La vague prend de la force, de l'ampleur, de la place. Elle s'étend à l'infini, dans ce mouvement de courbe au-dessus de l'univers. Mon pinceau vient titiller le bout du mur, en sachant qu'au-delà, il y a un monde, dans lequel la vague continue d'exister. Le bleu vient s'allier à la crème, ballet de deux couleurs.
Elias raconte.
Un souvenir lointain, encore flou dans son esprit. D'une personne qui a, pour sûr, réellement existé. Une personne que je ne connais pas mais qui repeignait, elle aussi, les villes.
Il cherche, patine, mouline, en quête d'une identité -qui ne vient pas.
Je me sens incapable de l'aider. Celui ou celle dont il parle, je ne lea connais pas. Je me tourne vers lui, l'air désolé. Et je vois le Moke. Pas Klaus, mais celui du mur. Bientôt rejoint d'un chat, parce que sinon Oreo va faire la gueule.

-Bah dis donc, t'es doué toi ! Je savais pas que la peinture c'était ton domaine. Moi, je te connaissais surtout dans tes chaudrons.

Finalement, les kolocs font apprendre beaucoup de choses.
Tandis qu'Elias effleure du regard et du pinceau des buildings qui viennent s'inviter dans le décor des Alpes -l'énorme métropole qui pointe le bout de son nez dans cette région reculée de montagne- je commence à faire les soeurs étoiles au-dessus de ma plage. Parce que les astres, c'est chouette. C'est gentil. Et même

-Si jamais t'arrive pas à dormir, elles te raconteront des histoires et chanteront des berceuses, je dis à Elias en désignant, du pinceau, mes étoiles.

Pour qui sait écouter, elles racontent des tas et des tas de trucs.
L'après-midi s'étire et la séance peinture s'achève. Attaque-surprise du Mokeur -un point rouge sur la joue. Et la joie. C'est beau, merveilleux, magnifique. Une petite danse de la joie de ma part et j'étreins Elias :

-C'est super, c'est chez toi !

(Ellipse)

Un bon dîner, une soirée tranquille.
Tout le monde finit par aller se coucher. Oreo a déjà trouvé sa place sur le lit du Mokeur. Roulé en boule, il dort d'un sommeil profond. J'amène un coussin pour Klaus. Papy Klaus qui doit passer près de vingt heures sur vingt-quatre à dormir ou sommeiller. Il se pose dessus. Je l'enroule de sa petite couverture attitrée pour qu'il passe une bonne nuit. Et je traîne, à mon tour, mon matelas jusque chez le Mokeur.
Pour étrenner une nouvelle chambre, quoi de mieux que d'y dormir ?
Je me sens toute bien, au fond de ma couette.
Elias a réussi à négocier un bout de place avec Oreo.

-C'est chouette, je murmure. On dirait une vraie famille.

Et ça. C'est beau.

Fin du RP.
Merci beaucoup

Une année qui, bientôt, va prendre fin. Dans le froid hivernal. Et qui dit fin d’année dit... fêtes, bien sûr ! Noël, of course ! Le moment de réunion, se retrouver, (se dire enfin les quatre vérités) profiter des présences qu’on voit, parfois, peu le reste de l’année. Alors, bien sûr, il peut y avoir les conflits de famille qui ressurgissent dans une telle situation. Voyez, les moments où on se balance à la figure l’assiette de bûche glacée.
Mais dans mon cas, je suis certaine que ça n’arrivera pas.
Ni aujourd'hui, ni demain. Et ce Noël sera un des plus beaux. Dans la simple joie et bonne humeur.
Comme chaque année, mes parents m’ont demandé si je comptais venir. D’un autre côté, y’avait Elias, qui n’avait pas de plan particulier pour ce 24 décembre de convivialité. Sinon être à Thermidor. Et puis Adonys, qui ne paraissait pas spécialement partant pour voir sa famille pour l’occasion. J’ai retourné le problème dans tous les sens et j’ai finalement trouvé LA solution. Un 24 décembre à Thermidor, un 25 décembre à Londres. Et proposer à Adonys de venir.

J’ai vaguement déjà parlé de lui à mes parents. Mais sujet un peu glissant, parce que je sens bien que l’ombre d’Asclépius se glisse bien souvent dans ces conversations. Outre le fait que ma mère l’aimait vraiment bien, il y a surtout la question sous-jacente du : mais que va penser Magda Von Sacht de tout ça ?! Elle qui n’a toujours pas renoncé à sa conquête d’un nom plus noble.
Des pensées qui se font à mi-mot. On n’a jamais vraiment eu de débat à ce sujet. Parce que je leur dirais, moi. Que mes grands-parents, je les em*erde maintenant ! J’ai enfin décidé de vivre pour moi. Etre maîtresse de ma propre existence. Et non plus subvenir aux caprices des autres.
Je suis maintenant assez grande, assez sûre de moi pour tout envoyer bouler. Et affirmer que je vivrai ma vie comme je l’entends.
Bref.
Donc mes parents connaissent l’existence d’Adonys. Mais sans plus.
Alors, je sais pas pourquoi, je me suis dit que Noël, c’était l’occasion parfaite pour les présentations.
…
Peut-être qu’en fait on n’échappera pas aux batailles de bûches glacées, vu comment le terrain est encore un peu dangereux. Mais qu’importe. Je me sens prête à tout affronter.
Et puis, pour le moment, nous sommes plutôt en route pour Thermidor, le chalet tranquillement installé dans les Alpes.

-J’espère que tu aimes les animaux, je déclare à Adonys en prenant sa main. Y’en a tout plein dans le chalet.

Je lui fais un sourire, me concentre et
CRAC
On transplane.
Depuis le temps que je fais le trajet, j’ai l’habitude, je ne me perds plus. Mais faut avouer, couvrir une telle distance demande de l’effort.
On se matérialise à l’extérieur, à une vingtaine de mètres du chalet. Il a neigé, en montagne. Pas trop. Mais un manteau blanc s’étend à perte de vue.
Je lâche la main d’Adonys et inspire profondément. L’air de la montagne m’avait manqué. D’un grand geste, je désigne le chalet :

-Bienvenue à Thermidor !

J’espère qu’Elias a pensé à allumer le poêle. Parce que, fait quand même un peu froid, dehors.

-C’est ici qu’habite Elias. Et moi. Avant Poudlard.

Je prends le bras d’Adonys et le conduis vers la porte d’entrée.

-T’sais, c’est lui le gérant des Trois Balais.

Je suis presque sûre qu’il a déjà dû le croiser là-bas. Vu le nombre de fois qu’il est venu cet été. Pour boire un verre ensemble -pendant qu’Elias travaillait, justement. Passer du temps ensemble.
Arrivés à portée de main de la porte, je m’exclame :

-Youhouuuu on est làààà !

Nous sommes accueillis par la chaleur douce et tendre du poêle allumé. Evidemment, qu’Elias n’a pas oublié. Comment aurait-il pu en être autrement ? Il a même pensé à l’ambiance sonore, mettant à contribution son précieux gramophone. Qu’il est parfait, ce koloc !
Il nous attend, sagement. Oreo le chat dort dans un coin. En cette saison, il préfère clairement traîner dedans, près du poêle, à dodoter comme un bienheureux plutôt que d’aller se faire geler le bout des moustaches dehors. Dans un coin du salon, le sapin, tout décoré. Ce même sapin qu’on est allés chercher, Elias et moi, avec nos p’tits muscles. Je trouvais que c’était une sacrément bonne idée. Et, avouez, il est beau, là, dans ce salon !
Dans l’air s’élève une douce odeur de cuisine. A croire que tout est prêt. J’ai presque l’impression de me sentir invitée dans mon propre chez-moi. C’est dingue, hein ?
Avec un sourire, je fais les présentations. C’est plus des formalités qu’autre chose. Bien qu’ils ne se soient peut-être jamais parlé, ils connaissent au moins le prénom de l’un et de l’autre vu que je les ai tous les deux avertis que ce réveillon se passerait ensemble.
Poli et propre sur lui, Adonys s’avance et tend la main pour saluer Elias, précisant que je lui ai pas mal parlé de lui. Ce qui n’est... pas faux. Je pense. Enfin, je ne me rends pas bien compte. Mais quand des gens comme le Koloc font partie comme ça de ma vie, il peut sans doute m’arriver de pas mal parler d’eux. Parce qu’on a partagé beaucoup de choses.

Je regarde Adonys. Je sens qu’il veut faire bien. Et n’a, en tout franchise, aucune raison de craindre de faire mal. Je me rappelle qu’une des premières choses que je me suis dites sur lui était qu’il est socialement maladroit. Comme Asclépius. Je sais donc à quel point ce genre de situation peut être stressante pour lui. On n’est pas tous égaux, face aux relations sociales. Dans notre aisance et, surtout, les codes qu’on en connaît. Moins on saisit les codes, moins en se sent en phase. Moins on sociabilise. Plus on se sent mal à l’aise dans des situations comme ça.
Je pose alors une main rassurante sur son épaule. Et lui murmure à l’oreille :

-T’inquiète pas. Tout va bien se passer. Crois-moi.

Il ne le sait sans doute pas -pas encore. Mais Elias est vraiment l’une des personnes les plus cool que cette Terre ait portées. Alors, quoi qu’il se passe, rien ne pourra mal se passer. J’ai une totale confiance. En eux. En cette journée.
Je l’embrasse doucement sur la joue en signe d’encouragement et me tourne vers Elias. Avec un sourire radieux :

-Dis donc, tu as l’air d’avoir vachement tout bien préparé. J’ai presque l’impression d’être invitée dans mon propre chez moi ! Y’a un truc que je peux préparer que tu n’as pas encore fait ?

Sourire, regard qui pétille. Je n’ajoute rien. Mais pense très fort. J’espère qu’Elias saura mettre Adonys à l’aise. Lui montrer à quel point il ne risque rien ici. Qu’importe les maladresses ou erreurs potentielles. Il ne se passera rien de mal.