fois qu'il ne pouvait pas comprendre un truc, ça l'emmerdait un peu... L'habitude de tout gérer avec ses sbires et d'avoir des connaissances poussées en médecine magique et moldue pour Sainte-Mangouste. Une fois sorti de ses domaines de confiance, ça rigolait moins.

- Sors d'ici, avant que je ne t'envoie une chaise à travers ta tronche de repris de justice sorti d'un mauvais film d'action américain...

Il referma la porte, souriant légèrement. Une chaise, ça ne lui faisait pas peur. Puis c'était marrant, les paroles de la femme collaient bien à l'idée qu'il avait eu de lui dire qu'il était acteur. Dommage, il aurait pu s'amuser un peu plus pour la faire rager. Il aurait sans doute à encaisser la table s'il ne faisait pas attention... Ça non plus ça ne lui faisait pas peur, mais autant éviter de prendre un mauvais coup, non ? Il n'était pas encore masochiste.

« Eh... »

Oh bordel, comment on faisait déjà ? Ah oui... C'est bon, ce devait être comme ça :

« ...je m'excuse, mais c'est toi qui m'a montré ça... C'était pas intentionnel, c'est ça ? »

Bien sûr que ce n'était pas intentionnel, vu qu'il avait forcé l'émergence de ce souvenir (même si elle était incapable de le savoir et ne pouvait que mettre ça sur le compte d'une erreur de sa part). Faisant celui qui se grattait la barbe d'un air un peu gêné, il ajouta :

« J'avoue m'être emporté une fois et avoir brisé quelques os à un criminel pas très coopératif... »

Une fois ? Non mais ! S'il n'était pas si habitué à influencer sur son propre comportement pour faire passer ses mensonges, il aurait probablement éclaté de rire.

« ...Ton paternel devait vraiment le mériter, si tu le dis. Mon expérience avec la branche parentale, ça atteint le même niveau que celui de la température au nord de la Russie. »

Il haussa les épaules. Qu'est-ce qu'il essayait de faire, au fait ? Il aurait pu s'en aller, la laisser ruminer son passé et sa frustration de ne pas avoir réussi à le coincer comme partisan des ténèbres. Les Aurors l'attiraient d'une étrange manière... Peut-être du fait des similitudes avec son poste de policier ?

« Bah... Je me mêle... Désolé, je me barre. » finit-il en grognant.

Se retournant, il ouvrit la porte en grand, cette fois-ci et quitta la salle d'interrogatoire. Tiens, c'était pas Alexander et Elenna là bas ? Probablement pas... Et puis de toute manière, qu'est-ce qu'il pouvait bien leur dire ? "Salut, on est pas censés se connaître super bien, voilà, je suis venu parce que j'ai été convoqué par une folle frustrée, mais y'a pas de quoi s'inquiéter, voilà voilà voilà, bye !"... Non, c'était débile de les approcher ici (surtout qu'ils étaient un peu loin et n'était pas sûr qu'il s'agissait des deux amoureux qui lui servaient d'allié dans l'Ordre).

Par Merlin... Sa migraine lui perçait le crâne de part en part. Elle n'aurait pas dû consulter autant de souvenirs dans la tête de Rurik. C'était la première fois qu'elle utilisait la Légilimancie sur quelqu'un. Enfin, en dehors de ses entraînements pour son passage devant un jury du Ministère. Elle avait oublié à quel point c'était éprouvant, physiquement. La magie lui avait pompé ses forces. Et cette fouille cérébrale l'avait flanquée de maux de têtes lancinants. Bien sûr, c'était un coup de main à prendre. C'était comme pour tout ; il fallait s'entraîner. Pensive, toujours sur la défensive, Anthéa tourna la tête vers l'homme qui était -quelque part- responsable de son état actuel. Quelle bonne idée elle avait eu... Elle aurait mieux fait de lui arranger le visage au Sectumsempra.

Néanmoins, cette pensée mauvaise et vindicative fut éludée par un cliquetis métallique. La porte s'entrouvrit lentement. Il avait donc décidé de s'en aller. Parfait. C'était un effort de moins à fournir, que de lui parler. Surtout pour lui parler de choses qui ne le concernaient ni de près, ni de loin. Elle n'avait pas desserré les mâchoires. Mais il ne bougeait pas, il s'était figé. La blonde l'observait, intriguée qu'il n'ai pas sauté sur l'occasion de se carapater. Le colosse se retourna pour lui faire face, une nouvelle fois. Qu'allait-il ajouter, encore? Au moindre semblant d'ironie de sa part, elle attaquerait. Sa baguette était toujours dans sa main. Gardant un air détaché, elle l'écouta. Et son expression se transforma en étonnement profond au fur et à mesure des paroles du Russe.

L'Auror ne comprenait pas. Elle n'avait pas rêvé ; il avait fait preuve d'une certaine compassion à son égard. N'est-ce-pas? Il s'était même brièvement excusé d'avoir entrevu ces images. D'ailleurs, elle ne savait même pas ce qu'il avait vu, précisément. Elle fulminait contre elle-même, maintenant. Comment avait-elle pu être aussi imprudente? Si il avait eu accès à ce souvenir, c'est qu'elle ne l'avait pas assez bien isolé... Et elle s'était déconcentrée un bref moment pendant la manœuvre, également. C'était une erreur de sa part. Non, deux erreurs. La sorcière se rongeait nerveusement un ongle sans même s'en rendre compte. Evidemment, elle ne pouvait se douter de la vérité des faits. Preuve que la magie n'arrange pas tout.

Sans éprouver la moindre gêne, il confia avoir déjà brutalisé quelqu'un, lui aussi. Elle leva discrètement les yeux au ciel. Et il croyait que ça l'étonnait? Il n'avait pas franchement l'air de se soucier de raconter ça à une représentante de la justice magique. Surtout qu'elle l'avait convoqué ici en soupçonnant ce genre d'activités chez lui. Mais non, malgré ces raisons, il avait dit ce qu'il pensait. Bizarrement, ça ressemblait à une tentative pour la rassurer. De plus en plus étrange, cette attitude passive-agressive... Très subtilement, il avait réussit à fissurer l'image négative qu'elle avait de lui.

Une chose encore plus étonnante se produisit. Le Médicomage lâcha un commentaire sur sa propre situation familiale. Rien de très confidentiel, certes. Cependant, c'était la démarche qui paraissait surprenante. Lui qui la jugeait il y avait à peine quelques minutes de cela. Finalement, il avait justifié son jugement. Le sujet de lever la main sur des membres de la famille semblait le préoccuper. Il s'offusquait qu'elle n'éprouve pas le moindre remord, alors qu'il tabassait les criminels récalcitrants? Ca lui paraissait complètement absurde. C'est avec cynisme qu'elle songea que, peu importe la personne, si son sort est justifié, il est mérité. En l'occurrence, elle avait un paquet de justifications concernant cet épisode de sa vie. Il n'y avait qu'à piocher dans ses souvenirs avant ses 19ans...

La jeune femme restait de marbre face à ses mots. Elle ne voulait pas lui donner la satisfaction de lui répondre. Car elle était elle-même un peu perdue. Dans ses émotions, dans ses certitudes, et dans la valeur de ses choix. De toute façon, l'heure n'était pas au regret. Et encore moins à la remise en question. Ca n'était pas un inconnu qui allait lui faire prendre conscience de la portée de ses actes. Et du regard qu'en ont les autres. Elle avait toujours voulu qu'on l'admire. Elle avait toujours voulu prouver qu'elle pouvait réussir. Mais aujourd'hui, ça ne l'intéressait plus. Aujourd'hui, elle voulait contrôler sa vie sous tous les angles. Et tant pis pour les qu'en dira-t-on!

Avec embarras, Rurik se décida à s'éclipser en grognant. Il n'était pas du genre à s'ouvrir facilement. La Dowell l'avait senti dès l'instant où elle l'avait vu. Même, son visage n'exprimait qu'une froide expression. Et il ne semblait pas non plus être du genre à se soucier tant que ça des autres.Le dénouement de cette situation la laissait perplexe. Pourquoi avait-il changé de comportement au dernier moment? Il avait sûrement dû avoir pitié. Cette affirmation dans son esprit ne la fit que se renfrogner davantage. Ses yeux se posèrent sur sa cigarette, dont la moitié n'était plus que cendres à l'équilibre précaire. Elle la porta à sa bouche et inspira.

Instantanément, une forte nausée l'envahit. Dégoûtée par le goût âcre de la fumée, elle la jeta par la fenêtre dans un réflexe plein de répulsion. Elle se sentait bouillonner intérieurement. Beaucoup d'éléments s'entrechoquaient dans son esprit, en plus d'une migraine à s'arracher la tête. Elle se mordait les lèvres en déglutissant. Elle sentait que son sang-froid était peu à peu en train de céder à la vague de sentiments et d'incompréhension qui la submergeait... La baguette dans sa main. #Eolo Procella. La maîtrise de sa colère à travers la magie. La table, les deux chaises tourbillonnants dans les airs. Suspendus quelques instants. Un grand fracas de meubles qui sont projetés contre les murs. Le silence pesant de la pièce. A nouveau.

Aveuglée par cette crise passagère, Anthéa retrouva ses esprits. Tout était en vrac. Elle souffla de soulagement. Libérée d'un poids, elle se sentait moins étouffer. La nausée était passée, mais pas ses maux de tête. Très vite, elle retrouva une attitude posée et neutre. Complètement indifférente à ce qui venait de se passer. A coup de sortilèges, l'Anglaise remis de l'ordre dans la salle d'interrogatoire. Elle pensa même à nettoyer le mégot qu'elle avait écrasé par terre. Nul doute que cet entretien un peu... spécial, l'avait chamboulée. Mais pour l'instant, elle ne voulait pas y penser. Vraiment pas.

Fin du RP

Ce n'était pas la première fois que Kyara se rendait au Ministère de la Magie. Quelques jours plus tôt, une lettre lui était parvenue la convoquant pour répondre à un interrogatoire. Pendant quelques minutes, la professeure de soins aux créatures magiques avait craint que cela ne soit à cause de Merit. Cependant, elle était rapidement arrivée à la conclusion qu'elle n'aurait pas eu une simple lettre demandant qu'elle vienne d'elle-même au Ministère. Pour une histoire de meurtre, ils devaient surement se déplacer en personne. Kyara ne savait donc pas pourquoi elle devait se rendre dans la salle d'interrogatoire numéro 1, mais elle ne comptait pas mettre un vent aux aurors, autant éviter de paraître suspecte.

Après avoir informé Sergeï qu'elle ne serait pas disponible pour la journée, Kyara avait transplané jusqu'au Ministère de la Magie. Après avoir passé le portique de sécurité et épinglé son badge pour qu'il soit visible, la Française avait écouté les indications pour se rendre à son interogatoire que d'une oreille. Ce n'était pas la première fois qu'elle allait se faire interroger par un Auror. Elle était encore élève quand c'était arrivé suite au Meeting de Petrus qui avait mal tourné. Cela n'avait pas aidé à grand chose, d'autant que les Aurors avaient été arrogants comme il le fallait. Kyara espérait qu'il n'en serait pas de même pour cette fois.

La curiosité la rongeait quand même. Pourquoi voulait-on l'interroger ? Elle ne savait rien de particulier en rapport de Poudlard. Peut-être que Sergeï avait porté plainte suite à l'affaire des créatures inutiles ... Dans ce cas pourquoi ne pas l'avoir informé ? Mouais c'était du directeur, il ne devait surement pas prendre la peine de donner des détails aussi insignifiants. Poussant un soupir, Kyara s'arrêta devant la salle d'interrogatoire numéro 1. Passant une main dans ses cheveux, inspirant profondément, la Française toqua à la porte. Elle hésita à entrer de-suite avant de décider d'attendre. Elle aimait bien les bonnes manières, autant en faire de même et attendre qu'on lui réponde. Si on ne lui donnait pas de réponse, elle entrerait alors pour attendre ses interrogateurs.

LA de Kya

L'Auror était particulièrement de bonne humeur ce jour-là. De grandes choses s'étaient passées. Y avait de quoi être content, en fait. Récemment, elle ne savait pas bien quand, une cagoule avait été capturée. Clyde Higgs, c'était ça son nom. Le masque était tombé, sans mauvais jeu de mot. Après avoir été mise au courant de cette belle prise, la jeune femme du se réunir avec les autres Aurors. Ils avaient discuté pendant longtemps au quartier général. Peut-être même toute la nuit. Fallait qu'ils s'organisent, qu'ils tirent un maximum d'informations du mage. Anthéa ne savait pas comment s'était passé son interrogatoire, à lui. Bof, elle serait au courant bien assez tôt. De son côté, elle avait choisi d'interroger une femme qu'elle avait déjà croisée. Kyara Blanchet.

La professeur de Poudlard faisait partie de la famille du prisonnier. Elle l’avait rencontrée dans un bar miteux de l’Allée des Embrumes. A l’époque, elle sortait tout juste du coma. Elle lui avait confié qu’elle voulait retourner chez les Aurors. Aujourd’hui, elles se retrouvaient. En salle d’interrogatoire. C'était bourré d’ironie, cette situation. La blonde avait pas l’intention de jouer au méchant flic avec elle, y avait aucune raison. Mais elle hésiterait pas à prendre des mesures, si elle devait en avoir besoin. Si radicales soient-elles. En l’attendant dans la salle numérotée du chiffre 1, elle sirotait son thé. Elle inspira le breuvage fumant. Les arômes vinrent lui chatouiller les narines. Thé noir, son préféré.

Le silence fut brisé par des coups distincts sur la porte. D’un mouvement de baguette, la porte s’ouvrit sur la jeune femme. Avec un demi-sourire poli, la Dowell se leva de sa chaise en invitant Kyara à entrer, et à s’installer. Elle ne se fit pas prier, et prit place sur la chaise libre. La sorcière vint refermer la porte derrière elle, puis marcha quelques secondes dans la pièce. Histoire d’organiser ses pensées pour l’interrogatoire. Machinalement, elle glissa sa main droite dans sa poche. Ses doigts vinrent appuyer sur le bouton Play de son iPod moldu. Vieux réflexe, qu’elle avait adopté au fil des années. Il suffisait que l’interrogatoire tourne mal, là, elle aurait des preuves pour étayer. Ses billes bleues se posèrent à nouveau sur la brune. Un éclair carnassier passa dans son regard, malgré elle. Elle était toujours debout.

« - Bonjour miss Blanchet. Ça fait un bail, hein ? Je vais commencer par vous expliquer la raison de votre présence, ça pourrait être bien… Elle se racla la gorge et s’appuya à la table qui séparait les chaises. Alors, concrètement, vous êtes ici pour répondre à quelques petites questions dans le cadre de l’enquête sur Clyde Higgs, votre… oncle, c’est bien ça ? Bien. Elle se décida finalement à s’asseoir, et la regardait dans les yeux d’un air sérieux. Pour tout vous dire, miss, votre oncle a été capturé il y a peu, par mes collègues. Il était très clair qu’il appartenait aux Mangemorts, je suis certaine que vous savez ce que cela implique. Est-ce-que vous étiez au courant de ses agissements ? Serait-il possible que des objets liés à la magie noire soient en sa possession, chez lui ? »

Son ton était calme, et elle était sereine. C’était bizarre, elle ressentait pas cette hostilité habituelle. Ce sentiment renfrogné qu’elle éprouvait quand elle faisait passer des interrogatoires. Quand Rurik s’était trouvé à la place de la brune, ça, elle l’avait ressenti. Mais pas là, non. Y avait quelque chose qui faisait qu’elle avait plutôt tendance à croire Kyara innocente d’office. Encore fallait-il le prouver. Puis c’était pas le moment de se ramollir, eh ! Y avait des questions à poser, des points à éclaircir. Ça ne faisait que commencer.

Lorsque la porte s'ouvrit, Kyara tiqua en constatant qu'il n'y avait pas deux, mais un seul auror dans la pièce et qu'elle connaissait cette personne. Anthéa était de apparemment de nouveau auror. Assise, elle se leva pour faire signe à la Française d'entrer. Avançant, Kyara alla s'installer sur sa chaise pendant qu'Anthéa fermait la porte avant de marcher autour de la professeure de soins aux créatures magiques. Etre debout tandis que l'autre était assis était une technique pour intimider ou mettre mal à l'aise. Cela n'atteignait pas vraiment Kyara, ce n'était pas comme si elle avait le grand méchant dragon devant elle ou comme si elle était en train de se faire torturer. Anthéa glissa la main dans sa poche et un léger bruit se fit entendre. Tiquant légèrement, la brune se demanda ce que c'était avant d'arriver à la conclusion que cela ne devait pas être important. L'auror ne devait pas se balader les poches vides et techniquement, elle était dans le devoir de prévenir Kyara si elle avait des choses en lien avec l’interrogatoire dans ses poches. Ce qui ne devait pas être le cas. Après quelques secondes d'observation, Anthéa se lança.

- Bonjour miss Blanchet. Ça fait un bail, hein ? Je vais commencer par vous expliquer la raison de votre présence, ça pourrait être bien… Alors, concrètement, vous êtes ici pour répondre à quelques petites questions dans le cadre de l’enquête sur Clyde Higgs, votre… oncle, c’est bien ça ? Bien.

Kyara avait hoché légèrement la tête. A présent, elle avait du mal à cacher sa surprise, pourquoi y avait-il une enquête sur Clyde ? L'homme n'avait rien à se reprocher, il avait toujours accepté la présence de la brune comme si elle était sa troisième fille. Qu'avait-il fait ? Troublée, la Française regarda Anthéa s'asseoir en attendant la suite avec impatience.

- Pour tout vous dire, miss, votre oncle a été capturé il y a peu, par mes collègues. Il était très clair qu’il appartenait aux Mangemorts, je suis certaine que vous savez ce que cela implique. Est-ce-que vous étiez au courant de ses agissements ? Serait-il possible que des objets liés à la magie noire soient en sa possession, chez lui ?

Un frisson glacé venait de parcourir l'échine de Kyara tandis que son visage se décomposait. Son oncle, un mangemort. Forcement c'était logique. D'un côté, elle était soulagé que cet interrogatoire ne soit pas en lien avec elle, d'un autre, le choc était dur à encaisser. Finalement les Higgs ne valaient pas mieux que les Blanchet et le mensonge semblait être une chose se transmettant de génération en génération. Anthéa attendait une réponse et Kyara n'en avait rien à faire de la faire attendre. Se précipiter était généralement la meilleure chose pour faire des erreurs. Elle savait quoi dire et quoi faire et sa surprise n'était pas feinte.

- Je n'étais évidement pas au courant de ses agissements. Mon père a été tué par des mages noirs quand j'étais enfant, depuis j'ai une haine viscérale envers eux. Je n'étais pas au courant de ses agissements, je ne serais pas resté sans rien faire sinon. Pour les objets liés à la magie noire, je ne sais pas, cela fait des années que je ne suis pas allé chez lui et généralement, je ne fouille pas pour voir si les gens ont des objets de magie noire chez eux. Je ne vais pas vous être d'une grande utilité je le crains. Vous êtes surs que c'est un Mangemort ?

Il reste encore l'espoir qu'il avait été sous impérium ou quelque chose dans le genre.

Kyara était le genre de femme qui avait de l’allure. Rien que dans les traits de son visage, et dans son port de tête. Elle faisait simplement partie de celles qui avaient du chien. On pouvait lire tout ça sur sa face, vrai. Ce qui rendit d’autant plus criante la métamorphose brutale de son expression. Plus aucune trace de calme équilibré. Un mélange de stupeur et d’angoisse sincères. En tout cas, elle avait l’air sincère. L’Auror ne l’avait pas lâchée des yeux. C’était dans ces moments-là qu’il fallait être le plus attentif. Les réactions des gens pouvaient nous en apprendre long sur eux. Mais là, elle lui aurait décerné un Oscar pour sa prestation. C’était spontané, sa voix tremblait, tout y était. En tout cas si la brune mentait, elle avait énormément de talent pour la comédie. Il lui restait plus qu’à devenir la plus grande actrice-sorcière que le monde magique ai connu. Non, là ça allait trop loin.

Anthéa leva un sourcil après une déclaration en particulier de la miss. Elle devait la mort de ses parents aux cagoules ? Une info’ qui lui avait glissée entre les doigts à la lecture du dossier. Bon, là, elle pouvait plus vraiment mettre en doute ses paroles. Enfin si, il y avait toujours moyen qu’elle ait inventé cette histoire pour brouiller les pistes. Plus c’était gros, plus ça passait. Pourtant, elle semblait réellement bouleversée d’apprendre tout ça. C’était un coup dur, la blonde devait bien l’admettre. Se découvrir un parent Mangemort, y avait de quoi grincer des dents. Elle avait adopté un ton un peu précipité, voire agacé. Elle comprenait, et conservait son attitude posée, droite dans sa chaise. Elle répondit distraitement, sur un ton presque ironique.

« - Vous savez miss Blanchet, quand un sorcier distribue des sorts à tir larigot, qu’il se fait maîtriser par les Aurors, et qu’il a un serpent mouvant tatoué sur le bras… Généralement, c’est un Mangemort. Donc oui, nous en sommes sûrs. Elle posa ses avant-bras sur la table, en joignant les mains. Puis nota mentalement la réponse de Kyara dans son esprit, avant de reprendre d’un ton plus calme. Mr Higgs est donc le père de vos deux cousines, Zoey et Axelle. Savez-vous si elles étaient au courant de tout ça ? Ou même si elles ont un intérêt prononcé pour la magie noire ? Il paraît que les grandes familles sont douées pour dissimuler des secrets. »

Elle savait pas trop pourquoi elle avait lâché ça. Ça sonnait presque comme un jugement. Surtout que techniquement, c’était elle qui était en position de force. Peut-être que c’était juste pour asticoter son interlocutrice. Une sorte de menace dissimulée, qui disait « Je sais tout ». Ah si seulement elle pouvait utiliser la Légilimancie, vite fait bien fait… Là, elle serait fixée. Et pas besoin de perdre du temps en bavardages stériles. La brune pouvait très bien lui mentir en toute impunité, elle n’aurait pas de quoi la contrer. Anthéa ne pouvait que se contenter d’écouter ce que Kyara avait à dire. C’était tout.

- Vous savez miss Blanchet, quand un sorcier distribue des sorts à tir larigot, qu’il se fait maîtriser par les Aurors, et qu’il a un serpent mouvant tatoué sur le bras… Généralement, c’est un Mangemort. Donc oui, nous en sommes sûrs.

Mouais c'était mieux d'avoir la confirmation. Bien que les Aurors n'avaient pas une super bonne réputation, la Française avait assez confiance aux paroles d'Anthéa pour ce point. Kyara se sentait idiote de ne pas avoir découvert plus tôt que son oncle était dans les forces du mal. A trop accorder de l'importance à sa famille, elle avait été plus qu'aveugle.

De son côté, Anthéa ne lâchait pas Kyara des yeux, elle était comme un fauve attendant le moindre signe de faiblesse pour sauter sur sa proie. Pour le moment, la professeure de soins aux créatures magiques n'avait pratiquement pas dit de mensonges. C'était la presque vérité, elle comptait bien botter les fesses des assassins de son père, mais c'était plus complexe quand d'autres membres de sa famille étaient liés à toute cette histoire.

Mr Higgs est donc le père de vos deux cousines, Zoey et Axelle. Savez-vous si elles étaient au courant de tout ça ? Ou même si elles ont un intérêt prononcé pour la magie noire ? Il paraît que les grandes familles sont douées pour dissimuler des secrets.

C'était logique que la conservation dérive sur ses deux cousines. Prenant un air songeur, la Française fit mine de réfléchir pendant quelques secondes. Encore une fois, elle profitait de ce temps pour préparer sa réponse. Faire un faux pas pouvait être fatal pour sa famille, elle ne voulait pas que cela arrive par sa faute.

- Je ne sais pas, quand je voyais mes cousines, c'était sans mon oncle. Elles sont adultes, je n'ai aucune idée de quand ils se sont vus pour la dernière fois. Pour l’intérêt prononcé pour la magie noire ... il faudra leur demander, je n'habite pas avec elles.

Pour la première partie, c'était la vérité. Kyara n'était pas au courant des rencontres de ses cousines. Pour la magie noire, ce n'était pas écrit sur le front d'Axelle et Zoey donc elle ne se mouillait pas trop en répondant cela. Posant ses mains sur la table, la Française jeta un nouveau coup d'oeil à la salle d'interrogatoire. Elle se demandait si quelqu'un d'autre écoutait la conversation.

L’Auror avait la nette impression qu’elle ne tirerait pas grand-chose d’intéressant de Kyara. Du moins, pas de révélation à couper le souffle. Non, rien de tout ça. Elle se résigna à écouter avec attention ce que la professeure avait à répondre. Si elle n’avait pas eu un minimum de tact, elle se serait affalée sur la table en soupirant. C’était d’un ennui, cet interrogatoire ! Ca tournait presque en rond. Enfin, ça ne menait à rien de très concret pour l’instant. Anthéa détestait avoir le sentiment de louper quelque chose. Pourtant, c’était forcément là, sous son nez, bien en évidence. Mais à moins d’être médium et de lire les pensées, elle ne pouvait rien savoir. Une confession subite et inopinée serait la bienvenue. Même quelque chose d’absurde. Ça aurait le mérite d’égayer un peu la monotonie du dialogue.

Miss Blanchet ne semblait pas très au courant de ce qui se tramait chez les Higgs. Bizarrement, elle aurait pensé qu’elles seraient plus proches. Disons que si elle avait eu des cousines, elle aurait tout fait pour en faire ses meilleures amies. Fallait bien avouer que son relationnel avec sa famille était… complexe. Voire inexistant, maintenant que sa mère était… Sa gorge se serra. Bon, c’était pas totalement vrai ; elle avait un cousin en ville. Puis y avait bien son vrai père aussi. Mais lui, c’était une autre histoire. Ce serait pas une partie de plaisir de le retrouver. La sorcière sortit de ses pensées en secouant légèrement sa tête. C’était pas le moment de se laisser distraire par ses petits problèmes.

« - On leur demandera, vous en faites pas pour ça. Elle demeura évasive, mais son ton était tout à fait neutre. Après tout, c’était vrai, puisqu’elles allaient également être interrogées. J’en déduis donc que vous n’êtes pas très proche de vos cousines. J’me trompe ? Enfin, si vous aviez quoi que ce soit à déclarer concernant votre oncle ou ses filles, c’est le moment miss. Sachez que ça ne pourrait que nous aider à progresser dans l'enquête, et que votre témoignage restera anonyme, ça va d'soi. »

Valait mieux prévenir que guérir. Elle ne savait plus bien quoi poser comme questions. Fallait dire que la brune l’aidait pas des masses, avec ses réponses floues. Anthéa devait se concentrer pour trouver les bonnes questions à poser. Faire gaffe à ne pas devenir redondante. Et surtout, ne pas brusquer son interlocutrice. Si elle se froissait et décidait de se fermer comme une huître, c’était mort. Mais bon, elle était pas sûre que ça changerait beaucoup la situation, puisqu’elle avait rien apprit de fameux jusque-là. Ça se trouve elle était juste plus douée sur le terrain qu’en interrogatoires. Que voulez-vous, on pouvait pas être bon partout.

Kyara voyait qu'Anthéa était en train de tourner en rond et c'était amusant à voir. Amusant, mais pas pour autant facile, la professeure de soins aux créatures magiques ne devait pas faire de gaffes pour protéger ses cousines. C'était trop tard pour son oncle, mais il saurait surement se débrouiller. Au pire ... Kyara serait présente pour soutenir Axelle et Zoey, elle savait ce qu'était l'absence d'un père, d'autant qu'il n'arrivera surement rien de très grave à Clyde. Il passera un petit moment à Azkaban avant de trouver un moyen de s'échapper, cela allait probablement se passer comme ça.

- On leur demandera, vous en faites pas pour ça. J’en déduis donc que vous n’êtes pas très proche de vos cousines. J’me trompe ? Enfin, si vous aviez quoi que ce soit à déclarer concernant votre oncle ou ses filles, c’est le moment miss. Sachez que ça ne pourrait que nous aider à progresser dans l'enquête, et que votre témoignage restera anonyme, ça va d'soi.

Le ton d'Anthéa semblait plus léger, elle mâchait ses mots comme si la discussion n'avait plus d'importance. Ce n'était pas très professionnel, mais Kyara pouvait comprendre. Elle ne jouait pas vraiment le jeu avec l'Auror. Restant impassible, elle décida de ne pas répondre à sa question. Elle ne voyait pas ses cousines toutes les semaines, mais ce n'était pas pour autant qu'elle n'était pas proche d'elles. Si Anthéa voulait se faire ses propres idées, c'était à elle de voir, Kyara ne comptait pas lui donner une information sur cela.

- Je n'ai rien d'autre à ajouter.

Retenant un soupir, Kyara se demanda combien de temps elle allait encore rester. Quitte à ne pas être à Poudlard, autant en profiter et se balader à Londres ! Elle pourrait même se "perdre" dans le Ministère de la Magie. C'était bien tentant.

Elle n'avait rien à ajouter. La professeure confirma donc que cet entretien tournait en rond. De son côté, Anthéa n'avait plus vraiment de question. Enfin, rien ne lui venait à l'esprit en tout cas. Malgré les réponses et réactions cohérentes de Kyara, elle était à moitié convaincue. Elle ne remettait pas du tout en cause les déclarations de cette dernière, non. Tout ça tenait la route. C’était assez inexplicable comme ressenti. Comme si elle était passée à côté de quelque chose. D’autre chose. Cette affaire allait faire du bruit, c’était certain. Et c’est toujours dans ce genre de circonstance que des choses tenues secrètes sont dévoilées. Exposées au grand jour, et à la vue de tous. Pas impossible que la famille Higgs-Blanchet puisse dissimuler des secrets. Et ils seraient sans doute bien gardés, si c’était le cas.

La blonde secoua la tête et cligna des yeux. Cette foutue manie à se laisser emporter par ses pensées… Quoique ça relevait plus de la divagation là. D’accord, elle était plutôt une personne soupçonneuse. Surtout depuis l’accident et encore plus depuis que le badge d’Auror était épinglé à nouveau sur sa veste. Enfin, de là à émettre des hypothèses sur une famille dont elle ne connaissait rien… Fallait vraiment qu’elle trouve un moyen de dormir plus la nuit. Silencieuse depuis quelques instants, elle se rendit compte que c’était peut-être le moment de libérer son témoin. De toute façon, elle n’avait plus besoin d’elle. La boucle était bouclée.

« - Eh bien nous en avons fini, il me semble, miss Blanchet. Merci pour vos réponses. Je ne vous raccompagne pas, j’ai un rapport à faire. Et puis, vous devez connaître le chemin de la sortie… conclut-elle en s’emparant d’un parchemin. Avant que la brune ne sorte de la pièce, Anthéa ajouta en dardant son regard bleu sur elle. Vous savez où me trouver si vous aviez la moindre chose à déclarer. »

Suite à cela, l’Auror reporta son attention sur le parchemin, laissant Kyara repartir du Ministère. Une fois seule, elle se remémora les réponses exactes de celle-ci. Elle aimait que les choses soient faites avec précision. D’un coup de baguette, elle fit apparaître une plume et un encrier. Avec précaution, elle commença à rédiger son compte-rendu. Même en couchant ça sur du papier, elle ne trouva aucune faille dans le discours de la professeure. Elle n’aimait pas ça, et avait la sensation d’être passée à côté de quelque chose. Ou alors peut-être qu’il n’y avait rien à trouver, tout simplement. Mais ça la frustrait. Voyez-vous, lecteurs, son boulot c’était de trouver des réponses. Et quand elle n’en trouvait pas, elle avait la nette impression de mal faire son travail. Sans doute n’avait-elle pas posé les bonnes questions. En tout cas, les interrogatoires officieux étaient bien plus marrants à gérer !

Fin du RP

Suite à la convocation

La dernière fois que Finrod s'était montré au Ministère de la Magie, il présentait l'examen de transplanage, examen réussi. Mais cette fois-ci, c'était différent, il était apparemment convoqué pour témoigner. Pourtant l'attaque de sa boutique avait eu lieu il y a un long moment déjà et le gérant n'avait eu aucune nouvelle depuis, les Aurors s'étaient contentés d'écouter les dires de chacun des employés de la BAM. Mais peut-être qu'ils avaient découvert de nouveaux éléments et qu'ils tenaient à lui en faire part. L'ancien Serpentard se rappelait vaguement des noms des agents magiques qui s'étaient déplacés et aucun ne ressemblait à Anthéa Sadler. Sadler... Sadler... Non, ce nom lui était inconnu. Décidément, il allait en rencontrer des Aurors. Après la visite de Matt Austin à la boutique, celles venues pour constater les dégâts à la boutique et encore une autre à présent. Enfin, dans tous les cas, il avait prit ce qu'on lui avait ordonné (!) de prendre. Il devait montrer patte blanche. Faire comme s'il avait oublié certaines de ses activités récentes peu recommandées.

C'était donc avec son gros grimoire où les ventes étaient inscrites qu'il arriva dans l'immense Hall du Ministère. Finrod espérait qu'il ne passerait pas trop de temps ici, le grimoire allait manquer à la BAM, même s'il avait donné comme instructions que les ventes devaient être notées sur un parchemin et qu'il recopierait tout une fois rentré au bercail. Il y avait du monde, comme d'habitude probablement. Il n'était pas facile de se frayer un chemin, du moins si on ne faisait pas la taille du Fourchu. Les gens s'enlevaient de son chemin presque automatiquement et c'était fort agréable. Pour trouver le salle où on lui avait sommé de se rendre, le Fouchelangue avait dû demander de l'aide. D'ailleurs, en y repensant, c'était étrange de se faire convoquer pour simplement témoigner dans une salle d'interrogatoire. Et cette enquête ouverte. Est-ce qu'ils avaient réussi à tirer des informations des créatures magiques lâchées dans Londres ? Très peu probable. Le sorcier s'était assuré que les sirènes et autres animaux ne le voient jamais et lors de leur réveil, il n'était plus sur les lieux. Donc pas beaucoup de risques à ce niveau-là. À moins qu'il ait commis une erreur ? Il le saurait très probablement bientôt et si les autorités magiques avaient quelque chose contre lui, il serait déjà au courant et serait en train d'attendre son procès. Pas de gros soucis à se faire donc. Il suivit la direction donnée et arriva devant une porte avec un chiffre 1 indiqué. Cela devait être ici. Mais personne dans les environs, ne sachant que faire, il toqua à la porte. Le comité d'accueil l'attendait peut-être déjà dans la salle. Où alors ne tarderait pas. Le jeune homme replaça son capuchon, il ne savait pourquoi mais ses cicatrices le démangeaient aujourd'hui. Cela arrivait de temps à autre mais cette fois-ci, c'était différent et vraiment dérangeant.

LA de Rurik & de Finrod

Son briquet émit un cliquetis à peine audible. L’étincelle se mua en flamme orangée, élancée vers le ciel. Ou plutôt, vers le plafond d’une des nombreuses salles d’interrogatoire du Ministère. L’Auror tira une longue bouffée, en fermant les yeux de délice. Le goût âcre de la fumée lui emplit la bouche. Elle descendit jusque dans ses poumons, pour ressortir, toujours grisâtre et compacte. Merlin, ce qu’elle aimait fumer. Surtout dans des instant qui précédaient une jubilation intense. Là, son cerveau était sur le point d’exploser tant les endorphines s’y bousculaient. Elle roula des épaules pour détendre ses muscles, et fit basculer sa tête à droite, puis à gauche. Des craquements secs d’os. Anthéa soupira avec délectation. Puis ce fut le tour de ses phalanges. Crac, crac, crac.

Parfaitement calme et sereine, le corps souple et affalé sur sa chaise. Sa tête négligemment rejetée en arrière, avec ses cheveux blonds en suspens dans l’air. On aurait pu la croire morte, si quelqu’un l’avait vue comme ça. Complètement désarticulée, comme une poupée de chiffon. Le seul fait qu’elle tenait sa clope entre son index et son majeur prouvait le contraire. Très lentement, elle se redressa, ses cheveux cachant intégralement son visage. Son souffle faisait bouger quelques mèches de cheveux. Elle tira sur sa cigarette jusqu’au filtre. De toute façon elle l’avait laissée se consumer. En douceur, elle la tua dans le fond propre d’un cendrier en verre. D’un coup de baguette, la fenêtre derrière elle s’ouvrit en grand. Soudainement, elle s’était souvenu que Rurik ne supportait pas la fumée.

D’ailleurs, elle entendit toquer à la porte. Les coups frappés lui firent lever les yeux d’un air sceptique. Comme si elle était surprise et n’attendait personne. Un large sourire se dessina s’étira sur ses joues pâles. Dire qu’il n’avait absolument aucune idée qu’il allait tomber en face de son ex-victime. Dommage pour lui, la victime avait un goût amer de vengeance dans la bouche. Et la blonde comptait bien en faire baver à Elensar. Les choses étaient foutrement bien faites, puisque la justice le rattrapait tranquillement. Du coup, elle se demanda comment elle devrait l’accueillir. L’option qui lui plut le plus, fut la moins saine. Oh, elle allait lui sourire, lui parler sur un ton doucereux. Et même lui ouvrir la porte, tiens. Les deux sorciers se retrouvèrent nez à nez. Elle avait une lueur sanguinaire qui dansait dans ses billes bleues.

« - Monsieur Elensar… Entrez je vous prie. »

La Sang-Mêlée avait reluqué son visage assez longtemps pour s’imprégner de son expression. Et c’était presque aussi délicieux qu’un vrai châtiment. Sa peau trembla, rien qu’à ce mot, et elle ferma les yeux alors qu’il s’installait. Des scénarios plus horribles et violents les uns que les autres jalonnaient le futur qu’elle réservait au serpent. Ah, si seulement elle avait eu la liberté de les mettre en pratique. Avec résignation, elle sortit de sa torpeur et laissa la porte ouverte avant de regagner son siège. Ses yeux se posèrent sur les livres de compte qu’il tenait contre lui, et remontèrent jusqu’à son visage à moitié dissimulé. Elle ne put s’empêcher de retenir un sourire sournois.

« - Bien, je crois que j’ai pas besoin de me présenter. On va attendre un peu pour commencer, il manque une personne… Devançant l’interrogation du sorcier, elle reprit, J’ai pris la liberté de faire venir un Médicomage, en fait. Vu notre… passé commun, lâcha-t-elle avec un rire nerveux, si il te venait l’idée de me sauter dessus, il serait un parfait témoin pour ton procès, elle lui lança une œillade féroce. En plus de ça, je suis sujette aux migraines, et elles sont assez violentes. Il sera là juste au cas où, que je puisse mener mon interrogatoire tranquillement. Puis elle regarda par-dessus Finrod, Rurik se tenait dans l’encadrement de la porte. Justement, il vient d’arriver. Entre Rurik, j’allais lui expliquer pourquoi il a été convoqué. »

Le géant Russe vint s’appuyer contre le mur derrière Sadler, sans un mot. Elle s’éclaircit la gorge. « Si tu es là, c’est parce que j’ai besoin de renseignements pour l’affaire des créatures magiques dans Londres. Quelqu’un les a lâchées sur les Moldus, et le plus logique, c’est qu’il se les soit procurées chez toi, dans ta boutique. Les livres de comptes serviront à identifier l’acheteur, et avec les dossiers du Ministère, on pourra lui mettre la main dessus rapidement. Elle haussa la voix. Vincent ! Tu peux venir s’il te plaît ? Un homme au look de bureaucrate parut dans la salle. J'aurais besoin de tes talents ; tu pourrais me chercher un dossier ? On cherche une personne qui aurait acheté 3 hippogriffes, 2 sirènes, 5 strangulots et 2 acromentules. Les livres de compte sont là. »

L’homme opigna du chef aimablement, et Anthéa le remercia avant qu’il ne disparaisse, embarquant les livres de comptes d’Elensar. Elle n’avait qu’une envie ; révéler à cet idiot qu’il était largement soupçonné d’avoir lui-même organisé tout ça. Mais non, elle voulait le faire mariner encore un peu. Et puis elle était absolument convaincue que la présence du Phénix l’avait retourné. Ça, il avait pas dû le voir venir. En attendant que son collègue ne revienne des archives, elle le questionna :

« - De ton côté, en tant que gérant, tu n’aurais pas souvenir d’un acheteur un peu particulier ? Parce que quand même, ça s’oublie pas un sorcier qui débarque pour acheter autant de créatures magiques… Surtout que c’étaient pas vraiment des boursouflets. »