Après sa longue tirade, Trevor regarda le visage de l'autre Serpentard. Celui-ci ne savait apparemment pas quoi dire vu son état de mi-ébahissement. Il le vit rougir, probablement à cause de leur proximité, alors Trevor se recula, gêné lui aussi. Le deuxième Serpentard tordait ses doigts si violemment que Trevor se demanda s'il n'allait pas se les arracher. Il recommença à parler avec un petit "je..." puis se reprit et déclara d'un air malicieux :

- À en croire par tes paroles, j'atteint la perfection et tu es comment dire... fou de moi.

Le brun s'apprêta à répliquer, mais dû bien admettre que ce qu'il venait de dire était digne d'une pauvre adolescente en chaleur. Il fronça les sourcils et infirma la déduction de son camarade de maison.

- Bien, en fait, c'est pas exactement ce que j'ai dit. Je t'ai juste décrit, tu sais. Mais ça veut pas dire que tu m'attire, non non non, pas du tout.

Il accompagna alors le vert et argent dans son fou rire. Il l'avait fait rire. *Mais pourquoi je mens...* se dit le brun alors qu'il observait le visage de l'autre Serpentard. Il était attiré par le vert et argent, il ne voulait juste pas l'admettre.

Les deux jeunes hommes ne se remirent de leur fou rires que lorsque Wilum prit la parole. Un léger sourire était encore présent sur ses lèvres lorsqu'il fit face au brun à la longue chevelure. Leurs regards s'entremêlèrent et la voix de Wilum résonna dans la salle de bain.

- Tu m'envoie offensé Trevor. Cela est si vexant pour moi tu ne peux pas savoir à quel point.

Il exécuta alors une mine boudeuse qui eut l'effet de faire faire un triple backflip au coeur de Trevor, qui essayait tant bien que mal de ne pas esquisser un grand sourire niait.

- Bon et bien je me dois de te laisser Trevor, il se trouve que j'ai des choses à faire. Aurais-tu une dernière requête à me faire ?

Premièrement, la façon dont la voix de Wilum faisait retentir son nom à ses oreilles semblait tellement faite pour ça que le brun se dit qu'il ne se lasserait pas de l'entendre prononcer son nom à longueur de journée. Deuxièmement, il était tellement plongé dans ses pensés qu'il en avait oublié sa serviette, que sa main ne tenait à présent plus et qui jonchait le carrelage de la pièce. Le vert et argent écarquilla les yeux et se baissa plus vite que l'éclair pour la replacer autour de ses hanches. Il se maudit, lui et sa maladresse et leva un regard désolé envers son camarade de maison. En s'éclaircissant la voix, il lui répondit :

- Hum. Désolé pour ce petit problème...

Le grand brun esquissa alors un sourire, qui accompagnait son visage, encore une fois rouge de honte. Il se frotta la nuque et en mordant sa lèvre inférieure, déclara :

- Euh, tu voudrais aller boire une bièraubeurre un jour, ou demain, même après-demain, hein. C'est comme tu veux...

Encore une fois, il s'y était peut-être mal prit pour demander un rendez-vous à la personne qu'il appréciait grandement. Décidément, tout son charme et ses tactiques de manipulation d'homme sexy s'envolaient en fumé lorsque Trevor était avec Wilum.

Il sonnait quatorze heure, ce jour-là, à la Grande Horloge de Poudlard. Et pourtant, si vous vous étiez promené à ce moment-là aux alentours de ce gigantesque balancier, vous auriez tout raté de ce nouvel épisode de la vie de Peter. Pire, vous auriez probablement pris un blâme ou une remarque acerbe de l'un des membres du corps enseignant. Car, à cette heure-là, les cours sont censés avoir repris depuis belle lurette, et aucun cours ne se donne à proximité du carrefour de couloirs que compose la Grande Horloge. Non, en réalité, le seul intérêt de vous parler de cette gigantesque montre à gousset sans gousset, c'est de vous donner l'heure qu'il était ce jour-là alors que Peter se trouvait nu dans une douche réservée aux garçons à proximité de leur dortoir de Serpentard.

Seul avec lui-même, le Professeur nageait dans un petit océan de vapeurs, le filet d'eau qui s'échappait du pommeau de la douche frappait le sol violemment laissant se diffuser une chaleur moite. Le sorcier n'était pas là pour se laver, d'ailleurs il n'avait emporté ni savon, ni shampoing, ni parfum, ni quoique ce soit qui aurait pu lui donner meilleure allure tout en l'embaumant dans des essences aussi fleuries que fruitées. Il n'avait pris avec lui qu'un misérable essuie (terme belge pour dire "serviette de bain") destiné à détacher son corps de l'humidité latente qui lentement l'entourait.

A cet stade du récit, il serait normal de se demander quelles raisons pouvaient bien pousser un professeur de Poudlard à s'enfermer dans une pitoyable cabine de douche pour écolier alors que lui-même disposait de tout le loisir de profiter d'un bon bain chaud dans ses appartements. En réalité, les raisons étaient multiples et se bousculaient dans la tête et le coeur du sorcier. Tout d'abord, il s'agissait là très nettement d'une sorte de revanche du devin sur ces générations de sorciers qui le surpassaient de loin et qui n'avaient jamais réussi à décrocher une place d'enseignant dans ce bahut. Ensuite, Peter pratiquait la Divination, l'art de lire l'avenir. Et, dans cette branche, pour avoir les idées claires, il fallait bien souvent se pencher sur son passé. Aussi, cela aurait pu être une occasion de croiser Élius, si celui-ci avait eu la mauvaise idée de ne pas être en cours. Or, Peter ne manquait jamais une occasion de croiser le jeune élève de Serpentard, surtout dans des pièces où l'ont était peu vêtu. En réalité, à ce stade du récit, il aurait été bien plus normal de se demander quelles raisons ne motivaient pas le Professeur de Divination à s'enfermer dans l'une de ces pitoyables cabines de douche.

A aucun moment, le sorcier adulte n'avait laissé le jet d'eau le toucher directement. Seuls ses pieds s'étaient perlés de petites gouttes de cette eau minérale écossaise. Le reste de son corps avait cependant embrassé l'humidité ambiante à laquelle s'était ajouté un rien de transpiration, pendant le petit quart d'heure qu'il avait passé là. Lorsque l'ennui commença à poindre le bout de son nez, Peter entreprit de couper le jet d'eau et amorça sa sortie de la douche. Il ne savait pas, alors, qu'il n'était plus tout à fait seul.

A cela, Peter ne s'y était vraiment pas attendu. Il n'avait pas entendu un seul bruit, un peu plus tôt. Rien ne lui avait laissé présager qu'il n'était plus seul. Et, a fortiori qu'il était en présence d'une dame. S'il était tombé sur un petit jeune, il aurait au moins eu le loisir de le toiser de son air professoral préféré, tout en se rinçant l'oeil. Mais la perspective de se retrouver face à une collègue ne lui avait pas effleuré l'esprit un seul instant. Qui plus est, il était face à la ravissante et déterminée Professeure d'Enchantements. Quelques balbutiements s'échappèrent de sa bouche alors que sa physionomie commençait clairement à violer son intimité sous son essuie.

Le tout, à présent, c'était d'essayer de faire bonne contenance. Ce qui était tout sauf évident. La dame était clairement en position de force. Elle était habillée, pour commencer, et puis ses ascendances vélanes, méconnues de Peter, devaient tourner à plein régime pour lui faire monter le rouge aux joues. Il fallait dire également que, si le Professeur s'était plu à collectionner les belles créatures, de tous les genres d'ailleurs, dans sa vie, il n'en restait pas moins extraordinairement peu sexy. Peter affichait, en effet, toujours le même physique qu'à ses dix-sept ans, soit un corps malingre, dénué de tous muscles apparents et une trogne d'adolescent, heureusement épargnée par l'acné juvénile. A cela, il fallait ajouter l'évidente absence de bronzage due au ciel écossais. En un mot comme en cent, le sorcier, ainsi dépouillé de ses riches vêtements en soie, n'en menait pas large.

- Professeure De Lanxorre ?

*Quel nom idiot déjà !*

- Vous cherchez quelque chose ?

*Et qu'est-ce que c'est que ce décolleté ?*

- Ou, plutôt quelqu'un ?

*Et où sont vos chaussures ?*

Certes, si vous connaissez suffisamment Peter, vous savez que celui-ci n'a d'ordinaire rien contre le fait de se retrouver très peu vêtu en présence d'autres personnes, surtout si celles-ci sont attirantes et particulièrement inaccessibles. Néanmoins, le sorcier avait bien conscience, à cet instant, qu'en terme de relation, on ne pouvait être à la fois chasseur et chassé. Pour la première fois, le voilà qui se retrouvait dans la position du chassé et cela était à tout le moins perturbant ...

La vie, c'était, et c'est toujours d'ailleurs, une dure lutte. La lutte étant caractérisée par l'opposition de deux camps antagonistes, il y avait le bien et le mal, les aurores et le crépuscule, ou encore Peter et les jolies femmes. Dans certains cas, l'opposition ne se amrquait plus entre deux camps mais entre trois camps, comme lorsque les Phénix affrontèrent les Mangemorts tout autant que les Aurors, ce genre de configuration rajoute autant à notre désarroi qu'il dessert notre métaphore. Ainsi, Peter avait pris l'habitude de considérer son rapport aux femmes comme des luttes acharnées, qui se terminaient toujours par le partage du fameux sésame ! Il n'était donc pas question que la sorcière continua à se jouer de lui, le dominant physiquement, plus longtemps.

En parfait petit Serpentard, Peter savait néanmoins que le meilleur moyen de renverser la vapeur était de faire mine de ne pas la renverser. Aussi laissa-t-il la sorcière terminer son numéro de dominatrice hautaine, avant d'amorcer la reprise de l'avantage. La voilà qui ne pouvait pas s'empêcher de jouir de sa toute-puissance de femme débordant d'attirance. Elle avait approché ses crocs de serpent jusqu'autour de son cou. La confiance dont témoignait la jeune femme n'avait d'égal que la sournoiserie de son collègue qui n'avait plus qu'à renverser la table.

Tout commença par un contact physique. Peter plaça ses mains sur les hanches de la dame, tout en soutenant son regard de ses grands yeux bleu-vert. Il n'avait pas réellement idée de ce en quoi était composée la tenue de la Professeure d'Enchantements, mais une chose était sure, elle ne croulait pas sous le tissu ...

- C'est tellement gentil à vous de prendre un peu de votre temps pour un simple mortel comme moi ...

Sur ces mots étouffés, le devin supprima le reste de distance qui séparait leurs lèvres. L'effet sur lui fut immédiat. Il laissait soudainement au vestiaire toutes les considérations qu'il avait bien pu avoir quand à la lutte et la domination dans une relation. Il avait simplement envie de se livrer tout entier à elle. Aussi l'attira-t-il vers un mur pour l'y plaquer délicatement alors que la robe de la dame trainait toujours dans l'eau. D'un geste inconscient, il envoya baladé l'essuie qu'il avait autour de la taille, et qui ne tenait plus des masses de toutes façons, libérant ainsi ce qu'il lui restait d'intimité.

C'était fou la vitesse à laquelle tout s'était soudain tu dans la salle de bain des garçons de Serpentard. Subitement, il n'y avait plus rien ni personne que deux amants enlacés. Peut-être même que si on avait actionné un robinet, l'eau aurait été incapable de couler. Et pourtant, il y avait une atmosphère terriblement moite. Une vraie chaleur se diffusait depuis les deux professeurs dont les corps se comprimaient au rythme d'une étreinte interminable.

C'était indéniable, la sorcière savait jouer. Et elle connaissait sa partition par coeur ! Peter, lui, avait arrêté de se contrôler depuis un petit moment. Si elle ne s'était pas autant abandonnée à leurs ébats, elle aurait pu se servir de lui comme d'une marionnette. Le sorcier tenait la sorcière, il était hors de question qu'il la laisse partir. Pas là, alors qu'elle avait usé tous ses tours sur lui. Chaque centimètre carré de peau que sa partenaire pouvait bien lui découvrir poussait Peter un peu plus vers les précipices de leur relation.

- Viens.

Il n'en fallait pas plus au devin pour qu'il concrétise enfin ce que sa partenaire avait amorcé en le retrouvant là. Sans plus de cérémonie, ni de préparation, le sorcier rentra dans le vif du sujet. C'était particulièrement primaire de se s'épouser ainsi contre la paroi en carrelage terne. Mais tous deux semblaient avoir tellement désiré ce moment que peu importait le cadre. Rapidement, Peter du se mordre la lèvre pour réprimer le râle que leurs corps entrelacés lui inspiraient.

Et puis, dans un mouvement sorti de nulle part, d'une main libre il arracha la robe de la sorcière en l'attrapant au niveau de la poitrine. Le chétif sorcier s'étonna lui-même de la force dont il était capable de faire preuve. Mais il ne resta pas longtemps à ce genre de considération. Déjà le tissu sombrait sur le sol, où il pouvait se gorger d'eau par endroits. Les deux professeurs, eux, continuaient à respirer ensemble, pendant que Peter profitait d'avoir désormais le corps tout entier de sa partenaire à disposition.

Cette fois-ci, la Grande Horloge de Poudlard avait sonné quinze heure. Dans une dernière expiration, Peter rendait sa liberté à sa partenaire. Celui-ci s'appuya lui aussi contre le mur, à coté d'elle, pour laisser les battements de son coeur diminuer lentement. Les yeux fermés, il essayait de bien imprégné chaque instant qui venait de s'écouler, tout en laissant son corps reposer. C'était qu'il n'avait pas la meilleure condition physique du monde, loin de là.

Au bout de quelques instants, il rouvrit les yeux pour les diriger vers le corps nu de sa collègue Professeure d'Enchantements. Ce n'était certainement pas elle qui allait se plaindre d'être ainsi reluquée. D'autant que c'était elle qui l'avait coincé là. Quoiqu'à bien y regarder, il avait commencé à la convoiter le premier. En fait, il n'était pas contre remettre le couvert, surtout quand il avait la sorcière ainsi en ligne de mire. Mais peut-être allait-il leur falloir un lieu un rien plus privé ...

- Pourquoi moi ?

Dans la tête du sorcier, se mélangeaient effectivement mille et une considérations, alors il était probable que l'homme ne su pas exactement s'empêcher de briser ce moment de silence consensuel avec une question idiote. A peine l'avait-il posée, il l'avait regrettée. Mais après tout, il y avait de quoi s'interroger. Lorsque l'on pouvait obtenir tous les hommes que l'on voulait, pourquoi chercher à avoir le rachitique collègue à la matière si tordue ? Peut-être qu'au fond de lui, Peter n'était pas si imbu de lui-même finalement ...

La dame était aussi assurée qu'insatiable. Aussi, alors que la musique repartait, certes sur une mélodie un peu différente, Peter se demandait s'il avait déjà connu pareille amante par le passé. Peut-être que, pour la première fois de sa vie, il se demandait si ce n'était pas lui qui allait en avoir assez le premier. Et pourtant sa réputation de séducteur déplumé n'était plus à faire, c'était un fait. Mais il y avait quelque chose de différent cette fois. Il se sentait clairement dépassé par la situation. Car c'était bien son partenaire, et non lui, qui tenait les rênes et cela l'effrayait.

Prenant tout de même le soin de s'appliquer à sa tâche subite, le sorcier ne pouvait s'empêcher de ressentir cette gêne de la perte de contrôle. Et pourtant, il aurait dû le savoir que ce n'était pas inscrit dans les astres que les hommes devaient toujours avoir l'initiative dans les rapports sexuels. A l'évidence, Cara avait un talent inouï pour faire revenir brutalement les hommes les plus dépravés sur terre et leur infliger la leçon de leur vie. Car, si Peter n'avait pas connu que des femmes dans sa vie, toujours il s'était employé à reproduire le même schéma de domination et de recherche du plaisir personnel. Il la méritait, la claque qui consistait à soudain lui faire perdre pied et à lui rappeler que ce genre de choses ne se vivaient pas seul.

C'était que les hommes étaient tous les mêmes, à la fois Docteur Jekyll et Mister Hyde. Les hommes étaient des lions, à eux la représentation du pouvoir mais, dans les faits, les lionnes faisaient tout dans l'ombre de leurs siestes. Et, même les plus gentlemen pouvaient se sentir blessés lorsque l'on touchait à la seule once de pouvoir qu'ils s'appropriaient encore, résurgence de millénaires de patriarcat débridé.

Lorsque Peter se releva enfin, il eut le souffle coupé. Leur dernière danse n'avait pas été des plus éprouvantes physiquement, mais il était à bout. Dans son regard bleu-vert régnait une lueur d'acier, le voilà qui se fermait totalement. Comme tant d'autres, il réagissait comme un petit enfant déçu par son cadeau d'anniversaire. Cela avait été exactement ce qu'il voulait, mais il n'avait pas été le roi. Alors, le voilà qui masquait les félures internes, que Cara venait d'ouvrir, derrière un masque de froideur. Affichant un léger sourire goguenard à sa complice, il donnait le change, mais il était brisé.

- Eh bien, quelle après midi !